Accoucher dans la détresse

Publié le 26 novembre 2007 par Willy

Accoucher dans la détresse
Par http://lesactualitesdudroit.blog.20minutes.fr/


C’est l’histoire d’une jeune fille de 17 ans qui semblait avoir tout pour être heureuse. Décrite comme une personne « altruiste et rayonnante », elle était lycéenne, diplômée d'un BEP Action sanitaire et sociale, et visait les études d'infirmière. Elle était sortie major de sa promotion de jeunes sapeurs-pompiers volontaires, et était membre du corps des pompiers de sa commune, Souillac dans le Lot. Et un petit copain.

Mais cette jeune lycéenne, sous ses sourires et son allant, vivait le drame : une grossesse non assumée. Elle est parvenue à cacher cette grossesse, et accouché seule, dans le plus grand désarroi, courant octobre à son domicile à Souillac. D’après les premiers éléments connus de l’enquête, elle aurait étouffé le nourrisson, avant de le cacher dans un garage, où le corps a été retrouvé jeudi par son père. Devant les gendarmes, elle aurait reconnu les faits. Le juge l’a mise en examen pour « meurtre aggravé », et la jeune fille a été écrouée.

Le désarroi enfoui derrière le sourire. Et un acte si mal assumé que tout a été fait pour que la piste puisse être retrouvée au plus tôt.

L’infanticide... toute généralisation est hasardeuse, et l'on sait peu sur les faits. Pourquoi, dans ce contexte ressenti sans issue, le recours à l’IVG n’a pas été possible? Mais une telle affaire est l’occasion de rappeler cette particularité du droit français qu’est l’accouchement sous X.

De tradition ancienne, la loi permet à une mère de ne pas déclarer la naissance, par le procédé de l'accouchement sous X. L'enfant est déclaré par un tiers, en général l'établissement hospitalier, comme s'il avait été trouvé, sans qu'aucun lien ne puisse être établi avec la mère. C'est l'article 341-1 du Code civil qui permet ce silence: « Lors de l'accouchement, la mère peut demander que le secret de son admission et de son identité soit préservé.»

Ce procédé n'existe pas dans tous les Etats. Il est défendu comme une mesure d'assistance pour la mère et l'enfant : la perspective d'une naissance est parfois telle que la mère pourrait se livrer à des expédients mettant en cause sa vie ou celle de l'enfant. Cette crainte justifie un procédé permettant à la mère d'accoucher dans les meilleures conditions sanitaires et de ne pas s'impliquer dans une filiation qui la dépasse.

Sans doute, parce qu'elles permettent de sauver des vies, ces dispositions sont défendables. Mais ce système qui revient à faire disparaître toute trace de la filiation est très abrupt : pour la mère qui, parvenue quelques années plus tard à une meilleure stabilité, souhaiterait reprendre contact avec l'enfant ; pour l'enfant, qui a besoin de connaître sa filiation ; pour le père, qui est définitivement écarté. La loi du janvier 2002 a apporté des aménagements, sans remettre en cause le principe. La mère dispose d'un délai de repentir de quelques mois ; elle est encouragée au moment de l'accouchement à laisser ses coordonnées ou des éléments qui permettront peut être un jour à l'enfant de savoir qui était sa mère. Enfin, est créé un organisme national qui a en charge d'aider à la reconstitution de ces liens effacés, le Conseil national pour l'accès aux origines personnelles.

Nombre d'enfants nés sous X bénéficient d'une adoption qui se déroule dans les meilleures conditions, mais manifestent le désir ardent de connaître leur filiation. Ce lien doit pouvoir être rétabli, mais il ne faut pas sous-estimer la détresse extrême de certaines femmes confrontées à une naissance qui leur paraît insurmontable. Dès lors, si une forme de « sous X » doit être maintenue, pour palier aux situations de grande détresse, tout doit être fait pour organiser le retour à la filiation, dès la détresse passée.