En particulier, il rappelle la nécessité d'une action précoce dès la maternelle qui doit à cet égard se comporter comme une « véritable école » par un enseignement systématique du langage oral : « leçons » de vocabulaire, récitation de textes ou de chansons, lecture (par la maîtresse) de grands textes de notre littérature.
A l'école primaire, le ministre rappelle – dans les orientations déjà marquées par les programmes de 2008 – l'importance de l'apprentissage par cœur, la répétition et la récitation, et l'importance de la lecture à voix haute (par le maître comme par les élèves).
En tout cela, nous approuvons entièrement le ministre. Par contre, une fois de plus, nous devons déplorer l'absence ne serait-ce que de la mention d'une disposition pratique, d'une décision quelconque concernant les modalités et les moyens.
Ainsi, en maternelle, le ministre se propose de développer l'aide personnalisée créée dans le primaire en 2008. Nous redisons notre conviction que l'aide personnalisée au sein d'une classe ne peut être utile qu'aux élèves en faible retard ou en décrochage temporaire. Les élèves en grand retard appellent des moyens beaucoup plus spécifiques et plus lourds (et le rapport Bentolila traitait le cas d'un grand nombre d'élèves en retard massif de vocabulaire)
Il faut donc, à la maternelle, distinguer au moins trois groupes :
- Celui des enfants mauvais francophones pour leur âge parce que dans leur famille et leur environnement, on ne leur parle pas ou pas assez ou très mal.
- Celui des enfants non francophones mais qui s'expriment normalement pour leur âge dans une langue maternelle différente de la notre
- Les autres
Dans ce dernier groupe, le plus nombreux, la plupart des enfants ont besoin d'améliorer fortement la qualité de leur vocabulaire et de leur syntaxe. On peut raisonnablement supposer que, moyennant un supplément de formation, les maîtres en poste actuellement peuvent s'en charger.
Par contre, pour les deux premiers groupes, c'est un autre métier ou du moins une spécialisation poussée qui est nécessaire. Il faudrait donc rapidement susciter des candidatures parmi les enseignants de maternelle, les sélectionner et leur donner une formation intensive.
A juste titre, Luc Chatel mentionne l'importance des familles et annonce aussi un partenariat avec certaines institutions ou associations. Il reste à créer les modalités pratiques d'une collaboration volontaire des maternelles et des municipalités avec les associations qui ont déjà un savoir faire dans l'aide aux enfants mauvais francophones et dans l'établissement de relations de confiance avec leurs parents.
Dans le primaire, nous redisons notre conviction qu'il faut faire une place à part au CP auquel incombe une mission essentielle dans la lutte contre l'illettrisme : faire en sorte qu'à l'issue du CP, 90 à 95% des élèves sachent lire et écrire.
Comme pour la maternelle, cela justifie l'attribution d'urgence de moyens importants dans la formation professionnelle d'un grand nombre d'instituteurs, le choix d'instituteurs expérimentés (et non de débutants) dans la généralisation de la méthode alphabétique
Consacrer immédiatement des moyens massifs à la maternelle et au CP pour juguler l'illettrisme serait l'un des investissements collectifs les plus rentables qui se puissent concevoir pour la France.