A vous qui découvrez ce titre en pensant que je vais vous conter comment j’ai eu un coup de foudre amoureux au cours d’une séance, vous vous méprenez. Il s’agit de l’autre coup de foudre, non métaphorique, à prendre au pied de la lettre. Les projections perturbées le sont régulièrement de manière diverses et variées, mais alors que l’engueulade entre spectateurs, les problèmes de son, ou la bande de jeunes qui commentent le film en live sont presque monnaie courante, j’ai expérimenté lundi soir une perturbation inédite.
C’était à l’UGC Ciné Cité Bercy, devant le film Blanc comme neige de Christophe Blanc. Petit polar d’inspiration "Coenienne", le film est tout à fait mineur et n’est pas promis à une pérennité durable d’un point de vue artistique. Pourtant je me souviendrai longtemps de la projection. Celle-ci s’est déroulée normalement pendant plus d’une heure. Peut-être faudrait-il que je vous dise en quelques lignes de quoi il retourne dans le film de Christophe Blanc. François Cluzet y incarne un riche vendeur de voitures qui, suite au décès pas franc du collier de son associé, découvre que ce dernier magouillait avec des mafieux finlandais. Mafieux qui demandent désormais des comptes au personnage de Cluzet, qui va mobiliser ses frères, campés par les excellent Olivier Gourmet et Jonathan Zaccaï, pour se tirer de ce mauvais pas, sans que sa femme ne se doute de la délicatesse de la situation.
Je disais donc que pendant plus d’une heure, la projection de Blanc comme neige s’est déroulée sans accroc. Puis tout à coup, au cours d’une séquence assez tendue durant laquelle la femme, incarnée par Louise Bourgoin, découvre que les trois frangins détiennent un des mafieux, blessé et caché dans un chenil sombre, le temps s’est suspendu dans la salle. A l’écran, le mafieux souffle avec difficulté à Louise Bourgoin : « Allume… allume ! ». Et à cet instant précis, la lumière se rallume dans la salle, et l’écran devient blanc. Un moment de flottement traverse les rangées… que se passe-t-il… comment se fait-il qu’au moment exact où l’un des personnages murmure « Allume », la lumière se fait dans la salle ? Est-ce une blague ?
Évidemment non, au bout de quelques secondes, il paraît clair que quelque chose cloche… Un spectateur du fond de la salle sort (faut assumer de préférer se mettre dans les derniers rangs !)… puis revient quelques instants plus tard avec un employé du cinéma, qui fait l’annonce la plus inattendue qui soit : « Mesdames et messieurs, désolé de cette interruption due à l’orage, la foudre est tombée et a causé une coupure de courant, le film redémarrera dans quelques instants »… Pardon ?? La foudre a frappé le cinéma et a entraîné l’interruption des projections ?! Car je suppose que notre salle n’était pas la seule touchée, toutes les salles se sont certainement trouvées baignées de lumière en pleine projection. Il ne m'était jamais vnu à l'esprit jusqu'ici qu'un orage pouvait perturbé les projections de films, et je l'ai découvert de façon brutale (et étrangement surréaliste grâce à la réplique qui coïncidait parfaitement).
En vivant cette drôle de situation, je me suis rappelé un autre incident du même acabit, survenu six ans plus tôt dans ce même UGC Ciné Cité Bercy, pour la projection du Sourire de Mona Lisa. A l’époque, le cinéma avait subi une alerte incendie, qui avait causé l’interruption de toutes les séances au son retentissant d’une sirène, entraînant du même coup l’évacuation des salles. Un beau bordel qui avait duré quelques minutes avant que nous ne regagnions nos places et que le film reprenne. Heureusement il s’agissait déjà alors d’un film passable (avec Julia Roberts celui-là).
Mais si la foudre n’a pas entraîné une évacuation aussi grandiloquente que celle du Sourire de Mona Lisa, elle a assurément causé un de ces moments de grâce totalement inattendus que l’on croirait sortie d’un film… « Allume… Allume ! ». Et la lumière fût. Laissant l’écran blanc comme neige.