« Les pièges du crépuscule » de Franck Tallis est un policier qui s’inscrit dans la tradition de la fiction criminelle des grands détectives. Le tandem créé par cet auteur présente la brillante particularité d’associer un policier à un psychiatre : Oskar Rheinhardt et Max Liebermann.
Les deux amis mènent de front leur enquête, fortement encrée dans la Vienne du début du XXème siècle. Celle ville est alors la capitale culturelle de l’Europe et l’auteur dépeint à merveille son activité artistique foisonnante : Max Liebermann le psychiatre, est un disciple de Freud avec qui il s’entretient à l’issue de conférences présentées par ce dernier. D’autres grands noms de l’époque interviennent également comme le musicien Mahler ou le dramaturge Schnitzer.
Mais c’est également à cette époque d’avant guerre que bouillonne un courant antisémite populiste, mené par Karl Lueger, le maire la ville et chef de fil du parti chrétien-social qui plus tard influencera Hitler.
Telle est l’ambiance où se déroule l’intrigue, impeccablement documentée. Des meurtres d’une rare violence évoquent la créature du Golem, née de croyances juives hassidiques. La tradition religieuse, son histoire puisée dans l’ancien ghetto juif de Prague et les croyances y étant associées sont peintes par l’auteur avec une grande précision : il éveille puis nourrit notre curiosité, tout en maintenant l’ambiance palpitante de l’enquête criminelle. L’éternel conflit entre science et religion est palpable et en même temps que les traditions religieuses, Franck Tallis nous offre une plongée dans la psychanalyse du début du siècle et dans la théorie freudienne de l’interprétation des rêves.
Ce récit constitue ainsi un petit bijou de savoir qui échappe aux longueurs professorales grâce au suspens de l’enquête en cours : on ne peut que se hâter de tourner les pages, ravis de s’instruire en même temps.