« L’intranquille » est un livre d’une profonde honnêteté. Gérard Garouste se livre sans détour et sans concession. Il avoue au grand jour les fautes et les hontes de sa famille, tout ce qui constitue son héritage et qui influence tellement son art. Il parle ouvertement de son père, antisémite violent, dont il dit « Il n’avait pas pu faire héros. Alors il avait fait salaud ».
Le peintre raconte son enfance marquée par la violence paternelle, les silences effrayants, les non-dits et le manque de lien affectif. Il explique sa déroute scolaire et son désarroi de petit garçon. Son père est pourtant celui qui saura repérer son talent et l’inscrire à des cours de dessin puis, se sachant nocif au bon développement de son fils, l’envoyer en pension. Il y fera l’apprentissage du monde extérieur et des familles « normales ».
Puis d’un seul coup, alors que l’épouse de Garouste attend leur premier enfant, le récit prend un virage plus grave encore lorsque l’auteur confie ses crises de délires et de paranoïa, lorsqu’il avoue ses séjours répétés en hôpital psychiatrique. Les mots de Judith Perrignon sont alors si justes que l’on plonge littéralement dans l’enfer de l’artiste puis dans son lent retour à la vie … en attendant la prochaine crise.
On comprend au fil de la lecture qu’au même titre que ses peintures, ce récit est une thérapie : « j’ai peut être fait une œuvre en forme de circonstance atténuante ».
Maintenant que tout est dit, il sera intéressant de voir si son art lui aussi peut guérir, si le peintre pourra désormais, comme il le souhaite « s’autoriser plus de légèreté ».
Ce récit en tous les cas est loin d’être léger. Il est admirablement sobre, profond et d’une honnêteté désarmante ; une belle leçon d’introspection.