C'était d'ailleurs là tout l'intérêt de cette initiative. Nous avons pu rencontrer Charles Kermarec, PDG de la librairie et fondateur de la maison. « C'est le rêve de bien des libraires de monter leur maison, et dans la mienne, je ne publie que ce qui me plaît. Ou plus précisément, ce que j'ai envie de lire. » L'homme a le verbe direct, plutôt franc du collier, mais il reste Breton. On va marcher sur des oeufs, par mesure de prudence, tout de même.
Alors, comment vit-il l'idée que l'on puisse télécharger en deux secondes les livres qu'il propose gratuitement ? « Vous savez, les petits margoulins qui s'amuseront à ça sont tout simplement des malhonnêtes. Mais ce n'est pas propre au numérique : dans les libraires, on a toujours connu des vols, généralement entre 1,5 et 2 %. Alors, évidemment, ça m'ennuie, mais c'est ainsi. Et il faut se dire que ce sont eux qui créeront de nouveaux gendarmes et des policiers supplémentaires, en agissant de la sorte. »
Pour un peu, on l'entendrait presque parler de Hadopi, à peine à demi-mot. « Je suis tout à fait conscient que cela pourra arriver, de même que cela arrive avec les livres papier. Et il ne s'agit pas simplement de scanner le code, puisqu'il existe une petite adresse, assez facile à mémoriser, par laquelle ils pourront aussi se procurer gratuitement le livre. »
Mais Charles Kermarec a pris le parti... de faire confiance aux lecteurs. « Il n'est pas question de mettre des vigiles dans ma librairie ni derrière mes livres, sûrement pas ! Je préfère considérer que les gens seront honnêtes et joueront le jeu. Et dans le pire des cas, je pense à ce blogueur désargenté, qui piratera le livre, mais l'appréciera peut-être et en parlera autour de lui. Dans ce cas, peut-être qu'il le fera acheter par un de ses proches. »
Confiance contre ebook : un sacré pari pour notre éditeur-libraire, qu'on peut saluer. Et de conclure avec un sourire : « Vous savez, l'idée, avant tout, c'était de faire de beaux livres, dont la couverture commence avec l'écriture manuscrite, et qui s'achèvent sur un flashcode. On part d'un point de la création, pour aller jusqu'à l'autre. Et comme ça, on peut mettre du numérique dans les librairies sans qu'elles ne soient inquiétes. C'est plutôt bien, ça, non ? »