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S.d.v.n.m.o.r.n.b.

Publié le 29 mars 2010 par Menear
1
Itunes au lieu de charger les playlists fraîchement extirpées du net choisit de les détruire. Je me retrouve au seuil de la porte sans aucun titre enregistré dans la machine. Le silence d'un lundi matin, bleu ciel ou pas, est insurmontable. Le chaos des gens qui vivent, autour, et empiètent sur moi m'agresse. Même sous le vacarme de la rame, ligne 14, trouver le moyen d'entendre ce corps opposé, cravate au col, miettes aux lèvres, qui mastique, racle trop loin la gorge, exhibe en bref salive et pulsations tout contre mon tympan à sec. À la place, autre jour, une playlist que j'aurais choisie moi-même aurait recouvert tout ce calvaire.
2
Quitté plus tard, boulot plus lent. Pot de départ d'un collègue muté à T. J'ai souri quelques fois, soufflé en choeur dans une langue de belle mère, dit bonne chance, bonne continuation. En lui tapant les doigts sur l'épaule, lui dire aussi qu'en lui réside tous les espoirs de la société s'il ne veut pas à son tour « couler la boite ».
3
Chaque traversée du couloir souterrain gare de C. réveille souvenir indistinct d'école maternelle. L'odeur du détergeant fait office de détente, madeleine mécanique inattendue. Rien d'autre ne vient, seul le souvenir de l'odeur qui reste déconnecté du reste. D'un souvenir à l'autre, il déclenche aussi l'image d'un soir à M., je ne sais pas quel âge j'ai ni pourquoi je ne dors pas dans la chambre où habituellement mon frère et moi dormons, où ma mère m'explique que je dois fermer les yeux avant « d'arriver à dormir ». Alors je réalise qu'il faut bien fermer les yeux pour dormir, et non pas s'endormir pour que les yeux se ferment, découverte qui renverse au moins le monde.
4
Je reprends sans rire le fameux Journal des activités migraineuses, échantillonnages de la douleur & tentatives de géolocalisation des crises, en poursuit les éternelles compilations de données fragmentées. Je constate que depuis quelques semaines la douleur évolue. Plus beaucoup de crises mais des douleurs régulières, moins longues, plus diversement localisées. Je ne cherche plus de cohérence dans ces douleurs ni d'origine. Je n'écoute pas H. qui me conseille encore de consulter. Je cartographie simplement l'évolution des sens. Je ferme les yeux dans les trains du retour. Consomme facile les Dafalgan par boite de seize. Je me persuade que ces douleurs sont peut-être liées au stress régulier qui m'habite, aux colères perpétuelles cultivées. Je me force à rester calme, calme, calme, plus que je ne pourrais jamais l'être. Je reprends sans le vouloir mes propres paris de mes 16 ans passés : aujourd'hui, promesse faite à moi-même, je ne serai désagréable, désagréable avec personne.

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