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Je me suis mis les pieds dans les plats il y a quelques jours… J’avais pourtant respecté ma ligne éditoriale depuis plus de 18 mois et j’ai succombé en appuyant l’idée de M Moore. ‘Assume mon homme, assume !’ C’est effectivement ce que je m’apprête à faire. L’idée donc d’une gouverne toute canadienne (ou d’un autre pays) pourrait ressembler en fait à ce qui se vit avec les Casques bleus : Un pays qui dirige une force multinationale. Le Brésil fait le travail ici au sein de la Minustah et les rumeurs sont généralement favorables. Certaines personnes (dont le Président Préval lui-même) proposait la création d’une force internationale (les Casques rouges) pour coordonner l’aide dans les pays confrontés à une catastrophe naturelle, force qui pourrait elle aussi être coordonnée par un seul pays. On réglerait peut-être le fouillis que l’on connaît au plan de l’aide internationale et qui s’est exacerbé dans les jours qui sont suivi bagay la. Ce premier aspect ne pose pas de gros défis politiques ou sociaux pour les haïtiens, on ne parle que de coordonner l’aide. L’idée de Moore va plus loin, elle présuppose une prise en main politique du pays pour les 15 ou 20 prochaines années. Ici, les réactions sont mitigées. On rencontre des gens pour qui la crise humanitaire est trop grande, ils veulent voir leur pays sous tutelle internationale, exit les dirigeants ayisien, pis au pc ! On discute avec d’autres qui préfèreraient voir Ayiti reprendre son statut de colonie, question de recevoir l’aide structurante d’une métropole et maintenir une certaine autonomie. Et finalement, certains qui refusent (plus ou moins énergiquement) que la souveraineté de leur État soit menacée. Mes premières interprétations du discours de ce dernier groupe tournaient toujours autour d’une réaction ‘nationaliste’ un peu classique qui s’inscrivait dans la grande force des ayisien de se remémorer leur histoire esclavagiste et le rôle historique qu’ils ont joué dans le début de la fin de l’esclavagisme (ou presque malheureusement, il y a de ces tares qui restent actives un peu partout dans le monde) et des pratiques colonialistes. Deux victoires de hautes luttes, les Français et les Américains entre autres leur ont fait payer le prix pendants des années d’avoir réussi ces deux premières… L’autre aspect de cette réaction est plus politique. Elle se manifeste de manière officielle dans le discours du Premier-Ministre et du Président : Ayiti sera reconstruit PAR des ayisien, et POUR des ayisien. Plusieurs ayisien qui appuient ce discours nous disent que le PAR et le POUR auraient leur importance historique, la communauté internationale ayant trop souvent contrôlé la direction du pays pour pouvoir mieux piller ses ressources naturelles. Il y a également l’autre lecture de la réaction politique, disons simplement plus intéressée : ‘Les politiciens ont la main dans la caisse depuis des années, vous ne leur enlèverez pas ce privilège’. Les graffitis qui ont fait leur apparition un peut partout à PAP depuis quelques semaines seraient la réaction ‘informelle’ de ces intérêts : aba blan, aba okupasyon, aba ong, ou encore viv retou Aristide, viv Préval, viv senate X … L’idée de M Moore (que je partage …) a donc plusieurs défis avant de pouvoir se réaliser. Convaincre les politiciens aysien, une partie de la population et les grands acteurs de la communauté internationale… Tout est dans la manière, Obama nous l’a démontré la semaine dernière !