Au programme de ce samedi matin, j'ai choisi de suivre la conférence "La construction européenne : Utopie ou réalité vivante"qui accueillait :
- Pierre Moscovici (Député du Doubs, Ancien ministre chargé des Affaires européennes),
- Catherine Trautmann (Députée européenne, Ancien ministre de la culture)
QUELQUES PROPOS ENTENDUS AU COURS DE CETTE CONFERENCE :
Dans le discours d'introduction :
Je salue le thème que vous avez choisi qui me parait illustratif du chemin que nous devons parcourir ensemble, c'est à dire d'aller vers une Europe qui accepte la Turquie, une Turquie pleinement Européenne...
Les négociations sont entamées, elle se déroulent depuis le début des années 2000...
Nous sommes actuellement à un point difficile de la négociation ; je pense moi que l'Union Européenne doit prendre ses responsabilités et accepter d'aller jusqu'au bout du processus...
Est-ce que cette adhésion interviendra ?
J'observe aujourd'hui une situation qui est balancée : il y a des avancées incontestables.... en même temps ne cachons pas qu'il a des sujets de préoccupation qui demeurent : il y a la question chypriote qui devra être résolue d'une manière ou d'une autre... il à la question des libertés qui me préoccupe... et puis il y a une question délicate que je préfère aborder de front ici, c'est celle de la reconnaissance du génocide arménien...
Il est tellement important de multiplier les relation bilatérales de le faire comme nous le faisons à travers des clubs, des relations de gouvernement à gouvernement de parlement à parlement et puis à travers des manifestations comme la votre...
Des manifestations qui sont des manifestations citoyennes, qui manifestent de cette volonté d'avancer ensemble, d'être pleinement turc mais aussi d'être pleinement européen...
La construction européenne : utopie ou réalité vivante ?
Au départ de l'Union européenne, on a raté la marche de l'union politique, on a préféré la coopération économique débouchant sur l'union politique et cette origine marque jusqu'à présent l'Union européenne...
Comment est-ce que nous pouvons désormais surmonter le poids des divisions européennes pour construire une Europe unique qui rassemble tous les européens ?
Ceux de l'Ouest mais aussi ceux de l'Est...
L'Europe a connu une avancée chaotique vers l'élargissement, avec parallèlement un débat institutionnel très compliqué, très douloureux et un approfondissement insuffisant.
L'Europe a été en meilleure forme qu'aujourd'hui, la situation de l'Europe n'est pas aujourd'hui idéale, c'est une Europe anémiée...
D'abord parce que sur le plan institutionnel, malgré tout, il y a eu une longue marche, avec de longues phases d'incertitude, avec de longues phases de vide qui ont fait que pendant ce temps là, la politique n'étant pas au rendez-vous, les politiques n'avançaient pas autant qu'elles l'auraient pu..
Une deuxième chose, cette Europe, du coup, me paraît assez en retard par rapport aux attentes des peuples...
L'Europe n'est pas aujourd'hui très populaire, ce qu'on appelle l'Eurobaromêtre sur la mesure de satisfaction de l'opinion est assez faible...
On constate une distance entre l'Union Européenne et toute une catégorie de la population...
Il y a le sentiment que cette Europe s'est éloignée des peuples, éloignée des préoccupations populaires... ça pour les dirigeants européens ça devrait être un souci majeur, ne pas s'enfermer dans une sorte de Tour de Babel, ne pas se réfugier dans des institutions prestigieuses mais essayer de convaincre à nouveau les peuples, de l'intérêt qui est le leur, de participer à la construction européenne...
Et si il y a cette désaffection populaire, c'est parce que les politiques ne sont pas suffisantes...
Politique économique : l'Europe n'a pas réussi pendant la crise à mettre en place des politiques de relance convaincantes...
L'élargissement : qui a été vécu par un certain nombre de pays, dont la France, de manière très douloureuse...
Voyez ce qui s'est passé avec la crise grecque, pour la première fois depuis très longtemps, on a assisté à une attitude allemande qu'on peut qualifier d'égoïste...
l'Allemagne a abandonné la solidarité nécessaire avec un pays qu'elle a considéré comme laxiste, au profit d'une culture de la stabilité financière qui est certes une marque de fabrique de la république fédérale ; mais je crois, qui est tout à fait regrettable...
L'Europe ce ne sont pas uniquement des gouvernements, ce sont également des institutions fédérales et d'abord une commission européenne qui doit être plus forte, un parlement européen qui doit porter la parole du peuple européen...
Voila où nous en sommes, une Europe qui est incertaine sur son sens, une Europe qui est plutôt mal dirigée, une Europe politique faible...
Est-ce que nous voulons une Europe strictement économique, une Europe Club chrétien, une Europe refermée sur elle-même ?
Où est-ce que nous souhaitons une Europe qui soit plus ouverte au monde, une Europe qui accepte une dimension multiculturelle, qui recherche de nouveaux partenaires, qui recherche aussi un poids géostratégique plus important ?
Nous devons nous battre pour une Europe politique, pour une Europe économiquement plus active, pour une Europe socialement plus présente, et nous fixer des rendez-vous, aux alentours de 2020 pour l'adhésion de la Turquie... Ne pas perdre la foi, ne pas perdre le cap, conserver l'idéal qui fait avancer l'humanité...
J'ai essayé de vous dire dans un langage assez simple ce que je pensais vraiment, sans cacher les difficultés de l'Europe aujourd'hui, mais sans pour autant percer dans un quelconque pessimisme ou scepticisme...
l'Europe demain comme aujourd'hui sera toujours un combat.
Le débat est important est très utile, en particulier s'agissant d'étudiants, s'agissant de jeunes qui ont à la fois pour acquis, l'existence de l'union européenne, qui ont pour question, la place qu'ils peuvent y tenir, et avec la question, pour les étudiants turcs de savoir comment ils peuvent contribuer à la transformer, à l'intégrer, à la modifier en fonction de leur culture...
L'Europe est une histoire qui oblige les Etats membres à s'associer volontairement,et qui les oblige à accepter, pour être solidaires, de relativiser ou d'abandonner pour partie, leurs souverainetés nationales...
Et c'est aujourd'hui, la première des difficultés de crise : on est moins solidaire, on regarde son budget, on regarde ses intérêts et aujourd'hui le premier risque politique de l'union européenne, c'est la fragmentation, c'est le retour à la primauté des intérêts nationaux contre les intérêts de la politique de l'union...
Ce n'est pas toujours par une clarté des choix et par une politique assumée et présentée à la population et validée que l'Europe s'est dotée d'avancer. Mais elle s'est dotée d'avancer par la progressivité des questions qui se sont posées...
En ce qui concerne l'état actuel, il y a un débat de fond, ce débat a été lancé par la crise et l'insuffisance de la réponse à la crise apportée par l'Union Européenne...
On a conçu la réponse à la crise par une addition des réponses nationales, mais sans moyens supplémentaires, sans perspectives politiques, sans efforts de solidarité...
Comme l'a dit Pierre Moscovici, dans cette crise, l'Allemagne n'a pas suivi en matière d'équité de soutien et de solidarité. Aujourd'hui, un pays qui a une difficulté économique en son sein et notamment dans le remboursement de sa dette, la gestion de ses déficits publics, est davantage astreint lorsqu'il emprunte à un taux élevé...
Donc on propose des taux élevés pour permettre à la Grèce de s'en sortir, 9 points, et on propose à l'Allemagne pour pouvoir aller sur les marchés et emprunter des taux qui ne dépassent pas 3 à 3,5%...
Nous allons donc vers un décrochage dans la vision, dans la projection de ce que nous sommes en train de construire, et on peut avoir une aggravation de ce défaut de légitimité qui est déjà apparu dans le cadre des élections européennes et dans cette adverse de gouvernement politique de l'union...
Un des débat que nous avons aujourd'hui, c'est celui du dumping social. Comment une entreprise envoie ses salariés dans un autre pays... on est en train d'acter que certaines entreprises choisissent des pays dont les taxes sont moins élevées et vont avoir un jeu de rupture en quelque sorte de concurrence loyale.
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Nous sommes aujourd'hui dans une situation d'incertitude, de discussion sur le plan international, nous sommes dans un moment qui n'a pas encore trouvé sa stabilité institutionnelle et politique... C'est le moment où nous sommes dans les effets de la crise.
Pour le Parlement Européen, il y a aujourd'hui des réponses politiques à apporter...
Une qui est une réponse dans l'équilibre institutionnel et le bon fonctionnement qui permet de re- légitimer l'ensemble du processus... Nous savons que à partir du moment où nos électeurs décroissent à chaque élection, il y aura un moment où nous aurons plus de légitimité en tant que représentant des peuples...
Nous risquons d'être coincés entre les Etats membres qui défendent les intérêts de leurs propres pays parce qu'ils ont des difficultés internes, et l'attaque de nos électeurs qui disent "qu'est-ce que vous faites, vous ne nous défendez pas suffisamment"...
Il y a aujourd'hui une réponse qui a été apportée à la crise, mais cette réponse est financière et la réponse sociale n'est pas encore arrivée...
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