QPC: une première irrecevabilité devant le juge judiciaire de mauvais augure (Cass., QPC, 19 mars 2010, Commune de Tulle) et des QPC sur la loi Gayssot, l’ISF et le FNAEG

Publié le 27 mars 2010 par Combatsdh

La chambre criminelle de la Cour de cassation, s'est, pour la première fois, prononcée sur la recevabilité d'une question prioritaire de constitutionnalité à l'occasion d'un pourvoi et l'a déclarée irrecevable car elle a été posée hors délai d'instruction. En l'espèce, une QPC avait été posée le 1er mars 2010 et présenté l'avocat de la commune de Tulle, du département de la Corrèze et de la LDH, à l'occasion du pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 23 janvier 2009 par la cour d'appel de Limoges estimant l'action publique et l'action civile prescrites.

La question visait à contester la constitutionnalité, au regard du droit à un recours effectif et des droits de la défense de la limitation à trois jours la durée du délai non franc de pourvoi en cassation de l'article 59 de la loi du 29 juillet 1881 sur la presse (voir dans ce billet la QPC n°7). Dans un arrêt du 2 mars 2010, la chambre criminelle avait considéré qu'il y avait lieu d'attendre, pour statuer, la décision de la formation spécialisée (article 23-6 de l'ordonnance n°58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée) et avait donc renvoyé l'examen de l'affaire à une audience ultérieure.

Entre temps, dans une autre affaire, le 18 mars, la 2 ème chambre civile avait déjà jugé " pas nécessaire d'ordonner la réouverture des débats pour qu'il soit procédé à l'examen de cette question" (Cass. 2e civ., 18 mars 2010, MGEN, n°09-10.241, au bulletin).

Statuant sur la question prioritaire de constitutionnalité dans un second du 19 mars 2010, la formation spéciale pose le principe que " lorsque la question prioritaire de constitutionnalité est soulevée à l'occasion d'un pourvoi, le mémoire qui la présente doit être déposé dans le délai d'instruction de ce pourvoi ", mais que, toutefois, " lorsque l'instruction était close au 1er mars 2010, la chambre saisie peut, le cas échéant, (...) ordonner la réouverture de l'instruction pour les seuls besoins de l'examen de la question prioritaire de constitutionnalité, si elle l'estime nécessaire " en application de l'article 7 du décret n° 2010-148 du 16 février 2010.

Or, en l'espèce, le mémoire présentant la question a été produit hors du délai d'instruction du pourvoi - le rapport du conseiller rapporteur ayant été déposé le 31 décembre 2009 - et la Cour n'a pas estimé utile de rouvrir l'instruction. Il appartient donc à la juridiction saisie d'apprécier elle-même l'opportunité d'ordonner la réouverture de l'instruction pour les seuls besoins de l'examen de la question prioritaire de constitutionnalité

Cette décision est d'autant plus décevante que le Conseil constitutionnel avait considéré que " la loi organique sera ainsi applicable aux instances en cours à la date de son entrée en vigueur ; que, toutefois, seules les questions prioritaires de constitutionnalité présentées à compter de cette date dans un écrit ou un mémoire distinct et motivé seront recevables " (n° 2009-595 DC du 3 décembre 2009, cons. n° 37).

A noter que l'article 7 du décret est commun aux deux ordres de juridiction. Selon la doctrine " autorisée " s'il appartient " aux juridictions d'apprécier cette nécessité " de réouverture de l'instruction, elle rappelle toutefois que " la jurisprudence du Conseil d'Etat (CE 12 juill. 2002, M. et Mme Leniau, n° 236125 et CE sect. 27 févr. 2004, Préfet des Pyrénées-Orientales c/ Abounkhila, n° 252988) fait, en principe, obligation au juge administratif, lorsqu'il est saisi d'un mémoire ou d'une note en délibéré postérieurement à la clôture de l'instruction et avant la lecture de la décision, de rouvrir l'instruction notamment dans le cas où ces écritures font état d'une circonstance de droit nouvelle " (J. Arrighi de Casanova, J.-H. Stahl, L. Helmlinger, " Les dispositions relatives aux juridictions administratives du décret du 16 février 2010 sur la question prioritaire de constitutionnalité", AJDA 2010 p. 383). Or, on peut penser que l'entrée en vigueur le 1 er mars 2010 de la loi organique sur la QPC constitue une circonstance de droit nouvelle au sens de cette jurisprudence.

Cass, QPC, 19 mars 2010, Commune de Tulle (n° 09-81.027) ; Cass. crim., 2 mars 2010, n° 09-81.027 - Actualités droits-libertés du 23 mars 2010 par Serge SLAMA

Pour citer: Serge Slama, " Première irrecevabilité pour une question posée hors délai d'instruction devant le juge judiciaire ", in Lettre " Actualités Droits-Libertés " du CREDOF, 23 mars 2010.

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Les nouvelles QPC devant la Cour de cassation depuis le 15 mars

A noter des QPC sur la loi Gayssot de 1990, sur le FNAEG, sur la responsabilité pénale des personnes morales, sur les perquisitions fiscales, sur l'impôt sur la fortune

QPC 26 mars 2010 - Loi n°90-615 du 13 juillet 1990 (la loi Gayssot!!!)

Violation de l'article 34 de la Constitution pour " non détermination du délit prévu par l'article 24 bis ".
Pourvoi c/ CA Paris, 21 janvier 1990
J-09-80.774

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QPC 23 mars 2010 - Article 503-1 du code de procédure pénale Créé par Loi n°2004-204 du 9 mars 2004 - art. 123 JORF 10 mars 2004 en vigueur le 1er octobre 2004

Lorsqu'il est libre, le prévenu qui forme appel doit déclarer son adresse personnelle. Il peut toutefois lui substituer l'adresse d'un tiers chargé de recevoir les citations, rectifications et significations qui lui seront destinées s'il produit l'accord de ce dernier. Cette déclaration est faite par l'avocat du prévenu si c'est celui-ci qui forme l'appel.

A défaut d'une telle déclaration, est considérée comme adresse déclarée du prévenu celle figurant dans le jugement rendu en premier ressort.

Le prévenu ou son avocat doit signaler auprès du procureur de la République, jusqu'au jugement définitif de l'affaire, tout changement de l'adresse déclarée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.

Toute citation, notification ou signification faite à la dernière adresse déclarée est réputée faite à sa personne et le prévenu qui ne comparaît pas à l'audience sans excuse reconnue valable par la cour d'appel est jugé par arrêt contradictoire à signifier.

Si le prévenu, détenu au moment de l'appel, est remis en liberté avant l'examen de son affaire par la cour d'appel, il doit faire la déclaration d'adresse prévue par le présent article préalablement à sa mise en liberté auprès du chef de la maison d'arrêt.

" Les dispositions de l'article 503-1 du CPP portent-elles atteinte aux droits et libertés que la
Constitution garantit, précisément au principe constitutionnel du respect des droits de la défense tels qu'ils sont garantis par les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République et l'article 16 de la DDHC ?"

Pourvoi c/ CA Aix, 21 déc. 2006
Z 09-85.687

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QPC 16 mars 2010 - Article L 16 B du Livre des Procédures Fiscales dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la loi LME n° 2008-776 du 4 août 2008 (visites domiciliaires fiscales)

voir décision CEDH de 2008

"I. Lorsque l'autorité judiciaire, saisie par l'administration fiscale, estime qu'il existe des présomptions qu'un contribuable se soustrait à l'établissement ou au paiement des impôts sur le revenu ou sur les bénéfices ou de la taxe sur la valeur ajoutée en se livrant à des achats ou à des ventes sans facture, en utilisant ou en délivrant des factures ou des documents ne se rapportant pas à des opérations réelles ou en omettant sciemment de passer ou de faire passer des écritures ou en passant ou en faisant passer sciemment des écritures inexactes ou fictives dans des documents comptables dont la tenue est imposée par le code général des impôts, elle peut, dans les conditions prévues au II, autoriser les agents de l'administration des impôts, ayant au moins le grade d'inspecteur et habilités à cet effet par le directeur général des impôts, à rechercher la preuve de ces agissements, en effectuant des visites en tous lieux, même privés, où les pièces et documents s'y rapportant sont susceptibles d'être détenus et procéder à leur saisie, quel qu'en soit le support. (...)"

" Constitutionnalité, au regard des droits et libertés constitutionnels que sont la liberté individuelle, le respect de la vie privée, l'inviolabilité du domicile et les droits de la défense garantis notamment par l'article 16 de la
Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, des dispositions [indiquées ci contre], qui permettent d'opérer des visites domiciliaires et des saisies sans garantir aux personnes concernées le droit, pendant le déroulement de ces opérations, d'être assisté d'un avocat "

Pourvoi c/ ord. Premier président Versailles, 13 nov. 2009

X 09-17.283

[NB quel intérêt de contester la constitutionnalité d'une disposition déjà abrogée alors que le CC n'a que le pouvoir d'abroger et non d'annuler la disposition?)

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QPC 16 mars 2010 - Article 121-2, alinéa 1er, du code pénal (responsabilité pénale des personnes morales, sauf l'Etat)

L'article 121-2 alinéa 1 du Code pénal, qui pose le principe de la responsabilité pénale des personnes morales, est-il contraire à l'exigence de précision suffisante de la loi pénale qui résulte de l'article 8 de la DDHC de 1789 ?
Pourvoi c/ CA Bordeaux, 20 oct. 2009
N 09-87.884

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sur le QPC 15 mars 2010 - Articles 706- 54 CPP (alinéa 2 et 3), 706-56 II alinéa 1, 706-51 du même code, et article 29 de la loi n° 2003- 239 du 18 mars 2003 Fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG)

-" Les dispositions de l'article 706-54 alinéas 2 et 3 du CPP, en ce qu'elles autorisent l'OPJ, d'office, sans contrôle de l'autorité judiciaire, à décider d'un prélèvement biologique aux fins de rapprochement comme d'un prélèvement
biologique aux fins d'enregistrement au fichier FNAEG sont-elles contraires à l'article 66 de la Constitution ?
-" L'article 706-54 alinéa 3 du CPP est-il contraire aux articles 2, 9 et 16 de la DDHC de 1789, 66 de la Constitution, au principe constitutionnel de sauvegarde de la dignité de la personne humaine et au principe d'inviolabilité du corps humain en ce qu'il autorise un prélèvement biologique pour tout crime ou délit et en dehors des strictes nécessités de l'enquête en cours ? "
- " Les dispositions des articles 706-55 et 706-56 II alinéa 1 du CPP, sont-elles contraires aux articles 2, 8, 9 et 16 de la DDHC de 1789, 66 de la Constitution, au principe constitutionnel de sauvegarde de la dignité de la personne humaine et au principe d'inviolabilité du corps humain? "
- " Les dispositions de l'article 29 de la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 sont-elles contraires au principe non bis in idem et à l'article 8 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen de 1789 ? [...] "

Pourvoi c/ CA Fort de France, 28 oct. 2009
D 09-88.083

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Créé par Loi 95-95 1995-02-01 art. 52 I, II JORF 2 février 1995
Créé par Loi n°95-95 du 1 février 1995 - art. 52 (V) JORF 2 février 1995

"Les associés d'un groupement foncier rural ou d'un groupement foncier agricole peuvent, sans préjudice des droits des tiers, se retirer totalement ou partiellement de la société dans les conditions prévues par les statuts. A défaut, le retrait ne peut être autorisé que par une décision unanime des autres associés."

Droit de propriété garanti par les art. 2 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen
Pourvoi c/ CA Bordeaux, 27 janvier 2009
V 09- 65.995

QPC 22 mars 2010 Art. 885 V bis du code général des impôts sur l'ISF!!!

Modifié par LOI n°2009-1673 du 30 décembre 2009 - art. 20 (V)
Modifié par LOI n°2009-1673 du 30 décembre 2009 - art. 26

I.-1. Le redevable peut imputer sur l'impôt de solidarité sur la fortune 75 % des versements effectués au titre de souscriptions au capital initial ou aux augmentations de capital de sociétés, en numéraire ou en nature par apport de biens nécessaires à l'exercice de l'activité, à l'exception des actifs immobiliers et des valeurs mobilières, ainsi qu'au titre de souscriptions dans les mêmes conditions de titres participatifs dans des sociétés coopératives ouvrières de production définies par la loi n° 78-763 du 19 juillet 1978 ou dans d'autres sociétés coopératives régies par la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération. Cet avantage fiscal ne peut être supérieur à 50 000 euros.(...)

Art. 2, 13 et 17 de la DDHC de 1789 (méconnaissance du principe d'égalité devant les charges
publiques par la limitation de la participation de certains contribuables et par la définition des capacités contributives par rapport aux seuls revenus, atteinte au droit de propriété par l'incompétence négative du législateur dans la fixation des règles d'imposition à l'ISF, et par le caractère confiscatoire de l'ISF)

Pourvoi c/ CA Montpellier, 17 mars 2009
P09- 67.047

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Lorsque le locataire ayant demandé à bénéficier de ses droits à la retraite ou ayant été admis au bénéfice d'une pension d'invalidité attribuée par le régime d'assurance invalidité-décès des professions artisanales ou des professions industrielles et commerciales, a signifié à son propriétaire et aux créanciers inscrits sur le fonds de commerce son intention de céder son bail en précisant la nature des activités dont l'exercice est envisagé ainsi que le prix proposé, le bailleur a, dans un délai de deux mois, une priorité de rachat aux conditions fixées dans la signification. A défaut d'usage de ce droit par le bailleur, son accord est réputé acquis si, dans le même délai de deux mois, il n'a pas saisi le tribunal de grande instance.

La nature des activités dont l'exercice est envisagé doit être compatible avec la destination, les caractères et la situation de l'immeuble.

Les dispositions du présent article sont applicables à l'associé unique d'une entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, ou au gérant majoritaire depuis au moins deux ans d'une société à responsabilité limitée, lorsque celle-ci est titulaire du bail.

Atteinte au droit au maintien de l'économie des conventions légalement conclues, découlant des articles 4 et 16 de la DDHC.
Pourvoi c/ CA Aix, 13 août 2009
N 09-71.209