Tel n’est pas le cas de cette mise en scène des Femmes savantes par Christophe Lesage avec la Compagnie La Trappe. Un décor sobre, sur deux niveaux (peut-être pour symboliser les choses de l’esprit et celles du corps), un espace, à cour, pour les parents (bureau de Madame, en haut ; table où poser quelques verres et le vin pour Monsieur, en bas) et un autre espace, à jardin, pour Armande, la fille aînée, espace où elle peut se réfugier derrière des stores vénitiens en bois clair, et, de part et d’autre du plateau, des bibliothèques noires.
Et le spectacle commence par la dernière réplique, qui s’impose comme une évidence alors que rien n’est moins évident dans la progression de la pièce. C’est insister sur les relations homme – femme, et se moquer d’entrée de jeu des prétentions de l’un à être le maître, de l’autre à gouverner les esprits comme les gens.
Et, très vite, on rit. On rit d’Armande, jalouse de sa sœur, on rit de Bélise, la tante d’Armande et d’Henriette, qui se croit courtisée par tous les hommes, on rit de Chrysale tellement faible dès qu’apparaît sa femme, on rit de Trissotin et de Vadius, deux pédants qui sont ici moins ridicules que manipulateurs. On rit avec Henriette, la fille cadette, dont les répliques sont frappées au coin du bon sens.
Mais on ne fait pas que rire. On entend le vers de Molière, tourné avec talent et troussé habilement, railler l’imbécile, quand bien même il aurait une once de pouvoir sur ses proches, et appuyer le simple, si son jugement est droit. Et la critique, dans cette pièce, attaque moins les femmes que la pseudo – philosophie dispensée par deux sots courtisans. On apprécie aussi beaucoup les costumes, les coiffures, et la diction, par quoi les comédiens soulignent l’actualité du texte qu’ils jouent.
La Compagnie La Trappe (metteur en scène, costumes, acteurs) fait un travail remarquable, qu’il s’agisse de Molière aujourd’hui (comme il y a quelques années quand elle présentait un fameux Georges Dandin), ou d’auteurs contemporains (je me souviens de la mise en scène intelligente et limpide de L’émission de télévision, de Michel Vinaver).
Ici encore, elle nous rappelle que le théâtre, c’est un texte porté par des voix, des corps, et des images produites dans le cadre d’une scène. Ainsi, après nous avoir fait rire et réfléchir en riant des travers de l’être humain, Christophe Lesage termine le spectacle sur l’image d’Armande, digne, mais sacrifiée, pleurant discrètement devant ses stores, alors que toute la maison se réjouit de ce qui peut paraître une heureuse fin.
Cette représentation a eu lieu au cours des Rencontres de théâtre amateur de la MJC - CS de Chilly-Mazarin (91)
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