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La madone d'Excelsior de Zakes Mda

Par Sylvie

AFRIQUE DU SUD
La madone d'Excelsior
Editions du Seuil, 2004
De Zaker Mda, je vous avais déjà présenté il y a quelques années, Le pleureur, un véritable coup de coeur : une histoire d'amour entre un pleureur professionnel et son amie d'enfance, une femme qui vient de perdre son enfant assassiné, dans les années les plus sombres de l'apartheid.

Dans ce roman, on retrouve le même mélange de poésie et d'analyse politico-sociale : sur trente ans, nous suivons le quotidien d'un village d'Afrique du Sud, Excelsior. L'auteur s'inspire d'un fait divers réel : le procès de 19 femmes noires ayant couché avec des notables blancs au cours de nuits orgiaques.

Au nom de la loi sur l'immoralité condamnant les relations sexuelles entre blances et noirs, le scandale naît. Des enfants métis naissent de ce péché.

Nous suivons l'itinéraire de deux familles : les noirs, Nikki, la femme violée puis ensuite consentante. De ses amours illicites, nait une jolie métisse, Popi, aux yeux bleus et aux cheveux raides. Elle esseyera bien de la faire brunir au dessus du feu quitte à la brûler mais en vain...Les blancs, dont le demi-frère de Popi, ultraconservateur, qui voue une haine féroce aux Afrikaans qui pactisent avec les noirs...
Puis c'est la fin de l'apartheid. Le conseil municipal est ouvert aux noirs...
Le grand mérite de Zakes Mda est d'analyser cette période de transition d'un regard très critique : une population noire qui fait l'apprentissage du pouvoir, qui se grise et se coupe de l'autre partie de la population noire. Des blancs divisés entre les ultraconservateurs et les ralliés à la cause de la Nation Arc-en-Ciel.
Loin du monde politique, les personnages principaux se complaisent dans la contemplation du monde, dans la nature et dans le monde de l'art...
Chaque chapitre débute par la description d'un tableau d'un certain peintre, La Trinité, qui peint les madones dans les champs de tournesols et de cosmos. Des silhouettes déformées dans un océan de couleurs : sol jaune, soleil rouge, visages rouges et verts...Une ode aux femmes salies, outragées et surtout une multitude de couleurs, sans doute symbole de la "Nation Arc-en-Ciel" voulue par Mandela.
Alors que le frère de Popi quitte la politique pour aller jouer de la flûte sur les routes alors que Nikki et Popi se réfugient dans un champ de ruches...
L'amertume post-apartheid est sublimée par la poésie de l'écriture. L'éclosion d'une femme qui acceptera de noyer sa vengeance et acceptera au bout du compte son métissage.
Une très belle oeuvre.


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