Entretien avec Fabien Larchez, créateur de Meilleur Ami Paris

Publié le 25 mars 2010 par Littlestylebox
J'ai découvert Meilleur Ami lors de mes passages réguliers à la librairie Ofr. Ses sacs et ses écharpes sont les seuls accessoires proposés par cette boutique à l'avant garde de la mode. Pas étonnant, ils sont simples et beaux, dans des matières souples et naturelles impossibles à résister. Très larges et fonctionnels, ils s'avèrent pratique pour tout fourrer et se portent tant à la main, qu'à l'épaule ou en travers du corps. Idéal pour ceux qui courent du matin au soir...
En préparation de mon vernissage du 30 mars, j'ai eu l'idée folle de contacter son créateur pour voir si il pouvait nous offrir un sac pour un concours de look. Il a tout de suite été emballé par l'idée !
Alors, en attendant de vous montrer le sac en vrai, je voulais vous présenter Fabien Larchez, créateur de la Meilleur Ami Paris.


Peux-tu présenter ton parcours ?
J'ai une vingtaine d'années d’expériences dans la mode à des postes différents. J'ai commencé comme attaché de presse puis je suis devenu directeur de la communication. J'ai notamment travaillé avec Alber Elbaz lorsqu'il est arrivé chez Guy Laroche. Ensuite, j'ai travaillé comme merchandising amont dans les grands magasins parisiens. J'ai d'abord travaillé sur les marques propres puis au développement de nouveaux concepts de vente en liaison avec les acheteurs, les commerciaux, les architectes… Je me suis notamment occupé du Lafayette VO puis du BHV Homme. C’est en travaillant sur ce projet que je me suis dit qu'il y avait vraiment quelque chose à faire sur l’homme, en réfléchissant à la manière dont il aborde la mode, le style, le look, la manière dont il va consommer…
D’où ton idée de créer des sacs pour homme…
J’ai toujours utilisé beaucoup de sacs. Lorsque j’étais étudiant en Art appliqué puis en design, il me fallait des grands sacs pour contenir toutes mes affaires. J’ai un peu tout fait : la recherche de vintage, les déstockages de l'armée, quelques pièces chez la femme, et même certains sacs bricolés… Un jour, j'ai fait réaliser un prototype qui symbolisait mon sac idéal. C'est comme ça que cela a commencé, en liant l'envie de lancer quelque chose pour les hommes et de le rattacher au sac qui est l'accessoire qui me touche le plus.
Tu définis Meilleur Ami comme une maison d’édition, qu’est ce que tu veux dire par là ?
J’ai toujours voulu créer quelque chose de plus général : une maison qui puisse non seulement servir à éditer mes propres créations mais aussi grâce à son savoir faire à travailler pour d’autres créateurs. Aussi, je dis souvent que Meilleur Ami est plus une maison d'édition qu'une marque.

Quelle est l’ADN de Meilleur Ami ?
Le but de Meilleur Ami, c'est d’éditer des accessoires/objets pratiques, faciles, jolis, et qui bénéficient d’un savoir faire un peu particulier. Quand tu vois le sac ou l'écharpe, c'est quelque chose qui coule de soi, qui n'est pas prise de tête, pas du tout m'as tu vu.
Il y a un côté très utilitaire dans tes créations…
Oui, il y a un peu de ça. L'homme a une démarche très pragmatique lorsqu’il s’achète un sac. Il faut qu’il soit suffisamment grand pour mettre ses affaires, qu’il puisse l’utiliser facilement dans les transports, en vélo, dans la vie de tous les jours… Mais je fais attention à garder une part de féminité dans l'utilisation de matières assez précieuses, ou de cuirs que je détourne un petit peu de leur utilisation d’origine.
Quels sont les produits que tu édites ?
J'ai un sac qui s'appelle le Meilleur Ami N°1 que je décline à chaque édition (je travaille en terme d'éditions plutôt qu'en saison). A partir de cet été, je sors plus de bimatières avec une toile un peu militaire ou des effets bicolores. J'ai travaillé aussi sur de la chèvre un peu brillante. J’utilise toujours des cuirs soit complètement végétaux, soit semi végétaux ce qui donne au sac une vraie patine. De l'autre côté, en accessoires, il y a l'écharpe, que j’appelle la 080 de par son portée comme un snood (tu fais un 0, un 8 puis un 0). Le snood vient à l’origine de Scandinavie. Je le travaille en différentes matières, soie, coton, lainage, cachemire... et en toutes petites quantités, de 3 à 12 pièces.
Quel est le prix des sacs ?
Les sacs sont entre 400 et 450€ euros. Il n'y a pas de grosse différence de prix entre la toile et le cuir car il y a beaucoup de savoir faire.
Pour les sacs aussi tu travailles en quantités limitées…
Je fais toujours des très petites quantités pour avoir ce côté un peu exclusif. En moyenne, il y a 150 exemplaires par sac, mais tu trouveras des plus petites quantités sur certaines éditions.

Tu n’as pas de problèmes pour faire produire d’aussi petites quantités en France ?
C'est compliqué, mais cela l'est devenu un peu moins avec la crise, car les fabricants ont été obligés d’accepter de travailler sur de plus petites quantités. Il y a beaucoup de refus, mais j’ai trouvé un fournisseur passionné qui aime le produit. Depuis, je n’ai plus de problème. Sur le tissu, c'est plus industriel donc les minimums sont plus hauts. Mais j'ai réussi à les convaincre de faire de toutes petites quantités. Le fait de travailler au cœur de leur savoir faire les a vraiment intéressés.
Est-ce que le Made in France est un argument de vente ?
Oui et non… Cela l'est de plus en plus, mais le Made In ne suffit pas, il doit y avoir une justification derrière. Avant de voir le drapeau à l’intérieur ou le Fabriqué en France sur le côté, les clients regardent le sac pour ce qu’il est, pour son look et sa qualité. Personne ne m'achète de sac en me disant que c'est fabriqué en France. Mais aujourd'hui, dès que les clients le découvrent, il y a un petit up, cela permet de justifier un peu plus le prix, mais cela ne fait pas 100% de la vente.
Le contraire est par contre rédhibitoire, tu ne peux pas faire du Made in China à ce prix. Les hommes me disent qu'ils veulent savoir d'où ça vient.
Tu prototypes les sacs toi-même ?
Je travaille avec les volumes, comme pour un vêtement. Mais après il y a beaucoup de détails techniques que je mets au point avec les fabricants. C'est tout l'intérêt de travailler en France : en 3 heures, je peux aller les visiter.
Est-ce que tu vas sortir un nouveau modèle ?
Oui bien sûr, je travaille sur quelque chose de beaucoup plus différent. L'idée est vraiment de travailler par modèle et non pas par gamme avec un petit, un grand... Ce sera le Meilleur Ami N°2 mais il est encore trop tôt pour t’en dire plus.
Où es tu distribué ?
Sur la saison d'été, je dois avoir entre 15 et 20 points de vente. Je marche bien aux Etats-Unis, je suis chez Bergdorf Goodman, je vais rentrer chez Steven Alan. Je suis chez Lane Crawford à Hong Kong. En France, je suis chez Ofr et je vais rentrer temporairement au Bon Marché pour l’Esprit Factory puis pour l’hiver avec des écharpes. Et puis tu me trouveras aussi à Copenhague, Genève, Tel Aviv, Los Angeles, Tokyo, en Corée, en Grèce... Je me dis que dans un premier temps c'est pas mal…

Et pour l’avenir ?
Je veux développer une boutique en ligne et aussi travailler sur des concepts de pop-up store, ce qui rejoint mon ancien coeur de métier. Pour Meilleur Ami, c'est vraiment ce que je vois de mieux...
Quelle est ta clientèle ?
J’ai vraiment 2 clients : les hommes bien sûr qui voient très rapidement ce qu’ils vont pouvoir en faire, et les femmes qui craquent aussi, même si elles le trouvent parfois trop grand. Ceux qui l'ont adopté, même les femmes me disent qu’il est super pratique, tu peux le porter à la main, sur l'épaule, à vélo... J’ai même des femmes qui m’ont dit avoir jeté tous leurs autres sacs.
Sinon, j’ai vraiment des adeptes, Christian Lacroix m'en a pris 3 ou 4.
Est-ce que les sacs pour homme sont une tendance de fond ?
Il y a 2 ans, je t'aurais dis oui oui oui, mais là, cela s'essouffle un peu. C'est parti un peu trop vite et dans tous les sens. Pour un homme urbain, c'est nécessaire... La plupart vont utiliser le Manhattan Portage ou un Eastpack. Mais c’est dommage de se limiter à ça. Maintenant pour homme, tu vas trouver un grand déballage de produits moyens dans les rez de chaussée des grands magasins. Il y a donc toujours de la place pour des créateurs, à condition que les hommes franchissent le pas.
Est-ce que tu gagnes de l’argent ?
Non, ce ne sera pas pour cette année, j'espère l'année prochaine... Cela se dessine pas trop mal et plus rapidement que ce que je pensais.
Merci Fabien !!