Ne le comparez pas à Johnny Depp. Si l’acteur s’affiche depuis aujourd’hui sur nos écrans de cinéma, lui c’est sur scène qu’il donne vie au personnage de Lewis Carroll. Avec 613, son premier album, Louis Warynski jongle avec les instruments pour nous entraîner dans un monde aussi facétieux que celui dont il a emprunté le nom : le Chapelier Fou.
Sur scène comme sur son disque, l’homme s’improvise orchestre. A l’aide de boucles, il empile les nappes sonores les unes sur les autres, modifiant les ambiances au grès de ses envies et des instruments qu’il utilise. Un exemple ici, avec Darling, Darling, Darling…, issu de son premier EP :
Certes, Chapelier Fou a ses influences. Mais loin de les nier, il les revendique. Sur Secret Handshake comme sur Elle est l’eau qui fait le torrent, cordes et xylophone, au rythme saccadé de machine à écrire, poussent assez loin la ressemblance avec Yann Tiersen. Ce n’est sans doute pas un hasard si les deux artistes se retrouvent sur le même label, “Ici d’ailleurs”. Et sur Les métamorphoses du vide, c’est le violon de Louise Attaque qui semble avoir rencontré les bulles rythmiques d’Emilie Simon.
Si Chapelier Fou excelle au violon, la musique électronique n’est pas en reste et lui permet de sauter d’une atmosphère à l’autre avec une étonnante facilité. On en veut pour exemple le titre introductif, G tintinnabulum, dont le bouziki hypnotique cède finalement la place à une guitare paroxystique que n’aurait pas reniée John Murphy. Le tout accompagné d’une rythmique nerveuse façon Aphex Twin.
Mais ce qui frappe dans la musique de Chapelier Fou n’est pas tant ses références maîtrisées que la manière dont il les restitue. Seul aux commandes, il démontre sans fard que la musique acoustique et les sonorités électroniques peuvent tout à fait s’entendre. L’un des exemples les plus emblématiques reste le voyage initiatique de Luggage. Tout commence avec une série de codes pincées sur lesquelles vient s’ajouter un chœur de violons. Déjà, en embuscade, on peut entendre quelques touches synthétiques. En fin de parcours, et sans que l’on s’en rendre compte, il ne restera plus qu’eux : ces quelques bips de Nintendo.
Comme son nom l’indique (un nombre premier), ce premier opus s’écoute d’une traite et en entier. S’il pêche parfois par son côté un peu répétitif – un travers évident lorsque l’on joue seul avec des boucles – 613 reste un album au ton résolument personnel et envoûtant. Ce qui n’est pas sans rappeler les débuts bricoleurs d’un certain General Elektriks et son Cliquety Kliqk…
Chapelier Fou - 613
Sortie le 15 mars 2010
La tracklist
01. G tintinnabulum
02. Les métamorphoses du vide
03. Luggage
04. Hémisphère ouest
05. Half of the time
06. Secret handshake
07. Inside of you
08. Elle est l’eau qui fait le torrent
09. Grahamophone
10. Le quart de ton
11. Les prières à complies
12. Entendre la forêt qui pousse