Nous avons vécu depuis 2007, une intense période de brouillage politique. L’hypertrophie de son ego présidentiel a conduit Nicolas Sarkozy à vouloir faire croire qu’il pourrait incarner l’ensemble de l’échiquier politique à lui tout seul. Par sa politique de débauchages individuels dite « d’ouverture » et par sa conversion affichée à l’écologie, le président de la République a voulu étouffer toute opposition. La fusion de toutes les forces politiques de droite dans un seul parti tout voué à la personne du président a constitué le prolongement organisationnel de ce projet hégémonique.
Le Modem, qui a été le seul à résister à cette absorption, a fortement contribué lui aussi à brouiller le paysage politique, renvoyant droite et gauche au passé, laissant croire au mythe habituel qu’en prenant ce qu’il y a de mieux de chaque côté on pourrait construire une bonne politique. A aucun moment on n’a vu de concrétisation d’un projet politique cohérent, mais le talent de François Bayrou dans son opposition à Nicolas Sarkozy, ou plutôt au style de Nicolas Sarkozy et à sa pratique du pouvoir plus qu’à sa politique réelle, ont longtemps occupé le devant de la scène médiatique.
Pour le Parti Socialiste, cette période a été destructrice. En plaçant la question de l’alliance avec le Modem au premier rang des préoccupations, en voyant partir quelques personnalités en manque de rétributions symboliques, le PS a été déstabilisé.
Les élections régionales ont marqué une clarification importante et salutaire.
D’abord, en montrant que la politique dite d’ouverture est une illusion politique, qui a pour victime son principal instigateur, Nicolas Sarkozy. L’électorat de droite veut une politique de droite mise en place par des gens de droite, et c’est normal.
Ensuite, en montrant que la conversion idéologique de la droite à l’écologie n’était qu’une façade, à laquelle elle vient de tourner le dos. Pour ceux qui pensaient encore que l’écologie n’est ni de droite ni de gauche, la réponse est claire : les écologistes s’allient avec la gauche parce que c’est de ce côté-là de l’échiquier politique que leurs préoccupations environnementales peuvent trouver un débouché dans un projet politique progressiste, pendant que la droite est fidèle à sa tradition conservatrice.
Enfin, en réduisant le Modem à néant, ou presque, montrant par là-même que la construction d’une stratégie politique ne peut se faire sur des préoccupations passagères.
Quant à l’UMP, elle est passée du rang de parti rassemblant l’ensemble de la droite, dans une perspective de bipolarisation, à celui d’un parti de droite comme feu le RPR. Les élections régionales ont montré qu’il vaut mieux une offre riche (mais pas trop dispersée quand même) conduisant à un rassemblement, qu’une uniformisation idéologique où la diversité ne trouve pas son compte.
Evidemment, il reste le poids important des abstentionnistes, particulièrement nombreux chez les jeunes et les catégories populaires. Nous avons désormais à leur prouver que nous pouvons dessiner un projet politique qui réponde enfin à leurs difficultés. C’est ce à quoi nous devons nous atteler maintenant, mais reconnaissons que cela sera moins compliqué que dans la période brouillée d’où nous sortons.