La candidature d’une femme voilée aux élections régionales ne porte pas atteinte aux libertés fondamentales (CE, 1er mars 2010, Association A.W.S.A. France et M. Berthier)

Publié le 24 mars 2010 par Combatsdh

Dans une ordonnance, le Conseil d’Etat rejette le recours contre la candidature sur une liste aux élections régionales d’une candidate voilée en estimant que la décision du préfet de délivrer un récépissé définitif à la liste n’a pas porté une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale.

En l’espèce, une association avait saisi le juge des référés du TA de Marseille d’un référé-liberté contre la décision par laquelle le préfet avait donné récépissé définitif à la liste présentée par le Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA) en vue des élections régionales des 14 et 21 mars 2010 dans la région Provence Alpes-Côte d’Azur et sur laquelle est candidate une femme portant le voile islamique. Par ordonnance du 23 février 2010, le juge des référés avait rejeté la requête en soulignant notamment qu’il ne pouvait prononcer l’annulation d’une décision administrative, ni ordonner une mesure ayant un effet équivalent et que la suspension n’était pas justifiée en l’absence d’atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale.

En appel, le juge des référés du Conseil d’Etat confirme cette décision en relevant :

- d’une part, qu’il résulte que le juge des référés, lorsqu’il constate une atteinte grave et manifestement illégale portée à une liberté fondamentale, ne peut prendre que des mesures qui sont de nature à faire disparaître les effets de cette atteinte qui doivent en principe présenter un caractère provisoire, sauf lorsque aucune mesure de cette nature n’est susceptible de sauvegarder l’exercice effectif de la liberté fondamentale à laquelle il est porté atteinte. Etant précisé que « ce caractère provisoire s’apprécie au regard de l’objet et des effets des mesures en cause, en particulier de leur caractère réversible » ;

- d’autre part, il résulte des articles L. 346 et s. du code électoral que les décisions concernant l’enregistrement des déclarations de candidatures constituent des décisions préliminaires aux opérations électorales et ne peuvent être contestées que devant le juge de l’élection. Les conclusions en annulation devant le juge des référés sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative ne pouvaient donc être accueillies.

- enfin, et surtout, la candidate inscrite sur la liste présentée par le parti NPA satisfaisait aux conditions prévues par le code électoral pour se présenter aux Régionales et que le juge des référés a examiné les libertés fondamentales dont les requérants se prévalaient (en particulier le principe de laïcité et de neutralité de l’Etat), « a pris en compte les libertés fondamentales dont cette candidate était en droit de bénéficier » (liberté de conscience) et estimé « à bon droit que, même [si] cette candidate porte un voile islamique, la décision du préfet de délivrer un récépissé définitif à la liste présentée par le parti NPA n’avait pas porté une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale ».

AFP/GERARD JULIEN

CE, 1er mars 2010, Association A.W.S.A. FRANCE (ARAB WOMEN’S SOLIDARITY ASSOCIATION- FRANCE) France et M. Berthier (n° 337079)

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