Le livre de Benoît Rittaud , paru aux Editions du Seuil ici , se distingue des
autres livres que j'ai pu lire sur le climat. En effet son approche est celle d'un mathématicien, maître de conférences à l'Université Paris XIII, qui étudie la question
sous l'angle des mathématiques et de l'épistémologie.
Benoît Rittaud ne cache pas que, de son point de vue, "la science actuelle ne permet pas d'affirmer l'origine humaine du réchauffement climatique observé au cours
d'une partie du XXe siècle".
Les climatologues font appel aux mathématiques pour étudier les données qu'ils recueillent et leur donner un sens. En se plaçant sur ce terrain qu'il connaît bien Benoît Rittaud montre qu'il n'est
pas possible d'en faire usage n'importe comment, au risque de se tromper ou, pire, de laisser libre cours à l'imagination.
Le livre commence par un prologue. A une autre époque, qui n'est pas si lointaine que cela, des scientifiques éminents se sont fourvoyés. Sans déflorer le sujet les erreurs commises alors sont
analogues à celles que les climatologues commettent de nos jours sur des points cruciaux. Ce prologue n'est cependant pas destiné à donner une leçon à quiconque, mais à donner au lecteur
l'envie de réfléchir. Comparaison n'est pas raison, disait-on d'ailleurs, sagement, jadis.
Depuis une vingtaine d'années le discours dominant, auquel les médias offraient jusqu'à présent un large écho, a été de dire qu'il y avait consensus scientifique sur l'origine
humaine du réchauffement climatique à la fin du XXe siècle. Le GIEC devait être créé en 1988 pour soutenir cette thèse, que Benoît Rittaud appelle
carbocentrisme, et donner consistance à ce consensus. Ceux qui étaient sceptiques étaient rejetés dans l'ombre et condamnés quasiment au silence.
Benoît Rittaud passe en revue cette armée de l'ombre, ignorée des médias, composée de corps d'armée de climatologues, de solaristes, d'océanistes, de géologues, de
physiciens, auxquels il faut ajouter de nombreux bataillons de scientifiques spécialisés dans l'environnement, la météorologie ou la prévision, sans qu'il ne faille oublier des francs-tireurs
tels que Steve McIntyre ou Anthony Watts. Vous avez dit consensus ?
La courbe en crosse de Hockey due à Michael Mann ne résiste pas à l'examen de Benoît Rittaud. C'est elle pourtant qui avait donné une justification
à l'alarmisme climatique puisqu'elle dessinait un réchauffement brutal de la planète tout au long du XXe siècle et minimisait l'optimum médiéval et le
petit âge glaciaire.
Les travaux de McIntyre et de McKitrick, puis le rapport Wegman, ont montré que l'analyse en composantes principales "partiellement centrée", utilisée par Michael Mann, conduisait toujours à une courbe en crosse de hockey du fait que cette méthode a pour "effet de séparer artificiellement les périodes récentes des plus anciennes". Ces conclusions de nos francs-tireurs ont reçu le renfort de Jolliffe, le
spécialiste cité par Mann à l'appui de sa cause...
L'auteur rappelle qu'il est bien difficile d'établir une température globale et son évolution dans le temps. La corrélation entre la température et la teneur en CO2 est cependant avérée
depuis quelque temps. Mais que la courbe de la température précède celle de la teneur en CO2 n'a été révélé qu'il y a 20 ans par l'analyse d'une carotte de glace extraite à
Vostok.
L'interprétation du décalage des courbes qui vient à l'esprit de quiconque est qu'il y a lien de cause à effet. Toute autre interprétation s'avère pour le moins alambiquée, même si Benoît
Rittaud tente l'exercice de cette mission impossible. En annexe à ce chapitre sur les températures, il propose d'utiliser l'inégalité de Koksma pour tenter de "minimiser l'erreur commise dans l'évaluation de la température globale".
Un chapitre des plus passionnants est celui que Benoît Rittaud consacre aux probabilités. Il y vulgarise notamment la démonstration, relative au pari de Pascal, publiée en 1947 par
le grand mathématicien Emile Borel, qui "bannit à jamais le raisonnement pascalien de tout argumentaire fondé sur la raison". Or le pari
des alarmistes du climat s'y apparente. Leur but est en effet de "démontrer l'urgence de la réduction de nos émissions de gaz à effet de serre" si nous ne
voulons pas subir des malheurs "pour ainsi dire infinis".
Le chapitre consacré par l'auteur à la prévision climatique n'est pas moins passionnant. Il remarque à propos des modèles informatiques :
"Dès que le travail devient un tant soit peu conséquent, les erreurs sont inévitables. Or la plus redoutable est moins l'erreur qui empêche le programme de fonctionner
que celle qui, tapie dans l'ombre, laisse croire que le programme est correct".
Il ajoute :
"Des critères de qualité existent pour limiter les risques d'erreur : rapports de validation, tests, contrôles indépendants...Des normes industrielles ont été mises au
point, d'autant plus strictes qu'une erreur peut coûter très cher. Or, il ne semble pas que les modèles climatiques aient été soumis à un contrôle selon ces normes. En conséquence il convient de
les considérer d'abord comme des outils de recherche, certainement du plus grand intérêt pour faire progresser la climatologie, mais non comme des mécaniques dont on pourrait suivre en confiance
les prévisions."
Benoît Rittaud, à bon droit, est attaché au sens des mots. C'est ainsi que, dans ce chapitre, il distingue bon sens et esprit critique,
puis, dans le chapitre suivant, science fausse et pseudo-science.
Dans ce dernier cas, si les distinctions ne sont pas toujours faciles à faire, elles sont pourtant nécessaires. La science fausse serait une science erronée, tandis qu'une
pseudo-science aurait les couleurs de la science, mais serait une fausse science.
Pour Benoît Rittaud le carbocentrisme serait une science fausse et la climatomancie une fausse science. Climatomancie ? Il en donne la définition suivante :
"Art divinatoire visant à déduire du comportement humain l'avenir climatique de la Terre, dans l'idée de prescrire à chacun des actions de pénitence."
Le critère de Karl Popper permet de déterminer si une théorie est scientifique, ce qui ne présume pas de sa véracité : elle doit être "réfutable". Benoît Rittaud souligne ainsi que le vocabulaire employé peut être jugé à l'aune de ce critère :
"Les termes de "réchauffement" et de "dérèglement" illustrent très bien la différence entre carbocentrisme et climatomancie."
L'auteur va plus loin pour tenter de distinguer l'un de l'autre. Laissons à l'internaute intéressé le soin de le découvrir par lui-même en lisant ce livre qui sort de l'ordinaire et qui
apporte sa contribution, dans un style à la portée de tous, aux interrogations que nous pouvons tous avoir sur le climat.
La prudence dont fait preuve son auteur, son ton serein, exempt de polémique, les différentes pistes qu'il suggère d'explorer, sont des gages de sa qualité d'esprit ...
scientifique.
Je terminerai par une dernière citation, celle du théorème épistémologique suivant proposé par l'auteur :
"L'énoncé "je ne sais pas", lorsqu'il est dit de façon honnête, est toujours scientifique".
Il y a effectivement énormément de choses relatives au climat que nous ne connaissons pas. Il n'y a rien de honteux à reconnaître qu'en l'état actuel des connaissances nous ne savons pas grand
chose de manière certaine dans ce vaste et complexe domaine. Ce n'est pas pour autant une incitation à baisser les bras, mais une exhortation à rechercher.
Francis Richard
PS
Le blog de Benoît Rittaud ici porte le nom de ce livre. Il héberge provisoirement Skyfal [voir mon article
Le retour proche de Frédéric et de Skyfal, une histoire qui finit
bien ].
Benoît Rittaud a participé le 26 février 2010 à l'émission Arrêt sur Images. Extrait :
Les climato-sceptiques ont-ils gagné?
envoyé par asi. - L'info internationale vidéo.
Nous en sommes au
612e jour de privation de liberté pour Max Göldi, le
dernier otage suisse en Libye