Ces scandales sont révélés, car une certaine conscience des victimes a pu émerger. La victime, n’est plus coupable, n’est plus si honteuse et on sait maintenant que pour guérir de ces traumatismes infamants et humiliants, une des voies de la résilience est la parole, la bataille pour la vérité et la condamnation des coupables. Mais l’explication benoîte (!!) de certains catholiques qui se pensent progressistes est fort naïve…il faudrait arrêter le célibat des prêtres ! Sous –entendu, avec une bobonne et des devoirs conjugaux, leurs pulsions évacuées, ils ne seraient plus obligés d’être pédophiles !
Conception horriblement hygiéniste de la sexualité, phallocratique et méprisante pour les femmes (purges à curés) et d’une naïveté confondante, qui en dit long…un enfant serait une femme de substitution. Pour ma part, je pense qu’il vaudrait mieux proposer des chiens ou des biques.
Mais revenant aux fondamentaux, nous comprendrons peut être mieux le rapport réellement pervers qui existe entre la religion catholique, ses représentants et le monde de l’enfance. Il n’est qu’à voir l’affiche de la « liste chrétienne » aux régionales d’Ile de France, pour voir l’importance accordée à l’univers de l’enfance par certains chrétiens. L’enfance serait le domaine de l’innocence et de la pureté.
Si le Dieu des chrétiens a accepté de devenir humain en passant par tous les stades, y compris celui de l’enfance…c’est précisément pour habiter ce corps innocent. Si c’est à l’âge de l’adulte (de la tradition romaine : 30 ans à peu près) qu’il est sacrifié, comme agneau pascal, c’est qu’il est impossible de devenir adulte (mûr) en restant pur !
L’adulte masculin, l’homme mûr est plus susceptible d’être souillé, taraudé par ses sens. Chez un peuple de bergers, l’adulte mâle est le bouc, le bélier. Le Bouc est le modèle des silènes et des satyres, de Pan et par extension du diable (pieds sabots, cornes, odeur, lubricité…). L’univers féminin est entièrement cantonné à la procréation. Femme génisse, brebis. La sexualité et le désir, sont impurs mais légitimes chez les hommes-boucs, mais contre-natures et diaboliques chez les femmes, sorcières et hystériques.
La « Madeleine » est pardonnée par Jésus, car elle est objet de désir – et donc nécessaire aux appétits des mâles en rut- qui n’ont donc pas le droit de lui lancer d’hypocrites pierres, mais elle ne doit pas être désirante. La pauvre Madeleine, quand elle s’approche de Jésus ressuscité est rembarrée par un « Noli me tangere », le plus célèbre râteau de l’histoire…..elle n’aura plus, une fois son amour emporté, qu’à se terrer, vêtue de ses seuls longs cheveux dans un ermitage secret, mortifiant sa frustration et attendant la mort comme épousaille. Je ne ferai donc pas ici la liste hallucinante des exemples criants de la misogynie des monothéismes, depuis la bible jusqu’aux lapidations contemporaines.
Le catholicisme a tout de même érigé la virginité au rang de sainteté et de valeur suprême, jusqu’au paradoxe de la vierge mère. Cette construction fut longue et est le fruit de nombreux conciles. Paul de Tarse, qui dans sa transe cataleptique de trois jours se voit converti ( remarquablement démonté par Onfray dans un rapport clinique) se révèle être manifestement un être à la sexualité totalement refoulée jusqu’à la souffrance et à la somatisation. La construction misogyne qui s’ensuit poursuit la tradition biblique, en la théorisant. Je ne vais pas développer, mais les fantasmes et tentations sont parfois explicites et la haine et la fascination vont de pair ; l’adoration extatique de certains mystiques comme Bernard (pourfendeur d’hérétiques par ailleurs) va jusqu’aux délires, celui-ci se pensant dans ses prières intenses, arrosé par le lait de la « sainte vierge » ( Mamie Nova) .
Ainsi ces femmes, une fois leur besogne de procréation effectuée et l’allaitement fini, pourraient se révéler de dangereuses hétaïres, et laisser suinter leur sensualité impure. La pureté des enfants est en ce cas menacée. Menacée par la femme adulte, toute puissante, castratrice et incestueuse, figure indomptable, dont la seule divinité de référence est une incongruité absolue : la mère vierge ainsi, les enfants doivent être soustraits. Ils doivent être soustraits aux adultes mâles–boucs. Seul le prêtre est l’être adulte, mûr, en mesure d’établir une véritable relation saine avec l’enfant pur.
L’éducation, la formation et le formatage des enfants fut donc un enjeu immédiat et crucial des catholiques, dans le monde entier : frères des écoles chrétiennes, jésuites, scouts, camps, aumôneries, séminaires, retraites. Cette éducation faite par les prêtres repose sur des présupposés solides qui sont relatifs à la négation d’une sexualité harmonieuse possible, entre les adultes. Il s’agit de soustraire au maximum les enfants de l’influence des adultes non religieux, quels que soient les prétextes : savoir, loisirs, formation, etc….La formation des enfants est longue et les mets en permanence sous la houlette des curés ; baptême, première communion, confirmation, communion solennelle…..pratiques justifiant une intrusion constante, par le biais de la confession dans l’intimité des enfants, leur éveil à la sexualité , les plaisirs solitaires ou les découvertes homosexuelles. Ce contrôle des corps est à la fois détestation et fascination de personnes adultes qui pensent être en mesure de se soustraire à une sexualité adulte, conçue comme un mal nécessaire et un tribut à payer à la nature animale de l’humain, à sa part maudite.
Cette détestation du corps et de ses réalités, ira nous le savons très loin dans l’obscurantisme, jusqu’aux freins à la médecine, jusqu’aux accusations de sorcelleries ( voir Michelet : les Sorcières). Le catholicisme dans sa grande diversité saura malgré tout se montrer conciliant quand certains prélats désirants assumeront leur sexualité, jusqu’au pape Borgia qui avec femme, enfants, maîtresses et gitons, trônait dans le Vatican du 15ème siècle. Les craquements inévitables entre les théorisations absurdes et mortifères et la réalité d’une sexualité humaine vont ainsi traverser toute l’histoire du catholicisme, de Borgia aux fameuses « bonnes de curés ».
Mais cette sexualité ne peut jamais être vécue sereinement, car elle est théorisée comme impure. Certains prêtres cacheront donc leurs femmes et leurs enfants pendant des siècles et cette pratique de la honte et du secret continue bien entendu. La confession, le purgatoire et les indulgences, spécificités de la souplesse et de l’hypocrisie catholique, vont permettre bien des arrangements. Petits arrangements que les églises réformées ne tolèrent pas.
Mais il reste un noyau dur, celui des prêtres convaincus de l’impureté des femmes, convaincus de leur puissance dangereuse, convaincus de la menaçante et impossible influence lubrique des hommes-boucs. Ces êtres, eux-mêmes élevés dans des dogmes impossibles, parfois sincères et voulant renoncer à une sexualité adulte vont donc trouver chez les enfants les agneaux purs, qu’il faut à la fois éduquer et protéger des dangers de la sexualité adulte-animale des sorcières et des Dionysos en puissance. Retrouvant le rôle d’initiateur, de protecteur, de pédagogue, ils sont sans doute persuadés, que les actes pédophiles sont en phase avec l’univers chrétien, car ces actes sont de nature angéliques. Ils verront alors l’influence maternelle comme un amour abusif, l’amour paternel comme un amour dangereux et initiatique à l’âge adulte.
Ce mythe de l’innocence, grotesquement représenté par des angelots, qui ne sont que des variantes d’Eros et cupidon ; des anges, archanges, chérubins, séraphins … qui sont des variantes des êtres hermaphrodites et androgynes, hérités des mythologies gréco-romaines ou la sexualité était assumée, comme l’homosexualité pédérastique et initiatique.
Ces fameux curés pédophiles, qui se comptent par légions, continuent donc cette tradition de l’initiation pédérastique gréco-romaine, revisitée par des fantasmes chrétiens et limitée aux jeunes impubères, le poil étant diabolique, animal, tenant du bouc et de la génisse. Imbus de leur pouvoir, garantis par leur rôle intouchable de représentants d’un dieu proclamé bienveillant, échappant à la loi des humains , celle des hommes et femmes du siècle, impurs et jaloux , ils agissent dans l’ombre des sacristies, abusant de leur verbe et de leur puissance, de leur rôle de pédagogue, de conseillers, de moralistes et d’intercesseurs avec les juges suprêmes. Hypocrites et lubriques, abusifs et narcissiques, ils s’auto-absolvent, usant du droit qu’ils se sont payé de distribuer le bien et le mal.
Toute religion reposant sur le sexisme, les mythes d’impureté et la négation de la sexualité construit ce genre de dérive et de comportements.La seule manière d’en finir avec les curés pédophiles, serait de ruiner les fondements du catholicisme et de la bible, texte merveilleux, barbare et archaïque, à ranger sur les rayons des bibliothèque parmi les sagas islandaises, le livre des morts égyptien, l’Illiade et l’Odyssée, les Mabinogions etc….A noter que parmi ces textes, nombreux sont ceux qui laissent une part beaucoup plus importante à la réalité et à la complexité de la sexualité adulte.
Puissent donc ces enquêtes, être des brèches définitives dans les murailles obscurantistes des religions monothéistes et dans les abus de pouvoir des humains qui s’autoproclament représentant de quelconque figure prétendument divine.
Elia Sikander ( baptisé – tendance bouc)