La Chine sans Google: « un scénario perdant-perdant », estime un analyste

Publié le 22 mars 2010 par Dgabs


L’Américain Google serait sur le point de fermer son moteur de recherche en Chine si Pékin l’empêche d’assouplir la censure des résultats de son moteur de recherche. Le départ de Google, qui contrôle 35% du marché contre 60% au Chinois Baidu, pourrait être lourd de conséquences pour les entreprises locales utilisant ses services de publicité, de référencement et de divertissement.

Le 12 janvier dernier, le groupe a annoncé qu’il cesserait de se plier aux règles de censure chinoise après avoir découvert que des hackers avaient piraté des comptes de courrier électronique hébergés par Google et appartenant notamment à des militants chinois des droits de l’Homme.

La fermeture du moteur de recherche Google.cn semble être la seule perspective qui se dessine après l’échec des pourparlers entre la société américaine et le gouvernement chinois. Le 12 mars, le ministre de l’Intérieur chinois Li Yizhong a annoncé que l’entreprise devait se plier aux lois chinoises, sans quoi la Chine se développerait sans Google.

Lundi, les médias contrôlés par le gouvernement ont intensifié leurs critiques envers Google, accusé d’obéir à des motivations politiques. Ils avaient annoncé la semaine dernière que Google avait arrêté de censurer son moteur de recherche, information démentie par Scott Rubin, porte-parole de Google, qui n’a pas non plus confirmé la fermeture de Google.cn.

Le départ de Google pourrait avoir d’importantes répercussions pour les entreprises chinoises et les internautes. « Si Google part, c’est un scénario perdant-perdant, bien plus que des pertes pour Google et des gains pour les autres », a estimé Edward Yu, président d’Analysys International, un cabinet de recherche de Pékin.

Car, ironiquement, le géant Internet devrait enregistrer de faibles pertes commerciales, son chiffre d’affaires de 300 millions de dollars (environ 220 millions d’euros) en Chine reposant principalement sur des sociétés chinoises tournées vers l’export, qui devraient continuer à utiliser ses services étrangers.

« Nous pensons que la plupart des revenus seront toujours assurés, les achats de référencement seront payés à Google.com au lieu de Google.cn », a ainsi estimé Edward Yu.

Même des industriels chinois proches de la ligne officielle ont osé dire en février que le contrôle de l’Internet entravait la croissance des entreprises de ce secteur. « Sans une compétition totale et équitable sur le marché, il n’y aura pas de qualité, pas d’excellence, pas d’opportunités d’emploi, aucune stabilité ni véritable croissance en Chine », avait estimé le président du portail Internet Sohu, Charles Zhang.

Le départ de Google de Chine devrait certainement être une aubaine pour son principal rival Baidu, un moteur de recherche chinois qui détient déjà 60% du marché. En revanche, les entreprises qui dépendent du moteur de recherche, de la cartographie et des services Google vont devoir trouver d’autres solutions.

C’est le cas notamment de la société China Mobile, la plus grande entreprise de téléphonie mobile au monde en nombre d’abonnés, avec 527 millions de clients, qui dépend du moteur de recherche et des cartes Google.

Reste donc à savoir si la Chine autorisera Google à opérer ses services de publicité et de téléphonie mobile si le moteur de recherche ferme. Le gouvernement a annoncé que les opérateurs de téléphonie mobile seraient autorisés à utiliser le système Google. Rien n’est moins sûr pour les téléphones Google, dont deux lancements ont déjà été retardés du fait du différend.

Les petites sociétés chinoises devraient également être les plus affectées par cette fermeture, utilisant le service publicitaire Adwords de Google, son service de messagerie Gmail et ses services de traitement de texte.

La Chine met en avant l’utilisation commerciale et éducative d’Internet, mais interdit l’accès aux sites des militants pacifistes ou des droits de l’Homme ainsi qu’à certains journaux d’information en ligne. Les internautes chinois ne peuvent aller sur les sites communautaires comme Facebook, ni sur les plate-formes étrangères de blogs.