Magazine Conso
Interview de Arnaud Nourry le patron d'Hachette aujourd'hui sur les Echos qui revient sur l'arrivée d'Apple en chevalier blanc dans le secteur: "Apple vient de redonner des marges de manoeuvre
aux éditeurs américains face à Amazon… Lorsque, en janvier, Apple est
sorti du bois avec son iPad, nous nous sommes dit qu'il y avait une
véritable fenêtre de tir pour rééquilibrer le rapport de force avec
Amazon sur cette question du livre numérique. Rappelez-vous
courant 2008, Amazon, qui venait de lancer aux Etats-Unis une nouvelle
version de son lecteur numérique, le Kindle, avait décidé, sans rien
dire aux éditeurs, de vendre les nouveautés au prix de 9,99 dollars le
téléchargement, quitte à perdre plusieurs dollars sur chaque ouvrage.
Cela a été un choc terrible pour les éditeurs. D'autant que Barnes &
Noble et tous les autres revendeurs de livres numériques se sont
alignés. Nous avons essayé de discuter avec l'ensemble des acteurs, sans
succès. Amazon -qui, l'an dernier, a représenté 85 % de nos ventes de
livres numériques -estimait que c'était son affaire s'il voulait faire
du livre numérique un produit d'appel. Il avait une stratégie claire:
installer son Kindle sur le marché et peut-être empêcher d'autres
acteurs de prospérer. Mais les éditeurs américains, dont Hachette, ne se
sont pas laissé faire. En septembre, Hachette a contre-attaqué. Au moment de la sortie des
mémoires de Ted Kennedy, nous leur avons fourni le livre, commercialisé
un peu plus de 30 dollars, mais pas le fichier numérique. En décembre,
nous avons franchi un palier de plus en annonçant que nous ne leur
donnerions plus aucun fichier numérique des nouveautés au moment de
leurs sorties. D'autres grands éditeurs ont fait de même. La sortie
programmée de l'iPad d'Apple devrait nous permettre de sortir de cette
impasse". Il semblerait que l'on aille vers une situation tout à fait inédite aux Etats-Unis avec un prix unique des livres numériques. "Nous nous sommes mis d'accord sur un mandat
d'agent. Dans ce schéma, c'est l'éditeur qui fixe le prix de vente des
livres -ce sera donc pour les nouveautés 12,99 dollars ou 14,99 dollars
s'il ne s'agit pas de best-sellers et les prix seront moins élevés pour
les livres de poche. Nous percevrons une rémunération de 70 % du prix
de vente, Apple 30 %. Pour les revendeurs, il y a maintenant deux
possibilités: accepter ce contrat de mandat ou attendre près d'un an,
c'est-à-dire la sortie en poche, pour disposer du fichier numérique.
Nous sommes en discussion avec tous les revendeurs américains qui seront
ravis de sortir de la vente à perte. Apple apparaît aujourd'hui comme
le chevalier blanc de l'édition américaine. D'autant que, malgré sa
grande puissance, il n'a jamais cherché à intégrer l'amont, c'est-à-dire
la création." Reste à savoir si Hachette a plus à gagner avec Apple et son iPad, qu'avec Amazon, son Kindle et son offre en papier, surtout sur le marché des best-sellers! Est-ce que tous les éditeurs vont faire de même? En tous cas, une reprise en main salutaire sur les prix pour les éditeurs, à condition que les ventes suivent...