Critique: TURKISH EXORCIST / SEYTAN (1974)

Par Melmott





AkaSatan / Turkish Exorcist
Film Turc de Metin ERKSAN (1974


Quelque part dans le désert, un Cheikh archéologue découvre une statuette très moche. Il est très ému. Son regard anxieux se tourne vers les cieux muets tandis que, là-bas, le soleil descend sur l’horizon. Coupez elle est bonne on la garde.
Istanbul 1974 : Gül, 12 ans, est atteinte d’un mal incurable. Puisque les médecins et magnétiseurs sont tout juste bons à se concocter des coupes de cheveux hautement improbables, la maman de Gül, dont même Imdb ignore le prénom, décide de faire appel à des exorcistes car elle soutient sans rire que sa Gül chérie est possédée par le Seytan himself, en d’autres termes Satan, ni plus ni moins.
Parallèlement, elle fait la rencontre d’un écrivain de livres seytanique, qui en a justement laissé traîner un exemplaire dans le grenier de la dame (je vous expliquerai). Anéanti par la mort de sa mère, dont il se sent coupable, ce dernier accepte de lui apporter son aide en allant coller quelques baffes dans la gueule de sa Gül jusqu’à ce qu’elle devienne raisonnable et cesse d’uriner sur le kilim du salon.
Un combat sans merci s’engage, à grands coups de machines à fumée, de tête pivotante et de Tubular Bells, entre l’écrivain auquel le cheikh ému dont duquel que je vous causais au début de ce pitch envoûtant prête main forte, et l’entité maléfique, encore plus moche en vrai qu’en statuette.




Remake plan par plan d’un film d’épouvante dont j’ai présentement oublié le nom, ce Seytan, s’annonçant nanaresque en diable, s’avère décevant dans un premier temps : les acteurs, passé le choc que procure la vision de leurs expérimentations capillaires, ne sont pas franchement mauvais. Gül et sa mère font même montre d’une implication sérieuse (durant tout le métrage, et c’est pas rien). Coté mise en scène, ça se tient ; certes, ce n’est pas la sienne, mais même dans ses quelques infidélités au script original, notre Turkish-Friedkin ne s’en sort pas mal. Niveau montage : raccords corrects, pas d’excès musicaux, d’accumulation de coupes hasardeuses. Bref, pour un peu, abstraction faite de la teinte maladive de la pellicule, on se croirait en présence d’une honnête série B peu palpitante…

Seulement voilà (ne partez pas). Arrivent les scènes à effets spéciaux. Et là, ça se complique sérieusement pour le Stambouliote, fauché et apparemment peu rompu à ce genre d’exercice. Qu’importe : on réunit le matériel (un pot de peinture verte, un de moutarde aux condiments, 2 pinces à linge et une paire de ciseaux), on pousse la machine à fumée au maximum, on se retrousse les manches et on envoi la musique !
Et là…
Devant les premières manifestations du mal, quand le matelas de Gül est pris de convulsion (oui car le cadre du lit ne bouge pas ; seul le matelas se soulève en son centre, comme sous l’action des jambes puissantes d’une entité maléfique qui se serait planquée dessous), que la pauvrette fait des bonds olympiques en essayant de prendre un air terrorisé (et surtout en essayant de garder un air terrorisé plus de 2 secondes dans ces conditions), et que sa maman la rejoint dans ce rodéo sauvage, à ce moment là disais-je, on se redresse dans son fauteuil, et, abasourdi par cette immersion brutale dans le nanar de compétition, on se dit que finalement, ça va peut-être le faire.



Meral Taygun est : la maman de Gül




Cihan Unal et 50% du budget FX


Dialogues bonus:

La maman, Ayten (et oui, je suis mieux renseigné que Imdb) trouve un livre nommé Seytan (prononcer Sheïtan) dans le grenier. Furieuse, elle interroge son personnel de maison :
Ayten : « Ce livre est-il à vous ? »
La femme de ménage : « Mais madame, vous savez bien que je ne sais pas lire ! »
Ayten : « Ce livre est-il à vous ? »
Le cuisinier : « Mais madame, vous savez bien que je déteste les livres ! »



Canan Perver assure le spectacle



En résumé, on est encore loin des sommets qu’atteindra le futur Dünyayi Kurtaran Adam (Turkish Star Wars, qui aura l’avantage, entre autres, de bénéficier d’un scénario original, donc dépourvu de toutes considération de compréhension ou de crédibilité), certes… Mais si c’est parfois passablement ennuyeux, c’est toujours plus drôle qu’une comédie de Ben Stiller, non ?



Scènes d’exorcisme ordinaires



Et si vous avez la chance de ne pas avoir encore vu la version US, un conseil : commencez par la version Turque. Et venez me dire après ça que le film de Friedkin a vieilli, que les trucages ceci ou que les ambiances cela…
Le Lombric