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« Dieu le seul moment où il rit, c’est quand deux cousins plaisantent » - Trek Jour 5 - Yendouma – Bamba

Publié le 21 mars 2010 par Magalicadet
20 km nous séparent de Bamba, que nous devons atteindre avant midi. Dernier jour chez ce peuple de travailleurs dont on se souviendra surtout qu’il abat continument des tâches sysiphesques. Nous sommes sans cesse abasourdis par la dureté de la vie ici, d’hommes et de femmes luttant contre un climat peu commode dont le quotidien « se projette en mille gestes et rites » (M. Griaule).  Je m’efforcerai d’y penser lorsque, les fesses nonchalamment posées sur mon confortable fauteuil de bureau - d’une densité de 30kg/m3, assise réglable en hauteur par vérin pneumatique, doté d’un mécanisme synchrone avec réglage personnalisé de la tension du dossier - baignée par une température ambiante de 23°C soigneusement étudiée - je me plaindrai de mes harassantes journées.       Dernier jour auprès du grand Souley. Dernier jour au milieu de cette « mer de grès figée en pleine tourmente, avec ses longs creux de vallées sablonneuses et ses vagues aplaties de rochers reflétant la lumière ». Nous faisons part à Souley du contenu probable de nos prochaines étapes. Halte chez les Bozos, à la recherche de l’hippopotame sacré, campement sauvage sur les rives du Niger.  Souley nous décrit alors les liens insolites qui unissent Bozos et Dogons, le cousinage, facteur d’apaisement inter ethnique que Griaule décrivait comme une « alliance cathartique avec fonction purificatrice». Ces rapport sont parfois dénommés « parenté à plaisanteries », les propos offensant  échangés entre « cousins » ne pouvant donner lieu à des querelles intestines. Au-delà du respect d’un pacte fraternel passé, empêchant toute genèse de conflit entre ces peuples, ils sont tenus de s’apporter une assistance mutuelle. Le cousinage entre Bozos et Dogons (que tout semble pourtant séparer, les uns agriculteurs peinant dans leur gestion de l’eau, les autres, pêcheurs sur le Niger nourricier) constitue l’une des « parentés à plaisanterie » les plus intenses entre groupes africains. La légende révèle que deux frères, l’un  à l’origine de la lignée Dogon, l’autre ancêtre Bozo, durent se sauver mutuellement la vie dans des conditions assez barbares. Je demande un peu de détails croustillants à Souley qui me chuchote à l’oreille que l’un des deux frères aurait, pour nourrir le second famélique, fait cuire la viande de sa propre cuisse.     Résultat :  malédiction pour toute attitude venant compromettre le lien sacré, pas de mariage inter ethnique notamment (les rapports sexuels d’un Bozo et d’une Dogon (et réciproquement bien sûr) se solderaient par une incapacité totale de séparer les deux amants). Un peu étrange et ambigu puisque finalement, cela pousse les deux peuples à s’éviter pour  limiter les occurrences conflictuelles ou amoureuses.  En revanche, un Bozo qui viendrait visiter un Dogon peut s’il le souhaite se servir à l’envi.   « Par un froid jour d’hiver, des porcs-épics, en compagnie, se serraient très près les uns des autres pour éviter, grâce à leur chaleur réciproque, de mourir de froid. Bientôt, cependant, ils sentirent leurs piquants réciproques, ce qui de nouveau les éloigna les uns des autres. Mais lorsque le besoin de se réchauffer les amena de nouveau à se rapprocher, ce second mal se renouvela, si bien qu’ils furent ballottés entre les deux souffrances jusqu’à ce qu’ils aient finalement trouvé une distance moyenne leur permettant de tenir au mieux ». (Schopenhauer)   Nous faisons halte au bout de 8km à Wéré, la terre est davantage rougeâtre ici. 10 minutes à peine de pause le temps d’engloutir 50cl rafraîchissant et c’est reparti. 

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