La monarchie belge est de nouveau sur la sellette. Non, rassurez-vous pas d’euphorie, il n’est pas du tout question de la supprimer, il s’agit juste de l’amener à un service minimum sans plus aucun pouvoir politique. La transformer en institution purement protocolaire. Autrement dit, en faire une iambassadrice en papier glacé, comme c’est déjà le cas pour la plupart des monarchies européennes.
Pour une fois, selon une enquête conjointe de deux grands (!) quotidiens belges - La Libre Belgique et De Standaard -, il y aurait un très large consensus (en tout cas de façade) dans la classe politique pour araser ce qui reste du rôle constitutionnel du Roi des Belges. Selon les témoignages recueillis auprès des responsables politiques nordistes et sudistes, ta plupart des partis sont demandeurs d’une réforme qui priverait le souverain de ses dernières prérogatives politiques. Elles se résument à très peu de chose, en fait : sanctionner (pour la forme) les lois fédérales et « nommer » (aussi pour la forme) les ministres fédéraux. Le souverain n’a aucun pouvoir sur les entités fédérées (régions et communautés).
La manœuvre envisagée couve depuis 1990 quand le très catholique Baudouin Ier refusa de signer la proposition de loi sur l’avortement pour raison de conscience personnelle. Le gouvernement de l’époque avait dû trouver une entourloupette : déclarer le roi « dans l’impossibilité de régner », le temps de voter la loi sans son aval. L’affaire avait fait scandale et elle est restée dans toutes les mémoires.
Deux raisons poussent subitement la classe politique à agir de la sorte.
La première coule de source à l’aube d’une inéluctable évolution institutionnelle qui court tout droit vers le confédéralisme et plus si affinités : les pouvoirs exécutifs n’auront plus besoin d’un roi à qui il faut, selon la constitution actuelle, s’adresser (pour la forme) en certaines situations. La personne d’Albert II, très sympathique au demeurant et surtout… très docile, n’est absolument pas en cause.
La seconde est plus subtile et discrète. Non clamée en public, elle phagocyte les esprits : l’héritier présomptif de la couronne, le prince Philippe, suscite méfiance et rejet, surtout en Flandre. En clair, on n’en veut pas et la succession d’Albert (75 ans) approche à grand pas. Outre son manque d’entregent et de spontanéité, l’héritier est réputé faible, imprévisible et bien moins docile que papa (selon la constitution, le roi est « irresponsable » sur le plan politique). Il ne faut pas non plus sous-estimer l’influence d’une épouse à la forte personnalité et à l’ego bien dimensionné ni le rôle de sous-marin que celle-ci pourrait jouer.
Fera-t-on cette réforme ? Oui, sans aucun doutei, tant la pression est forte en Flandre. Quand ? Pas avant le début de la nouvelle législature (courant 2011 sauf… crise politique) car - je simplifie - on ne peut légalement changer la Constitution comme ça au milieu du gué. Et pourtant le temps presse. Des indices mais aussi des rumeurs laissent en effet penser que le passage de sceptre n’est plus très loin. Dernier évènement qui fait jaser : le prince vient d’être promu lieutenant général et vice-amiral, les grades de son père à l’armé belge.
Il n’y a plus qu’à espérer que cette belle unité verbale se poursuive jusqu’au sein de l’hémicycle quand les parlementaires seront face à leurs responsabilités. On peut toujours rêver.