Article 1792 du code civil, vente immobilière et clause de non garantie des vices cachés

Publié le 21 mars 2010 par Christophe Buffet

La clause de non garantie des vices cachés ne permet pas de ne pas répondre de la garantie de l'article 1792 du code civil :

"Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 30 septembre 2008), que, par un acte du 10 août 1999, M. X... et Mme Y... ont vendu une villa rénovée à Mme Z... ; que des désordres étant apparus, une expertise a été ordonnée ; qu'après dépôt du rapport, Mme Z... a assigné M. X... et Mme Y... en indemnisation de ses préjudices sur le fondement des articles 1792 et 1792-1 du code civil ;

Sur le moyen unique :


Attendu que M. X... et Mme Y... font grief à l'arrêt de les condamner à payer à Mme Z... la somme de 48 489,38 euros au titre du préjudice matériel et la somme de 5.000 euros au titre du préjudice moral, alors, selon le moyen :


1°/ que le vendeur non professionnel d'un immeuble qu'il a rénové peut stipuler une clause de non garantie des vices cachés, quand

même il devrait cette garantie sur le fondement des articles 1792 et suivants du code civil ; qu'en décidant dès lors que les consorts X...-Y..., vendeurs non professionnels de l'immeuble qu'ils avaient rénové, ne pouvaient invoquer la clause de non garantie dans la mesure où l'acheteur avait fondé son action sur la garantie légale des constructeurs, garantie qui n'est pourtant qu'une garantie des vices cachés et qu'il n'était pas contesté que le contrat liant les parties était une vente, la cour d'appel a violé les articles 1643, 1792, 1792-1 2° et 1792-5 du code civil ;


2°/ que l'absence d'entretien régulier de l'immeuble par l'acquéreur constitue une cause étrangère exonératoire de responsabilité pour l'entrepreneur ; que dans leurs conclusions, les consorts Y... et X... faisaient valoir que les désordres pour lesquels il était demandé réparation avaient pour origine de graves attaques de termites qui avaient été permises par l'absence d'entretien de sa maison par Mme Z... depuis son acquisition ; que la cour d'appel a expressément constaté que les désordres allégués étaient dus, au moins pour partie, à la présence d'insectes xylophages ; qu'en affirmant cependant que la présence de ces insectes ne peut être considérée comme une cause étrangère exonératoire de la responsabilité des constructeurs sans rechercher si Mme Z... avait procédé à un traitement régulier de son immeuble pour le protéger contre les dégâts causés par ces insectes, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1792 du code civil ;


Mais attendu qu'ayant relevé que l'importance des travaux de rénovation réalisés par M. X... les assimilait à des travaux de construction d'un ouvrage, que l'action de Mme Z... était expressément fondée sur les articles 1792 et suivants du code civil et que les détériorations avaient eu pour cause principale le choix de matériaux de mauvaise qualité et une réalisation défectueuse des opérations de rénovation par les vendeurs, la cour d'appel, qui, sans être tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, en a exactement déduit que M. X... et Mme Y..., qui étaient responsables de plein droit des dommages constatés, sur le fondement de l'article 1792 du code civil, ne pouvaient invoquer l'application de la clause de non-garantie des vices cachés insérée dans l'acte de vente, a légalement justifié sa décision
;

PAR CES MOTIFS :


REJETTE le pourvoi ;


Condamne, ensemble, M. X... et Mme Y... aux dépens ;


Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne, ensemble, M. X... et Mme Y... à payer à Mme Z... la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de M. X... et de Mme Y... ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois mars deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt.

Moyen produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour Mme Y... et M. X....


Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné in solidum M. X... et Mlle Y... à payer à Mme Z... la somme de 48.489,38 euros au titre de la réparation du préjudice matériel et celle de 5.000 euros en réparation du préjudice moral ;


AUX MOTIFS QUE l'action de Corinne Z... est expressément fondée sur les articles 1792 et suivants du code civil ; qu'aux termes de l'article 1792-1 du code civil, est réputé constructeur de l'ouvrage toute personne qui vend, après achèvement, un ouvrage qu'elle a construit ou fait construire ; qu'à cet égard, le vendeur d'un immeuble dans lequel il a été procédé à des travaux de rénovation est susceptible d'être déclaré responsable, envers les acquéreurs, des désordres affectant cet immeuble, sur le fondement des articles 1792 et suivants, sans qu'il soit nécessaire de justifier d'un contrat de louage d'ouvrage ou de maîtrise d'oeuvre, dès lors que l'importance des travaux réalisés les assimile à des travaux de construction d'un ouvrage ; qu'il résulte du rapport de Bernard B... que l'immeuble vendu à Corinne Z... était affecté d'un grand nombre de désordres qui le mettaient en péril et le rendaient impropre à sa destination, qu'il est apparu en effet dès 2004 un important affaissement de la poutre du salon qui soutient le premier étage ; que l'attention de l'intimée a alors été attirée sur un risque d'affaissement total du plancher de l'étage ; que l'expert a relevé que l'une des deux poutres porteuses avait subi une attaque d'insectes xylophages remontant à environ cinq ans, et que la deuxième qui n'avait pas subi une telle attaqué était, comme l'autre, à la limite de la rupture à ses deux extrémités ; qu'à l'étage, la lucarne était d'une conception non conforme, et la panne soutenant le grand comble avait été coupée en deux points, alors que le faîtage du grand comble était lui aussi cassé à un tiers de sa portée ; que la panne intermédiaire était d'une section insuffisante et faiblissait sous la charge de la toiture ; que la rochelle était non conforme et présentait des déformations ; que l'escalier de la rochelle était dangereux et devait être sécurisé en urgence ; que l'escalier montant à la partie bureau était très dangereux, instable et ne comportait aucune sécurité ; que le solivage supportant la toiture était non conforme, les portes et solives sous dimensionnées, les pannes formant la toiture d'une faiblesse inquiétante, les autres pannes affaiblies en raison de leur mauvaise qualité, et la toiture quant à elle totalement non conforme, qu'il s'agisse des tuiles ou de la zinguerie ; que l'expert a précisé que les matériaux constituant la charpente étaient des bois et matériaux de récupération de qualité très médiocre, et que Yves X... avait lui-même assuré la rénovation de l'immeuble sans mise en oeuvre d'aucune technique professionnelle et en se livrant à un véritable "bricolage" ; que les consorts X...-Y... sont responsables de plein droit des dommages constatés, sur le fondement de l'article 1792 du code civil, du fait de l'importance de l'opération de rénovation réalisée, à laquelle l'expert a lié l'ensemble des désordres ; qu'ils ne sauraient s'exonérer de cette responsabilité en soutenant qu'à l'époque de la vente, ils n'étaient pas encore tenus de délivrer un constat d'état parasitaire, alors que la présence d'insectes xylophages ne peut être considérée comme une cause étrangère exonératoire de la responsabilité des constructeurs et qu'en toute hypothèse les détériorations ont eu pour cause principale le choix des matériaux de mauvaise qualité et une réalisation défectueuse des opérations de rénovation par les vendeurs ; que les consorts X...-Y... ne sauraient davantage invoquer l'application de la clause de non garantie des vices cachés insérée dans l'acte à leur profit, alors que la demande de Corinne Z... n'a pas pour fondement l'action rédhibitoire ou estimatoire en raison du vice caché affectant la chose vendeur, mais la garantie légale du constructeur ;


ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'il résulte du rapport d'expertise que l'immeuble acquis par Mme Z... présente les désordres suivants : une poutre porteuse à la limite de la rupture à ses deux extrémités, ayant subi une attaque xylophage et une seconde poutre porteuse dans le même état de faiblesse mais n'ayant pas subi d'attaques d'insectes xylophages, une lucarne de conception non conforme, la panne soutenant le grand comble coupée en deux points, faîtage du grand comble cassé à un tiers de sa portée, panne intermédiaire de section insuffisante et faiblissant sous la charge de la toiture, un raccord de pénétration de toiture au grand comble avec pignon maçonnerie non conforme, bois de trop faible section et mal assemblée, l'escalier de la rochelle dangereux, balustrade pouvant rompre sous le poids même d'un enfant, l'escalier montant à la partie bureau très dangereux, instable et sans aucune sécurité, le solivage supportant l'étage non conforme, poutres et solives sous dimensionnées, les pannes formant toiture dans la partie bureau d'une faiblesse inquiétante, une panne fait l'objet d'attaques xylophages, les sont affaiblies par leur mauvaise qualité, toiture totalement non conforme : croisement des tuiles insuffisant, matériaux isolant trop faible en épaisseur et touchant la tuile, absence de ventilation, zinguerie ne garantissant pas l'étanchéité ; que l'expert indique que tous les désordres mettent en péril l'immeuble et chiffre leur coût de reprise à la somme de 48.489,38 euros TTC ; qu'il résulte par ailleurs du rapport d'expertise que M. X... a procédé personnellement à la restauration de l'immeuble en l'absence de toute technique professionnelle et que les désordres procèdent tous de cette restauration, l'expert qualifiant les ouvrages comme ayant été "bricolés" ; qu'il est contant que la demanderesse ne produit aucune pièce justifiant de la réalisation par M. X... de cette restauration ; que cependant, force est de constater que les consorts X.../Y..., qui résidaient à l'époque à Bassens, ont été destinataires du courrier de l'avocat de Mme Z... du 19/02/2004, faisant état des transformations importantes réalisées dans l'immeuble par les vendeurs consistant notamment en la réalisation d'un premier étage et qu'ils n'ont pas contesté ces propos ; qu'il en résulte que les vendeurs, ayant procédé directement pour M. X..., et fait procédé par M. X... pour Mlle Y..., à une rénovation d'une telle importance qu'elle est assimilable à une construction, et affectée de désordres incontestablement de nature décennale, l'immeuble étant impropre à sa destination et atteint dans sa solidité, ont engagé leur responsabilité sur le fondement des articles 1792 et 1792-2 du code civil envers l'acquéreur de l'ouvrage ;


1) ALORS QUE le vendeur non professionnel d'un immeuble qu'il a rénové peut stipuler une clause de non garantie des vices cachés, quand même il devrait cette garantie sur le fondement des articles 1792 et suivants du code civil ; qu'en décidant dès lors que les consorts X...-Y..., vendeurs non professionnels de l'immeuble qu'ils avaient rénové, ne pouvaient invoquer la clause de non garantie dans la mesure où l'acheteur avait fondé son action sur la garantie légale des constructeurs, garantie qui n'est pourtant qu'une garantie des vices cachés et qu'il n'était pas contesté que le contrat liant les parties était une vente, la cour d'appel a violé les articles 1643, 1792, 1792-1 2° et 1792-5 du code civil ;


2) ALORS, en toute hypothèse, QUE l'absence d'entretien régulier de l'immeuble par l'acquéreur constitue une cause étrangère exonératoire de responsabilité pour l'entrepreneur ; que dans leurs conclusions (p. 3 et 4), les consorts Y... et X... faisaient valoir que les désordres pour lesquels il était demandé réparation avaient pour origine de graves attaques de termites qui avaient été permises par l'absence d'entretien de sa maison par Mme Z... depuis son acquisition ; que la cour d'appel a expressément constaté que les désordres allégués étaient dus, au moins pour partie, à la présence d'insectes xylophages ; qu'en affirmant cependant que la présence de ces insectes ne peut être considérée comme une cause étrangère exonératoire de la responsabilité des constructeurs sans rechercher si Mme Z... avait procédé à un traitement régulier de son immeuble pour le protéger contre les dégâts causés par ces insectes, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1792 du code civil."