Le premier tour des élections régionales a été marqué par une forte abstention. Nos ministres se sont aussitôt emparés de ce fait pour dire qu’il n’était pas possible de tirer maintenant une leçon de ce scrutin. Dans son numéro du 17 mars, Le Canard enchaîné s’amuse à rapprocher, pour MM. Fillon, Hortefeux, Bertrand, Chatel et Karoutchi, leurs déclarations de ces derniers jours, de leurs cocoricos triomphants au lendemain des européennes de juin 2009, où l’abstention avait pourtant atteint 59,37%, à comparer aux 53,65% de ce dimanche 14 mars. Examinons donc ce thème de l’abstention.
On considère comme abstentionnistes les électeurs inscrits qui n’ont pas pris part au scrutin. On peut distinguer plusieurs raisons à cette absence de participation. On trouve des personnes :
- indisponibles le jour du vote, n’ayant pas demandé de procuration, ne l'ayant pas obtenu à temps ou bien se l’étant vu refuser.
- retenues loin de leur résidence par quelque fête familiale, cérémonie ou autre événement
- clouées chez elle par une maladie
- incapables de se déplacer
- n’ayant pu, après un déménagement, s’inscrire dans leur nouvelle commune de résidence et ne pouvant, pour des raisons de temps ou de finances, venir voter dans leur ancienne commune. Si l’édition des cahiers d’émargement exige de figer les listes électorales, il n’en demeure pas moins que n’autoriser leur révision que les quatre derniers mois de l’année me semble sans justification technique.
Il y a aussi des abstentions de conviction, manifestées par ceux qui :
- rejettent absolument le principe des élections, telle cette vieille dame qui proclamait l’autre jour dans un journal télévisé sa foi anarchiste.
- ne sont satisfaits par aucun des candidats présentés et refusent de choisir. Je remarquerai que, par deux fois lors d’une élection présidentielle, je me suis trouvé, comme de nombreux autres, sans candidat à mon goût et cela ne m’a pas empêché de voter.
On trouve également l’abstention traditionnelle dite des pêcheurs à la ligne, de ceux qui refusent de donner un peu de leur temps ou de sacrifier loisirs ou vacances pour remplir leur devoir électoral.
Cette énumération, peut-être incomplète, démontre qu’il est particulièrement imprudent de faire des paris sur la composition partisane des abstentionnistes. Même si l’on peut tenter de déterminer l’origine de ces abstentions, il est malhonnête de prendre en compte ceux qui n’ont pas pu ou pas voulu voter. Les partis ou candidats qui ont recueilli le plus grand nombre de voix ont gagné, les autres ont perdu et les abstentionnistes, qui n’ont pas usé d’un droit acquis de haute lutte par nos prédécesseurs, n’ont pas exprimé leur avis.