Ils sont allés chercher des adolescents en mal d’avenir sur le perron de leurs maisons. Sans doute ont-ils posé le pied sur la première marche, se sont-ils appuyé le coude sur le genou, ont-ils incliné la tête vers eux et leur ont-ils tenu un discours simple et paternaliste. On peut imaginer qu’ils leur ont offert un chewing-gum, leur ont fait miroiter quelques dollars et vanté la belle allure qu’ils auraient en uniforme couleur sable. Voici comment des milliers de gamins ont été expédiés en Irak, sous le soleil des vanités.
6 000 vétérans se suicident chaque année
Une enquête de la chaîne de télévision américaine CBS nous apprend que 17 vétérans des différentes guerres menées par les Etats-Unis se suicident quotidiennement. Ils sont aujourd’hui presque plus nombreux à mourir chez eux que sous les feux ennemis. Il s’agit là d’un drame domestique dont on ne saurait s’étonner tant les pouvoirs publics états-uniens savent se montrer indifférents envers leurs compatriotes les plus démunis. La gravité du phénomène est en outre toute relative comparée aux dizaines de milliers de victimes civiles en Irak et à la détresse des habitants d’un pays en proie au chaos.
Le GI tombe de haut
Il convient cependant de se demander s’il n’y a pas une relation directe de cause à effet entre le suicide de masse des vétérans et l’injustice manifeste du conflit actuel. Comment en effet de jeunes types élevés au culte illusoire d’une Amérique triomphante oeuvrant pour le « Bien » ne reviendraient-ils pas fragilisés et la mort dans l’âme d’une guerre où ils se sont trouvés confrontés à leur propre incompréhension, où on les a isolés des gens qu’ils étaient supposés aider et où au lieu d’affronter une armée organisée au service d’un tyran, ils ont dû lutter contre un peuple tout entier, contre des femmes et des enfants?
Rappelons maintenant que les feux n’ont pas cessé en Irak et qu’au monstre à une tête s’est aujourd’hui substitué une hydre. Les luttes pour le pouvoir sont sévères et les soldats américains en constituent une gêne. Divers courants de l’Islam participent à cette lutte si bien que l’on peut imaginer qu’une fois les troupes américaines parties, l’Irak répondra pleinement aux critères de l’Etat voyou. Conviendra-t-il d’aller y guerroyer à nouveau ou ne sera-t-il pas temps de se demander si le plus voyou n’est pas celui que l’on croit ?
Matthieu