Précipitation n’est pas raison. Dans la difficulté, la majorité à l’occasion de l’actualité revient vers ses fondamentaux et notamment la question de la sécurité pour tenter de mobiliser ses troupes. Paradoxalement beaucoup estimentque le bilan de la droite en la matière, sujet de prédilection de Nicolas Sarkozy, est plus que décevant et se caractérise par des actes en total décalage avec les discours.
L’arme sécuritaire censée permettre de siphonner notamment les voix du Front National, présent dans douze triangulaires, est à double tranchant. Mercredi soir, lors du dernier meeting de Valérie Pécresse à Paris, François Fillon a exhorté tous ceux que la violence inquiète à “ne pas se disperser dans leurs votes“. Dans l’emballement le Premier ministre est allé jusqu’à présenter comme décédé un policier grièvement blessé.
Jeudi matin, Nicolas Sarkozy est à son tour entré dans la danse à la suite du meurtre d’un policier par un commando présumé de l’ETA à Dammarie-lès-Lys (Seine-et-Marne). A l’occasion d’un déplacement sur les lieux du drame, Nicolas Sarkozy a annoncé la création d’une peine incompressible de 30 ans de prison pour les assassins de policiers, et indiqué qu’il serait présent accompagné du Premier ministre Espagnol aux obsèques de la victime mardi prochain.
Le PS par la voix de Martine Aubry, premier secrétaire du PS, a promptement relevé la bévue du premier ministre et dénoncé une volonté de récupération “lamentable” des derniers faits divers.
Une nouvelle fois la législation émotionnelle de l’exécutif fait l’objet de nombreuses critiques. Les statistiques sont formelles. Ces 20 dernières années, de moins en moins de policiers sont tués chaque année” en France. L’annonce va, en outre, à l’encontre des derniers propos du Chef de l’Etat qui parlait de délégiférer .
De nombreux observateurs relèvent le fossé entre les discours très musclés de l’exécutif sur la sécurité et, au niveau local, un désengagement de l’Etat confirmé par la réduction du nombre de fonctionnaires du fait du non remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite.
Jean-Paul Huchon, a eu beau jeu de rappeler que 9.121 postes”ont été supprimés depuis 2008 et qu’environ 3.000 devraient disparaître cette année.
Tous ces éléments renvoient à un bilan très mitigé en termes de sécurité d’un président précédemment ministre de l’Intérieur sur une longue période (2002-2007). Au-delà des chiffres, mauvais, c’est surtout le sentiment général d’insécurité qui a progressé.
Directement concernés, nombre de policiers ont déchanté des coups de menton sans lendemain accompagnés à l’inverse de réductions concrètes des moyens humains.
A ce titre la déclaration du Chef de l’Etat jeudi à Dammarie-lès-Lys : “La violence doit reculer dans notre pays et elle reculera” s’inscrit dans une longue lignée. Patrice Ribeiro, secrétaire général adjoint du syndicat Synergie-Officiers, souligne que “c’est plutôt une bonne chose que les dirigeants rendent hommage à l’action de la police dans un Etat républicain” mais que le vrai problème, c’est que les actes sont rarement à la hauteur des déclarations d’intention.
Le syndicaliste estime que depuis plusieurs mois, “les policiers ont le sentiment d’avoir été complètement abandonnés par les autorités.” Le malaise est alimenté par des conditions de travail difficiles et une politique du chiffre qui a profondément discrédité la profession.
La majorité traverse décidément une mauvaise passe. Après une suite inédite de polémiques, l’exécutif donne le sentiment de transformer en plomb tous les sujets qu’il touche. Alliance des Chiraquiens et des Villepinistes d’un côté, formation d’une nouvelle gauche plurielle de l’autre, le printemps qui se dessine s’annonce porteur d’importantes allergies pour Nicolas Sarkozy.
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