Michel Schooyans, Les pièges de la compassion (6)

Publié le 19 mars 2010 par Walterman

La pseudo-compassion, souvent invoquée en faveur d'auteurs d'actes en soi mauvais, tel l'avortement, conduit donc au scandale ; elle invite les autres à pécher gravement. Le scandale, c'est la première chose à éviter (25). La pseudo-compassion conduit aussi à l'hérésie, à la déchirure dans l'Église, car elle incite les fidèles à s'écarter d'un point non négociable de la doctrine de l'Église : le devoir de respecter la vie innocente. La pseudo-compassion renforce la dérive vers la "tyrannie du relativisme", que l'on observe chez certains pasteurs et/ou théologiens. A terme, la pseudo-compassion pourrait conduire à une situation dans laquelle la doctrine de l'Église et la morale naturelle résulteraient d'une procédure consensuelle et se formuleraient dans des compromis.

Certains, abusés par la pseudo-compassion vis-à-vis de ceux qui pèchent publiquement contre la vie, estiment que l'Église est, sur ces questions, fort sévère. L'Église, en effet, ne mâche pas ses mots:

"Les excommuniés et les interdits [...] et ceux qui persistent avec obstination dans un péché grave et manifeste, ne seront pas admis à la sainte communion" (26).

Or si l'on se souvient du caractère mensonger et violent de la pseudo-compassion, on observera aussitôt que cette sévérité n'est qu'apparente, qu'elle est même une haute expression de la charité. Elle est un appel urgent au changement de vie. Le refus de donner la communion pour les raisons que nous avons rappelées n'est que l'expression de l'amour de l'Église pour les plus faibles, et l'invitation à la repentance adressée à ceux qui risquent de rester enchaînés dans leurs péchés, et d'y enchaîner les autres.

Reste une question délicate mais incontournable. Puisque, dans les conditions rappelées, la sainte communion doit être refusée à un laïc, le code de droit canonique prévoit-il des mesures de suspension, au double motif du scandale et de l'hérésie, pour les clercs manifestant publiquement leur pseudo-compassion pour les avorteurs ?

Louvain-la-Neuve, janvier 2010