L’hiver a été rude cette année. Côtes brisées, accidents de voitures, aller-retours chez le médecin, projets brisés un à un… Heureusement, il me reste mon petit royaume sur Ikariam qui progresse tant bien que mal au gré des aléas. Mais là aussi, j’ai du faire face aux éléments déchainés en compagnie de ma petite alliance qui a reçu sa première déclaration de guerre. Quel ne fut pas mon désarroi, moi, le paisible roi du nord qui regardait croître mes vergers en silence. En ma qualité de diplomate, je dus répondre à la déclaration de guerre sur le forum officiel avec toute la solennité (et la mauvaise fois) dont je suis capable…
« À nos alliés et ennemis, voici les paroles d’Aristippe le sage, diplomate de l’alliance UPR, prince du septentrion et des sept cités d’albâtre :
Depuis plusieurs semaines, des vents chargés de tonnerre sont venus des lointaines contrées -DG- Nos jeunes joueurs et nos alliés les plus fragiles recevaient ces vents avec autant de régularité qu’un paratonnerre planté au milieu des 40e rugissants. (Ce qui est complètement absurde, car les 40e rugissants soufflent en pleine mer. Je mets quiconque au défi parmi mes lecteurs plus ou moins rigolards de planter un paratonnerre au milieu de la mer… Au fond de l’eau peut-être… encore que je me demande quel est l’intérêt de planter un paratonnerre sous l’eau… Bref, je m’égare.)
La diplomatie comme la guerre n’ont pu résoudre le problème. Chaque jour plus hardis, les -DG- menaçaient nos alliés comme les sauterelles du mois d’Elûlu s’abattent sur les récoltes fertiles. (Elûlu correspond au mois d’août-septembre en Mésopotamie ancienne. Cela n’a aucun rapport mais je trouvais que ça faisait cool ici).
La confrontation devenait inévitable. À la suite d’une nouvelle attaque sur un jeune joueur de notre alliance, j’ai décidé de régler personnellement l’affront, renforcé par la taquinerie du pillard qui m’a envoyé 30 bois pour compenser la perte du lancier que j’avais placé en garnison… Attiré dans un piège, je perdais en un soir le gros de mes troupes, (y compris le célèbre Maurice, 143 kilos, qui était le plus gros soldat de mon armée.) Ce revers galvanisa les -DG- qui lancent aujourd’hui cette guerre armés de leur courage et de leur hargne.
Bonne guerre à tous ! Que l’Irkallu, la cité souterraine accueille les âmes des soldats valeureux. »
La guerre s’est arrêté ce matin dans le cliquetis métallique des armées de mon père qui sillonnaient encore les campagnes ennemies. J’ai donc le plaisir de vous annoncer le premier évènement joyeux de cet horrible hiver. Harassé mais heureux, j’ai pris le temps de dresser un bilan de cette semaine de conflit éprouvante.
Finis coronat opus (L’œuvre couronne la fin)
« Chante, ô déesse, le courroux du Péléide Maurice, courroux fatal qui causa mille maux aux Achéens et fit descendre chez Hadès tant d’âmes valeureuses, de héros, dont les corps servirent de pâture aux chiens et aux oiseaux sans nombre : ainsi Zeus l’avait-il voulu. »
Ah non… c’est vrai que Maurice est mort au début des combats, je ne peux pas écrire ça. Bon, mettons de côté l’Iliade pour raconter la triste et authentique histoire de la guerre entre l’alliance UPR et les DG. On dit que l’histoire est écrite par les vainqueurs. Vous avez de la chance Ô implacables ennemis, car le vainqueur est justement historien. C’est la garantie d’un récit neutre et impartial qui mettra de côté les émotions pour se concentrer sur la froide analyse.
Objectivement, on peut dire qu’on leur a mis une sacrée déculottée !! L’alliance UPR, groupée derrière son charismatique diplomate a infligé aux DG une incroyable série de défaites, toutes plus ridicules les unes que les autres. Je pense qu’ils s’en souviendront pendant longtemps en tremblant comme des jouvencelles en train de visiter un abattoir. Ah ! Vous auriez du voir ça ! Ils courraient dans tous les sens ! On aurait dit une délégation officielle chinoise dans une manifestation pro-tibétaine. À un moment j’avais presque mal au cœur pour eux. J’ai dit à mes alliés : « Doucement, on est pas des brutes. Laissez-les marquer quelques points : « King-snake, envoie leur 6 pédalos, qu’ils ne rentrent pas bredouilles. »
Bon d’accord, j’exagère un peu… Il y a eu une belle résistance des deux côtés et du suspens jusqu’à la dernière minute… Pour être franc, après notre Pearl Harbor, j’ai bien cru que notre alliance aller sombrer corps et âmes dans le sillage de nos armées. Après deux jours de combats, la canaille DG sillonnait nos royaumes en semant la mort et la destruction sur son passage. Les portes de nos villes étaient ouvertes aux quatre vents et les loups rôdaient au milieu rues. Le drapeau noir du deuil flottait à la cime du palais royal. Nous étions moralement vaincu. J’attendais la mort avec résignation comme un chrétien dans l’arène, ou plutôt comme Sardanapale enfermé dans son harem avec ses femmes… (Ce qui est historiquement absurde car le vrai Sardanapale chassait le lion à mains nues… Enfin, en ce qui me concerne, je correspond plutôt la caricature du roi oriental décadent.)
Aussi, ne pouvant plus supporter pareille vie, je me jetai résolument dans la carrière du mal et, fatalité extraordinaire, je m’aperçu que j’étais né méchant. Lors de chaque bataille, le sang et la haine montaient vers ma tête à flots bouillonnants. Quand je pillais une ville, je réduisais la population avec des chaînes acérées et je l’aurais fait très souvent si les DG avec leur long cortège de châtiments ne m’en eussent empêché. Après une semaine de combat, le cours de la guerre changea. La terreur ébranla le moral de l’ennemi. Les armées du coyote Nergal et de Zeus, qui sillonnaient jadis mes vergers se terraient dans les bois d’où elles ne sortaient qu’à la nuit tombée pour chasser avec le hibou. Mais les loups qui s’étaient rassemblés sous la bannière UPR chassent aussi la nuit. À chaque bataille, ils ramenaient un morceau de viande à la harde et quand le festin fut achevé, nous nous aperçûmes qu’il n’y avait plus de prédateurs mais seulement des proies.
Merci à tous les participants de cette guerre pour la bonne ambiance générale.