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Le téléphone

Publié le 18 mars 2010 par Corboland78

                   « Si j'ai une voiture, j'ai intérêt à ce que personne n'en ait, pour éviter les embouteillages. Mais si j'ai un téléphone, et que personne d'autre n'en possède, alors ce téléphone ne me sert à rien. »

Longtemps chez nous le téléphone a été un objet non pas de luxe, mais suffisamment superficiel pour que l'on s'en passât. Songez pour vous donner une idée, qu'il n'entra chez mes parents que vers les années 70 sans que je puisse préciser plus. C'était après 1968, car c'est l'année du décès de ma grand-mère que nous apprîmes par un appel téléphonique reçu par une voisine mais c'était aussi certainement avant le milieu de la décade suivante. Prenons comme postulat qu'il s'agissait de l'année 1970 pour simplifier.

J'avais alors dix-huit ans et ma sœur deux ans de moins mais ce sont ses harcèlements qui poussèrent mes parents à en faire la demande à l'administration concernée. C'est aussi ma sœur qui s'en servit le plus, pour ne pas dire exclusivement, ceci expliquant cela. De nos jours on vous installe le téléphone aussitôt qu'on le demande, en ce temps-là il fallait encore être patient. La demande faite, se posa la question du lieu exact où l'installer. Une étagère fût posée sur un mur de l'entrée de notre appartement, spécialement conçue pour cet usage avec une tablette pour poser le poste, une autre pour y ranger les bottins et une dernière pour le répertoire téléphonique avec son petit bloc papier et un stylo, pour prendre des notes en cas de nécessité. Le catalogue de Temps L n'existait pas encore, mais nous l'avions inventé.

Nous sommes à l'époque du téléphone fixe en bakélite de couleur grise dont le combiné est relié au socle par un fil, le cadran rond permet de faire son  numéro en plaçant le bout de son doigt dans le trou associé à un groupe de lettres et chiffres. Les numéros de vos correspondants avaient un charme aujourd'hui inconnu, dépendant d'un central téléphonique géographique, Par exemple, quand nous allions au cinéma, les bandes publicitaires étaient précédées du fameux numéro de Jean Mineur, Balzac 00 01 clamait l'annonce. Balzac correspondait au central du même nom situé dans le VIII arrondissement de Paris et il fallait composer BAL 00 01 pour obtenir le correspondant. Aujourd'hui les numéros ont dix chiffres moins parlants qu'un numéro de sécurité sociale.     

Les téléphones fixes, comme on les appelle de nos jours, méritaient bien leur nom car ils vous maintenaient comme une ancre à leur prise d'attache. Désormais les portables se sont répandus à une vitesse folle allant jusqu'à contaminer les postes fixes puisque ceux-ci voient leurs combinés dissociés de leurs bases ce qui permet de circuler librement dans l'appartement le téléphone à l'oreille. Téléphoner devient une activité physique et il semble inconcevable maintenant de converser sans bouger en même temps ou avoir une autre occupation en parallèle.

Je n'ai rien d'autre à vous dire sur le sujet aujourd'hui, mais si ça me revient je vous téléphone. A plus !


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