Chicas (« les filles » en espagnol) est le premier film de Yasmina Reza, dramaturge française la plus jouée dans le monde. Il nous plonge au coeur des relations entre trois soeurs et leur mère.
Pila, veuve et amoureuse du gestionnaire de son immeuble, souhaite présenter son « fiancé » Fernand à ses trois filles: Nurya , actrice en vogue que le succès ne fait qu’ilsoler; Aurélia, comédienne de théâtre au bord de l’étouffement; et Christa, l’électron libre aussi enfantine que ses fils.
Ce déjeuner de présentation va être le formidable théâtre de toutes les tensions familiales. Une scène sur laquelle la moindre étincelle créer un court-circuit affectif violent et faire tout exploser. Les jalousies entre soeurs qui pourtant s’adorent et se confient, les rancoeurs contre la mère, qui elle-même se sent mise de côté par ses filles.
Chicas, c’est comment, au sein de la famille, les allumettes se transforment en incendie; comment personne n’y trouve sa place tout en l’affirmant de toutes ses forces. Mais sans jamais tomber dans le pathétisme. Yasmina Reza met toujours de la comédie dans les scènes les plus tristes : les névroses exacerbées recèlent cette part d’absurde qui les rendent, finalement, drôles.
Le film paraît très long au début avec beaucoup de petits « morceaux » de la vie de chacune. On se demande ce qu’il veut nous dire et ou il nous mène, avant de s’apercevoir qu’il est comme une petite aiguille qui s’enfonce lentement sous la peau. On s’ennuie presque dans le premier quart, mais parce que l’on sent que la crise est proche et qu’en fait, on l’attend avec impatience.
Les actrices sont aussi lumineuses et touchantes les unes que les autres, entre Carmen Maura - égérie de Pedro Almodovar- en mère qui tente de renaître, Emmanuelle Seigner (Nurya) et Valérie Dréville (Aurélia) qui exposent un coeur à vif et Christèle Tual (Christa) en femme épanouie mais perdue. Quant à André Dussollier (Fernand), il rayonne d’humour et de gentillesse en amoureux qui retrouve une seconde jeunesse, et qui se demande, tout de même, où il est tombé…
Le talent de Yasmine Reza s’exerce donc aussi au cinéma, où elle dénoue les fils emmêlés de fil(le)s électriques.