La Suisse a donc établi une liste de personnalités libyennes indésirables sur le sol
helvétique. Comme elle a signé les accords de Schengen cette mesure s'est étendue automatiquement aux 29 pays membres de l'espace Schengen, dont l'Italie, qui représente
43% des exportations ... libyennes. Ce qui donne une idée de l'impartialité de son ministre des Affaires étrangères Franco Frattini...
Cette fameuse liste est devenue, volontairement ou pas, une monnaie d'échange pour obtenir la libération de Rachid Hamdani et de Max Göldi,
les deux otages suisses retenus en Libye. Rachid Hamdani ayant été libéré, il ne reste plus à libérer que Max Göldi.
On ne sait pas exactement qui figure sur cette liste. Seule certitude : Muammar Kadhafi s'y trouve. Et ce bédouin de carnaval, jamais sans sa tente, n'aime
pas ça du tout. Il n'est plus, depuis longtemps, fier d'avoir été l'idole des terroristes islamistes. Cela lui a coûté trop cher.
Selon le journal libyen Oea, en date du 14 février 2010, 188 personnes ici figureraient sur cette liste. Selon la Suisse leur nombre serait de 150 ici, chiffre que La Ligue arabe reprend quand, le 4 mars 2010, elle affirme sa solidarité avec la Libye ici. Peu importe le nombre exact d'ailleurs. Il s'agit vraisemblablement de dignitaires du régime et de leurs proches, de véritables persona non grata.
Selon le même journal libyen Oea cette mesure aurait été prise par la Suisse au mois de juin 2009. Ce qui est peu vraisemblable. En effet ce n’est que le 2 novembre 2009 que la Commission de politique extérieure du
Conseil national ici a demandé au Conseil
fédéral de ne plus accorder de visas aux Libyens, en raison de la disparition des deux otages suisses depuis le 23 septembre 2009 ici.
Ce jour-là, les deux otages suisses retenus en Libye ont été mis en détention à la faveur d’un contrôle médical opéré par les autorités, un véritable guet-apens. Ils ne devaient réapparaître et retourner à l’ambassade suisse de Tripoli que le 9 novembre suivant. On apprenait le 12 novembre qu’ils seraient déférés devant la justice libyenne à la botte du régime ... avec les résultats que l'on sait : Hamdani blanchi et libéré le 23 février, Göldi expédié en prison pour 4 mois le 22 février ici.
Plus de deux mois après le refus des visas par la Suisse la Libye se réveille. Le 21 janvier 2010 elle menace de restreindre son accès aux Européens s’ils ne se désolidarisent pas de la décision prise par la Suisse d'établir une liste d'exclus libyens de l'espace Schengen. Ce que les 28 autres pays de l'espace Schengen ne peuvent pas faire puisque cette solidarité résulte du mécanisme même des accords de Schengen que la Suisse a signés.
L’Union européenne et la Suisse savent pourtant que le Code communautaire des visas ici a changé le 13 juillet 2009 [Règlement n°810/2009]. Publié le 15 septembre 2009 au Journal officiel de l’Union européenne, il entre en vigueur le 5 octobre 2009 et sera applicable six mois plus tard, c’est-à-dire dès le 5 avril 2010, autrement dit bientôt.
Or dans ce nouveau code des visas l’article 26 permet de déroger au mécanisme des accords de Schengen :
"Des accords bilatéraux entre la Communauté et des pays tiers, visant à faciliter les demandes de visas, peuvent déroger au présent règlement".
Il faut croire que l’Union européenne et la Suisse ont convenu, à ce moment-là, de ne pas mentionner cette possibilité, qu'ils considèrent sans doute comme encore bien lointaine. Ils ignorent qu'en Libye le temps ne s'écoule pas de la même façon qu'en Europe...
Toujours est-il que le 15 février 2010 la Libye décide ici de refuser tous les visas d’entrée sur son territoire demandés par des Européens, à l’exception des Britanniques. L’affaire des visas refusés à des Libyens prend une tout autre dimension.
Le surlendemain, 17 février 2010, le ministre italien des affaires étrangères, Franco Frattini, demande ici à la Suisse de supprimer sa liste noire et à la Libye de libérer les deux otages suisses. Il parle de 186 personnes figurant sur cette liste : il n'est même pas d'accord avec ses amis libyens . Un mois plus tard, le 14 mars 2010, le même, poussé à bout, après avoir léché les babouches du Führer libyen, menace ici la Suisse de faire usage de l’article 26 du nouveau Code communautaire des visas si l’affaire n’est pas résolue avant le 5 avril 2010. Money is money. L'Italie fait partie des pays donneurs de leçons de morale...
Aujourd’hui Kadhafi exige des excuses
de l'Union européenne ici… Quand on a affaire à quelqu'un qui ressemble à s'y méprendre à un échappé
d'asile, on peut s'attendre à tout.
J'attends avec impatience de voir si ces pseudo-démocraties européennes finiront toutes, à l'instar de l'italienne, par lécher les babouches du dictateur
libyen.
Francis Richard
Nous en sommes au
606e jour de privation de liberté pour Max Göldi, le
dernier otage suisse en Libye