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Nous sommes si peu, et si fragile dans la faible lumière de l'aube, à aligner nos mots, en remplacement d'étoiles qui, une à une, s'éteignent…
Nous savons qu'il en est des étoiles comme du reste: ce qui compte n'est pas que nous les ayons vues, ou aperçues, mais la trace qu'elles nous laissent, droit au cœur…
Nous savons la grâce de cet instant, où l'échange improbable s'effectue, dans une pâle lueur…
Nous ne pouvons que nous satisfaire de ce moment, tant nous savons qu'après, le paraître sera de mise, avec son cortège de compromis…
*
Nous n’avons que mots en nos bouches d’insoumission, pour décliner à l’envie le mot amour…
Il est de ces verbes qu’on donne, et qui se satisfont d’être palpitants dans le silence…
Il se décline, en cœurs vibrants sur des pages de bonheurs oubliés.
Il se prélasse entre les grains de sable de plages innommables où nos corps ne faisaient plus qu’un…
Nous roulions dans des vagues d’insoumission. Nos voix hurlaient à l’horizon de nos défaites à venir. Nous demeurions, haletants et nus, à la frange d’écume qui nous ensorcelait encore…
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Le vent nous touchait de son aile gracieuse.
Les cormorans au loin, composaient leur symphonie des plaisirs…
Pages après pages, nous déclinons toujours l’inoffensif concert…
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Alors je laisse le vent, libre, effleurer mon innocence béate…
la beauté à l'état pur se faufile…
Une feuille tombe dans l'herbe pâle
recueillie elle contemple la peau fragile et haletante…
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La Dame se mire en de profonds miroirs.
Elle chante la complainte amoureuse, joue sur le clavecin du cœur…
Elle, posée à l'endroit d'une page où s'épanche nos soupirs…
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Nous déposons à l’orée du jour, une longue mélopée…
Tendrement enlacés devant l’âtre brûlant, nous dessinons les contours de rêves qui persistent.
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Le bonheur est dans ce retrait où danse la flamme discrète…
On laisse au dehors les atours de tourments…
La peau s'enflamme dans la danse du feu.
L'âme réchauffée, la nature s'épanche enfin dans le délié des mots…
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Nous courrons sur les dunes impalpables.
Un vent de sable guidera nos âmes en brumes langoureuses…
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Nous laisserons libre cours, entre deux bras de nuées, au vol libre de nos ferveurs…
L'eau fraîche entre les galets, sera source où boire le long épanchement…
Jour où la terre vibre de nos aubades de délices…
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Lors viendront les étranges réminiscences…
Blottis, nous regarderons passer le long vol de l’expérience.
Nous ne serons plus que délicates pensées, déposées au matin évanescent de nos passions en flammes…
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Si fraîches adorations déclinées au simple des mots…
Si douces dévotions, déposées en paroles de printemps…
Si simples les mots qui disent tout,
et nos yeux qui n'en peuvent plus de ce délice…
*
Muets, nous déviderons l’écheveau.
Ce qui se vit et bruit au centre même du silence, nous guidera plus sûrement.
Nous serons à l’aurore de chaque jour, les palpitants aventuriers d’un monde à nos yeux inconnus.
Nous voici, tissés et revêtus de la longue écharpe d’anamnèse…
*
Nous gardons serré en la carte cordiale
la mémoire vive de ces premières amourettes
Nous ne savons où se loge le souvenir
Nous connaissons seulement la vague
et le ressac qui nous laisse sur le sable
.
Nous gardons secret en l'inspir qui nous vient
le secret délicat de quelque rose enfantine
Nous n'en faisons jamais le tour
préférant à son éphémère disparition
l'intense vibration de sa trace
.
Manosque, 14 février 2010
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