La corrida en Espagne, le gavage des oies dans le sud-ouest français et la chasse aux phoques au Canada sont des pratiques traditionnelles barbares qui perdurent aujourd'hui en occident, et ce en pleine année mondiale de la biodiversité
L’être humain a toujours entretenu des relations très fortes avec le monde animal. Qu’ils soient chassés ou élevés, domestiqués ou sauvages, utilisés à des fins de plaisance ou alimentaires, les animaux sont nos partenaires de vie sur la planète, et notre espèce se doit de leur reconnaitre des droits comme êtres vivants et doit chercher à faire cesser des pratiques déshonorantes pour elle-même et dégradantes et cruelles pour eux.
Il est cependant intéressant de constater que ces pratiques que nous jugeons, dans leur ensemble, dégradantes sont souvent reliées à des traditions historiques à différents endroits de la planète. Ce qui explique la difficulté qu’ont certains pays à abandonner ces pratiques.
Parmi celles-ci, nous parlerons de la corrida en Espagne, du gavage des oies dans le sud-ouest français, et de la chasse aux phoques au Canada.
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La corrida et la souffrance du taureau
Pratiquée depuis plus de trois cent ans en Espagne, au Portugal, dans le sud de la France et certains pays d’Amérique Latine, la corrida est considérée par la plupart des associations de défense des animaux comme un spectacle barbare et cruel à l'origine d'une souffrance chez l'animal. Sous l'effet du stress des médiateurs chimiques sont libérés dans l'organisme du taureau, atténuant les sensations douloureuses. Comme un taureau de combat est, du fait de son conditionnement et de la sélection génétique, particulièrement agressif et difficile à manier, il est blessé avec des piques et des banderilles, pratiques qui éprouve sa bravoure en début de corrida. Toutefois, ces piques et banderilles sont appliquées dans une zone très peu innervée.
Lorsqu'elle est correctement réalisée, la mise à mort du taureau par le matador se fait en une seule estocade. Toutefois, il arrive que le matador manque son coup et que la mise à mort ne se fasse qu'après plusieurs estocades, entraînant donc une souffrance répétée.
Les chevaux de picadors courent également des risques énormes, pouvant aller jusqu’à la mort. Le cheval sert exclusivement de monture au picador et n'a aucun moyen d'échapper à la charge du taureau. Si le cheval tombe sous la charge du taureau, ses parties non-protégées se trouveront exposées.
© Crédit photo: Jérome S./flickr Le gavage des oies, tradition ancestrale ou industrie cruelle ?
La production de foie gras est l'objet de controverses portant sur les conséquences du gavage pour le bien-être des animaux et sur l'importance à accorder à ce bien-être.
Les oies soumises au gavage peuvent en effet souffrir de divers maux dûs à la compression des organes jouxtant le foie, ainsi que des problèmes de régulation thermique, de halètement, de fatigue, ou de dysenterie. Il arrive que d’autres pathologies se développent, telles que des maladies dues à l’engorgement du foie, de la déminéralisation des os, auxquelles peuvent s’ajouter des blessures dues au passage de l’embuc. Selon les opposants au gavage, la mortalité des animaux soumis au gavage est ainsi six fois plus élevée que durant la période d’élevage.
Une coalition d'associations de défense animale, réunie depuis fin 2003 autour du « Manifeste pour l'abolition du gavage », affirme l'illégalité du gavage vis-à-vis des lois françaises existantes de protection animale ainsi que des textes européens.
La Directive européenne du 20 juillet 1998 dispose en effet qu' « aucun animal n'est alimenté ou abreuvé de telle sorte qu'il en résulte des souffrances ou des dommages inutiles » ; alors que selon le rapport du Comité scientifique de la Commission Européenne de la santé et du bien-être des animaux (16 décembre 1998 , constatant que le taux de mortalité en cours de gavage serait multiplié par dix ou vingt, que le « niveau de stéatose (obtenu) pourrait être considéré pathologique » et que la « quantité importante d'aliments intubés rapidement au cours du procédé de gavage provoquerait une distension de l'œsophage, une augmentation de la production thermique et du halètement, et l'excrétion de matières fécales semi-liquides », conclut que « le gavage, comme il est pratiqué aujourd'hui, est préjudiciable au bien-être des oiseaux ».
Les associations affirment également que le foie gras est l'organe malade d'une oie ou d'un canard et entendent dénoncer la stratégie de la filière : entourer le foie gras d'une aura de luxe et de magie, éviter méticuleusement toute référence au gavage et aux souffrances qui y seraient liées. D'ailleurs, selon un sondage CSA/SNDA/Stop Gavage du 9 et 10 novembre 2009, 44% des français sont contre le gavage des oies et des canards et 63,2% pensent que cette pratique est cause de souffrance pour ces animaux.
© Crédit photo: Chuck Whitney/flickrLa chasse au phoque, fait économique ou cruauté sur l’animal ?
Le fait que la chasse au phoque nourrit pendant 7 mois quelques 15 000 familles de pêcheurs est un fait économique certain dont il faut tenir compte, mais les revenus de cette chasse contribuent à moins de 1 % de l’économie de la province de Terre-Neuve-et-Labrador, et a seulement 25% du revenu annuel des chasseurs et de leur famille.
Les techniques de chasse actuelles se font majoritairement avec le gourdin (akapik). Trois coups réglementaires doivent être donnés pour s'assurer que le phoque est bel et bien mort, et plusieurs études démontrent que cette technique est rapide et sans trop de souffrances pour le phoque. Le phoque est ensuite saigné quand on coupe ses veines natatoires et ce n’est qu’alors qu’on enlève sa peau.
Le Canada invoque les aspects traditionnel, légitime et commercial de cette chasse, arguments forts de sa défense. En effet, actuellement le commerce de la fourrure de phoque est tolérée en Europe et permise en Russie, en Chine et dans beaucoup de pays du monde, car les espèces concernées ne sont pas menacées d'extinction et ne sont donc pas listées en Annexe I de la CITES ni même sur la Liste Rouge de l'IUCN. Les diplomaties européennes éprouvent donc quelques difficultés sur le plan légal pour opposer des arguments valables à cette chasse. Cependant les mouvements de protection des animaux font pression de manière efficace sur les opinions publiques à travers le monde, et ce alors que la population de phoque est en constante augmentation au détriment d’autres espèces dont ils sont les prédateurs. Il existe environ six millions de phoques et cela représente effectivement une population en développement qui peut supporter une chasse annuelle régulière et contrôlée.
Très peu d'associations écologiques s'opposeront à cette chasse pour des raisons proprement écologiques. Greenpeace a d'ailleurs eu du mal à se positionner sur le sujet, quoiqu'elle ait finie par intégrer les rangs des opposants à la chasse en 2005, son coordonnateur québécois de l’époque, Steven Guilbault, cité par Le Devoir journal québecois , affirmait en 2004: « L'espèce n'est pas en danger, contrairement à d'autres mammifères marins — ce qui est le cas de plusieurs espèces de baleines, notamment — que nos organisations essaient de protéger et de défendre sur d'autres océans ».