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Le 14 février 842, serment de Strasbourg : premier texte écrit en français
Publié le 07 mars 2010 par Annepaulerville
Comme chacun sait, après avoir été couronné en l’an 800, Charlemagne meurt en 814 dans sa capitale d’Aix la
Chapelle, après avoir unifié un immense empire comprenant la France, l’Allemagne et toute l’Europe transalpine.
Mais ses trois petits-fils se disputent ses lambeaux comme des chiffonniers. En 841, les deux cadets affrontent
leur aîné : la bataille de Fontenoy-en-Puisaye est un carnage inouï qui laisse aux survivants un sentiment d’horreur tel qu’ils jeûnent pendant trois jours pour expier le sang versé avec une
barbarie injustifiable, même à leurs yeux de soldats aguerris. Afin de mettre un terme à cette lutte fratricide, les deux vainqueurs décident, le 14 février 842, de prêter le serment de
Strasbourg, pacte germano-francique de non agression : bilingue roman–tudesque (teuton, ou « deutsch » en VO), le serment est le premier texte écrit attesté dans la langue romane qui
deviendra le français. L’année suivante, le traité de Verdun achèvera le partage de l’empire et découpera l’Europe pour des siècles de sombre féodalité agitée d’incessants conflits claniques : à
Louis l’Allemagne, à Charles la France, à Lothaire la Lorraine (« Lothringen » en allemand) et l’axe Rhin-Rhône.
L’empire carolingien est mort ; le français écrit est né. Mais pour qu’il devienne la langue officielle du
pays, celle des actes juridiques et administratifs, jusque là rédigés en latin, il faudra attendre l’édit de Villers-Cotterêts signé par François Ier en 1539.
A noter également que la Saint-Valentin de 1349 fut aux Juifs de Strasbourg ce que la Saint-Barthélemy de 1572
fut aux huguenots parisiens : un massacre où l’on brûla vifs ceux qu’on accusa d’empoisonner les puits au moment de la peste noire qui ravagea l’Europe entière.
Le 14 février à Strasbourg, des langues naissent, des gens meurent.
Publié dans l'Hebdo du Vendredi le 12 février 2010