Et si ces résultats étaient en trompe-l'oeil? Y a-t-il vraiment, comme on le dit, remontée du Front National, ou effet statistique? Il suffirait que ses électeurs aient été déterminés à aller voter pour sanctionner Nicolas Sarkozy, quand des électeurs de droite déçus aient préféré rester chez eux pour que son score s'améliore mécaniquement. On peut tenir le même raisonnement pour la gauche. Pèse-t-elle vraiment 50% de l'électorat ou seulement 50% de cet échantillon biaisé? Le niveau élevé d'abstention invite à regarder ces résultats avec la plus extrême prudence.
Le scrutin de la semaine prochaine et les enquêtes que les instituts de sondage vont mener dans les semaines qui viennent nous éclaireront sans doute un peu plus sur cette question. Mais même s'il apparaît que le paysage politique a moins changé qu'on ne dit, cette élection est une défaite majeure du sarkozysme, tant sur le plan tactique (construire un parti unique de la droite) que sur le plan stratégique (détourner l'attention de la crise en lançant le débat sur l'identité nationale).
On a parlé de reconfiguration. Il sera intéressant de voir comment se distribuent les voix d'Europe Ecologie et du Front National sur le territoire, le premier étant semble-t-il plus urbain, quand l'autre maintient ses positions dans les zones rurales et semi-rurales, reprenant ainsi le vieux clivage entre une France des villes moderne tentée par un libéralisme modéré et une France des campagnes traditionnelle sensible au populisme interventionniste.