L'avant-projet de réforme prévoit que les délais de prescription pour les affaires d'abus de biens sociaux ne démarrent plus au moment où l'infraction a été découverte, mais à la date où elle a été commise. Une «manière d'enterrer des affaires», dénonce le principal syndicat de magistrats...
Quelques lignes, qui prévoient d'inclure une réforme du délai de prescription contestée dans la réforme de la procédure pénale.
Pour les délits, le délai de prescription, actuellement de trois ans, passerait à six ans. Pour les atteintes à la vie (meurtre, viol), il serait allongé de 10 à 15 ans. Mais ce qui pourrait passer, à première vue, pour une bonne nouvelle pour la justice, suscite pourtant l'opposition de l'Union syndicale des magistrats (USM), premier syndicat de magistrats.
Car le projet de réforme précise que la prescription courrait à partir du jour où l'infraction a été commise, quelle que soit la date à laquelle elle a été constatée. Or actuellement, la jurisprudence permet pour certains délits de la faire courir à partir du jour où l'infraction est découverte.
C'est une manière d'enterrer à l'avenir un certain nombre d'affaires, accuse le secrétaire général de l'USM. « Pour un certain nombre d'infractions dites ‘occultes', il était important de prendre en compte le jour du constat de l'infraction », précise-t-il. Par exemple, des manipulations financières sont souvent découvertes au moment du dépôt de bilan d'une entreprise ou du changement de majorité dans une municipalité, soit des années après que le délit a été commis.
Laurent Bédouet cite l'exemple de l'Angolagate, qui selon lui n'aurait pas pu arriver en justice avec cette nouvelle disposition. Pour le Syndicat de la magistrature, « le gouvernement démontre une nouvelle fois sa bienveillance envers les milieux d'affaires ».
Quoi qu'il en soit, cette disposition ajoute un point de crispation à une réforme qui n'en avait pas besoin. « C'est la démonstration de ce que nous affirmons depuis le début, à savoir que cette réforme part d'une volonté de reprise en main de l'autorité judiciaire ».