Quatre jours plus tard, Ghada décida finalement de couper le cordon ombilical avec son nouveau nid d’amour ; de reprendre ses anciennes habitudes, de sortir, et de s’amuser comme au bon vieux temps. Désespérée des longues attentes nocturnes, d’un mari quasi absent mentalement et physiquement, mais surtout handicapé de sentiments et de romantisme, elle mit fin à ses rêves naïfs d’une jeune mariée d’un bonheur enflammé avec le mari idéal, et au premier coup téléphonique de sa cousine Mayssa, comme si elle était timide ou hésitante de le faire elle-même, accepta sur le champ.
Elles se sont données rendez-vous, au centre-ville, le vendredi, vers 13 h. Après une heure et demie de lèche-vitrine et de marche, les trois filles décidèrent de prendre un café, sur la terrasse d’une cafétéria, qui donne vue sur l’une des stations de métro de la capitale.
Une fois servie, Salma, qui les a rejoint au dernier moment après avoir rompu officiellement avec son petit ami, intervint en buvant un peu de son café crème.
- Ça me manque tant nos retrouvailles à l’ancienne ! puis en contractant violemment ses traits de colère, c’est mille fois mieux que perdre son temps avec un con qui vous dit sans cesse je t’aime alors qu’il voit une autre femme en parallèle !
Mayssa se mit à rire puis en tapotant doucement l’épaule de son amie.
- Ça ira ma puce ! tu l’oublieras si vite !
- Le connard ! murmura-t-elle en fronçant les sourcils. Je le déteste !
Ghada, comme si elle était dans un monde à part, toujours noyée dans un océan de méditation profonde, buvait en silence son jus d’orange frais. Et là, sa cousine Mayssa, interrompit son calme en la touchant de ses mains froides.
Machinalement, Ghada leva les yeux, puis en balbutiant.
- Comme toujours aussi froide !
Mayssa se mit à rire, puis badina.
- Heureusement que je ne le suis pas au lit !
Salma, d’une voix étouffée de rage, lui coupa la parole.
- T’es même pas mariée et t’es pas en couple non plus comment pourrais-tu savoir si t’es chaude ou pas au lit ?
- J’ai une libido très importante !
- Ouais c’est ça !
En traçant un sourire de triomphe, elle continua.
- Et dernièrement j’ai découvert un site très intéressant de sexe ! et j’ai fait la connaissance d’un mec super lascif ! qui me fait mouiller qu’en parlant !
Les deux filles, si surprises, se taisaient un bon moment jusqu’à ce que Salma retrouva sa langue.
- Un site de sexe ? Il n’est pas bloqué ? erreur 404 murmura-t-elle en traçant un rire moqueur.
Mayssa, rigolait un petit moment puis en levant les mains.
- Dieu merci j’ai un proxy !
Ghada, le sourire très large se demanda.
- Comment s’appelle-t-il ton mec lascif ? est-il tunisien ?
- Non ! non ! c’est un Parisien ! et en laissant un rire filer, mais je ne connais pas son nom uniquement son pseudo…
Et comme elle se taisait, Salma, en la tapant si fort sur son épaule.
- Allez ! comment il se fait appeler !
- Vous allez régaler toutes les deux ! puis en retenant son rire, la bite magique !
Les deux filles bombardèrent la cafétéria de rires, et quelques têtes éparpillées sur la terrasse, focalisèrent leurs regards sur eux jusqu’à ce que Mayssa, honteuse, baissa la tête, puis les gronda.
- Arrêtez vous deux ! tout le monde nous regarde !
Salma, toute rouge de rire, ingurgita sa salive puis dit.
- C’est plus fort que moi ! c’est tellement drôle ! puis en la fixant de regard, et toi tu te fais appeler comment ?
- Non ! non ! je ne le dis pas sinon le propriétaire de la cafétéria va nous mettre dehors !
Ghada, en continuant à rire doucement, intervint.
- Nous sommes déjà dehors !
- OK les filles ! mais contrôlez vos rires ! dit-elle honteuse puis d’une voix à peine entendue, la chatte timide !
Salma, ne pouvant plus se contrôler, éclata de rire et des pleurs couvriraient ses yeux.
- Oh mon dieu, j’en peux plus !
Ghada, le visage ensoleillé de gaieté dit.
- Et comment communiquez-vous, vous deux !
- Ben, c’est un site porno, où tu peux visionner des séquences de baise, mais en même temps en bas de l’écran, il y a une bulle qui apparaît parfois quand une personne inscrite au site se connecte ! et voilà, monsieur, « bite magique », m’a parlé plusieurs fois et on est devenu amants virtuels ! puis en souriant, il m’a montré son truc à maintes reprises par sa Cam !
- Non ! sérieux ? s’écria Salma, les yeux grands ouverts.
- Oui ! et son truc est beau ! dit-elle les joues rougissantes. Puis en croisant les bras, chaque fois que je m’ennuie le soir tard, je fais une partie de jambes en l’air virtuelle avec lui ! et je vous assure les filles ! c’est tellement hallucinant !
Ghada comme intéressée se demanda curieuse.
- C’est quoi le site ?
En la fixant d’un regard badinant, Mayssa marmotta.
- Hey ! c’est uniquement pour les pauvres filles célibataires en manque, toi t’es mariée ! puis en la dévorant des yeux, et si tu nous parles de ton séjour à Madrid ?
En allumant une cigarette, Ghada se sentait gênée et dit.
- C’est personnel !
- Ah ouais ? Et ce que je venais de vous raconter n’était pas personnel, voire intime ? s’écria-t-elle un peu sur les nerfs.
- C’est virtuel ! et puis c’est toi qui t’es mise à raconter sans qu’on te le demande !
- C’est bon ! c’est bon ! comme si t’es la première femme qui se marie et part en lune de miel ! s’écria-t-elle tellement en colère et changeant la direction de son regard, pour éviter celui de sa cousine.
- Ne t’énerve pas Mayssa ! je suis dans tous mes états et je n’ai pas envie d’en parler pour le moment surtout que Nader du jour au lendemain décide de mettre terme à notre séjour en amoureux comme quoi il a tellement de travail et blablabla ! dit-elle en posant sa main sur celle de sa cousine.
Mayssa, encore sur les nerfs, tira sa main et en regardant Salma, qui n’avait rien dit, elle qui ne cessait de bavarder d’habitude. En examinant sa copine, émerveillée et éprise d’un nuage de séduction sucré.
- Hey oh ! Salmoucha ! on est là !
Sans changer la direction de ses yeux, fixés sur un mec debout près de la station.
- Oh mon Dieu ! qu’il est beau ! il est tellement canon ! longiligne, les épaules larges, le teint doré, les cheveux bruns mi-longs et ébouriffés ! les yeux bleus comme le ciel ! ah ! regardez-moi ce sourire sexy ! il est à croquer !
Mayssa, qui était jusqu’à là énervée, traça un beau sourire sur ses lèvres et reprit sa bonne humeur.
- Houla ! je suis curieuse de savoir, c’est qui ce mec qui a tout cet effet sur toi !
En pointant son doigt vers une bande de mecs faisant un petit cercle à la station.
- Celui avec la chemise blanche ! c’est d’ailleurs le plus grand d’entre eux !
En suivant attentivement la direction du doigt de son amie, Mayssa la bouche semi-ouverte d’étonnement s’écria.
- Ça alors c’est Kamoula !
- Tu le connais ? s’exclama-t-elle le cœur battant trop fort.
- C’est le petit frère de Ghada ! le beau Kamel !
En entendant le nom de son frère, elle leva vite fait la face et en le cherchant comme une folle de regard.
- Où est-il ?
Puis sans attendre l’aide de sa cousine, et en le localisant, elle poussa sa chaise et se dirigea vers lui en précipitant le pas, avant qu’il prenne le métro qui venait d’arriver.
- Je ne savais pas qu’elle avait un petit frère si beau ! et étonnée, mais pourquoi elle ne m’a jamais parlé de lui ? et pourquoi semble-t-elle tellement contente de sa vue comme si ça fait un bail qu’elle ne l’a pas vu ?
- C’est une longue histoire ! dit Mayssa en mordant sa lèvre, il y a un an son père l’a filé dehors, car il a découvert que son fils se droguait !
- Il est dur ! au lieu de l’aider ?
- Ben mon oncle est trop strict !
Puis en suivant sa copine et l’homme qui l’a ensorcelé, se parler, d’un air séduit.
- Elle fera mieux de le ramener ici ! je n’ai qu’un souhait que le connard me voit avec ce tombeur, et mord les doigts de jalousie !
Mayssa se mit à rire, et continua.
- T’as l’air d’avoir le coup de foudre pour lui ! mais tu n’es pas la seule ! même sa mère était amoureuse de lui surtout quand il était bébé ! il était tellement beau et joufflu et elle le prenait tout le temps en photo et n’arrêtait pas de répéter que si elle entendait parler d’une compétition de plus beau bébé de l’année, elle n’hésiterait pas un seul moment de participer !
A 10mètres de leur table, Ghada, en tenant le bras de son petit frère comme si elle craignait qu’il prenne la fuite, le tira un peu à l’écart de ses potes, puis en le grondant.
- Mais pourquoi tu persistes à faire souffrir ta mère ?
En se débarrassant du bras de sa sœur, et en la regardant d’un regard coléreux.
- Ne me dis pas que tu lui as dit que je t’ai rendu visite ?
Elle remua sa tête pour dire oui, alors énervé, il cria.
- J’en étais sur !
- C’est ta mère salaud ! elle ne dormait plus tellement elle se fait des soucis pour toi !
En dévorant sa sœur d’un regard furieux.
- Et qu'est-ce que tu veux de moi, maintenant ?
- Que tu me donnes ton numéro de téléphone ! s’écria-t-elle d’une voix ferme. Et aussi l’adresse de l’appartement où tu habites !
Il lança un petit rire ironique puis dit.
- Au lieu de perdre ton temps avec moi, tu ferais mieux de résoudre tes problèmes intimes avec ton coincé d’époux !
Sans se contrôler et sous l’emprise d’une colère volcanique, elle lui colla une belle gifle, puis en reculant d’un pas.
- T’es toujours aussi insolent ! et en souriant légèrement, mais il m’a enfin dépucelé !
En traçant un sourire de satisfaction.
- Enfin ! monsieur a prouvé qu’il est homme ! puis en se penchant sur sa sœur et en lui collant une douce bise sur le front, quand tu me manqueras, je t’appellerai !
- Alors, je te manque pas maintenant ? dit-elle en lui jetant un regard blâmant, mais doux d’une sœur qui aime son frère.
En sautant dans le métro, qui commençait de bouger lentement.
- J’ai eu ma dose avec ta claque ! puis en lui faisant un clin d’œil tout en illuminant son beau visage d’un sourire angélique, prend soin de toi sœurette !
*************************************************************
Le GSM se mit à vibrer sur la table de nuit, pour la nième fois. Ranime, bien au chaud, sous une couette, dans son immense lit, tenta à l’aveuglette avec une main paresseuse, de faire taire l’engin, puis en ouvrant les yeux avec difficulté, après une nuit où elle n’a trouvé le sommeil qu’après deux heures de matin, vu qu’elle a bu tant de café pour pouvoir veiller et travailler les séries de mathématique, aussi nombreuses que les gouttes d’une pluie, et en se rendant compte qu’il était presque 16 h. Comme électrocutée, elle sauta du lit, puis parla toute seule dans le noir, avant d’allumer la lumière.
- Mais merde ! pourquoi personne ne m’a réveillé ! puis en ouvrant son armoire, et en saisissant le premier jean qui tomba sur ses yeux, pff ! dire que j’ai passé une nuit entière à travailler les séries de math, pour finalement rater le TD de 14h !
Une fois habillée, sans se peigner les cheveux elle se dirigea vers la salle de bain, ferma la porte puis en se débarbouillant, le GSM qui était dans la poche de son pantalon se mit à vibrer à nouveau. Elle essuya son visage avec une serviette propre puis en décrochant.
- Oui, Rafiaa !
- Mais putain ! tu m’as causé la peur de ma vie ! j’ai imaginé le pire !
- Pourquoi tu ne m’as pas appelé plus tôt ! la gronda Ranime sur les nerfs.
Plus énervée qu’elle, Rafiaa s’écrie.
- T’as pas vu le nombre de fois où je t’ai appelé ? ça fait plus qu’une trentaine de fois !
- J’étais endormie ! puis en se demandant, elle m’a surement marqué absente, madame Oueslati !
Rafiaa en riant répondit.
- Oui bien sûr ! puis en se rappelant, ah monsieur bacha ! m’a interrogé sur toi comme t’étais absente dans sa séance aussi ! il avait l’air inquiet pour toi ! je crois qu’il craque pour toi !
- Je t’en supplie Rafiaa, je ne suis pas d’humeur pour ça ! puis en essayant de se calmer, on se verra dans un quart d’heure !
- OK ! à toute !
Ranime raccrocha, brossa vite fait les dents puis se pomponnait légèrement en faisant une touche de gloss et au moment où elle tenta de quitter la pièce, la porte refusa de s’ouvrir.
- Zut ! c’est tout ce qui me manque maintenant !
Elle essaya en vain de l’ouvrir, mais la poignée sembla endommagée et si rigide. D’un excès de colère, Ranime donna un coup de pied violent à la porte, puis en criant.
- Putain !
Puis elle composa le numéro du propriétaire de l’immeuble qui habitait l’appartement juste en dessus du leur, pour qu’il vienne à son aide, mais au moment où elle faillit toucher le bouton appeler, elle entendit la porte de l’appartement s’ouvrir.
Très contente, elle s’approcha de la porte pour appeler à l’aide en croyant que c’était l’une de ses colocataires, mais la voix d’un homme inconnu, la figea sur place et lui fait perdre la langue.