Akram, poussa la porte principale de la maison du chott, semi-entrouverte, avec son pied. Il avait les mains pleines . Il soulevait quatre boites en carton, superposées, de taille moyenne. Gêné par la boite d’en haut, qui lui masquait assez la vue, il put voir Rami, et Sondos, assis tous les deux, sur l’unique canapé en cuir noir, de la salle d’accueil, jouant aux cartes.
Il s’énerva encore plus, lorsqu’il entendit le rire imbécile de son employé, suite à sa victoire, puis en criant tout en piétinant le sol en carrelage marbré.
- Mais putain ! viens m’aider !
- Ah ! salut boss ! disait Sondos, en s’accoudant.
Il ne répondit pas et tout en hurlant sur Rami.
- Bouge tes fesses, connard !
Les yeux envahis de curiosité, il se demanda, en se mettant debout.
- Ce sont des boites de quoi ?
- Peut être des cadeaux pour Noël ! intervenait Sondos, en rigolant.
Il n’étalait pas la conversation avec elle, et s’adresse de nouveau à Rami.
- Va chercher l’escabeau et suis moi à l’étage!
- Ok chef !
Comme il ne la répondit pas, Sondos, se mit debout d’un bond puis en s’approchant de lui avant qu’il monte l’escalier.
- Laisse moi t’aider !
En mettant le pied droit sur la première marche , il refusa gentiment, sans même la regarder.
- Non ! merci ! elles ne sont pas lourdes !
Le temps qu’il parlait, elle lisait brièvement un peu de l’écriture gravée en petit, sur l’une des boites et se demanda.
- Pourquoi faire ces caméras ?
Il s’arrêta sur place et en tournant la tête pour rencontrer son regard.
- Tu poses trop de questions dernièrement ! et en fixant sur elle ses yeux colériques, je ne suis pas tenu de te faire un rapport complet sur tout ce que je fais !
Elle sourit, légèrement, puis continua de sa voix maligne :
- Pourquoi t’es si énervé ?
Il souffla d’énervement, et poursuivit.
- Appelle Nader, et demande lui de ramener ses fesses ici !
Puis monta l’escalier, sans alimenter sa curiosité. Elle le suivit d’un regard inquiet puis s’assit de nouveau sur le canapé et appela son homme. Comme il ne répondit pas une première fois, elle répéta une deuxième, qui fut la bonne.
- Salut mon chou !
- Qu’est ce que tu veux ? dit-il énervé, et d’une voix basse, étant assis sur le comptoir de sa boutique, en la présence de Sabrine, qui ralentissait le rythme de pliage des trois ou quatre pull, avant de les remettre en place, pour se permettre d’entendre son chef.
- Tu me manques…
Il lui coupa la parole agressivement, tout en gardant un œil attentif sur sa vendeuse, concentrée autant que lui par ce coup d’appel à midi.
- Écoute, si t’as quelque chose d’important à communiquer, vas-y sinon, je n’ai pas de temps à perdre !
Sondos, la voix empâtée de colère suite à sa brutalité, balbutia.
- Le boss est chez nous ! et il désire te voir illico !
- Pourquoi ne m’a-t-il pas appelé lui-même ? se demanda-t-il en perçant son employée d’un regard sacripant.
- Ben ! quand tu viendras demande le lui ! et en ricanant, à ce qu’il parait, la maison du chott va devenir un studio de tournage !
Nader, eut une brusque secousse de surprise puisqu’il ne s’attendait pas à ce que son pote changea assez rapidement d’avis, puis répondit d’une voix brève.
- Ok, j’arrive !
En raccrochant, il continua à regarder Sabrine, puis en lui parlant.
- T’as quelque chose à dire ?
- Non, non ! dit elle, en se remettant au boulot, un peu perturbée.
Il saisissait sa veste noire, et en s’approchant de sa vendeuse.
- Je m’absenterai une bonne heure, donc ne quitte pas la boutique !
- Ok, patron ! dit-elle, sans oser rencontrer son regard.
Il mit la main sur la poignée de la porte, puis en se rappelant.
- Une de tes colocataires est venue te chercher l’autre jour !
- Ah, oui, Ranime, elle me l’avait dit le jour même ! murmura-t-elle en souriant.
Il secoua sa tête, un petit moment en songeant à son joli regard puis poursuivit.
- Et pourquoi tu m’as menti à son propos la première fois ?
Troublée par sa question, elle disait tout en baissant la voix davantage.
- Ben parce que j’avais peur de ta réaction ! toi, qui ne voulais pas que je parle à mes amies ou un membre de ma famille dans la boutique !
- Hum ! c’est ça ! murmura-t-il sans lui épargner son regard désagréable. Puis continua, elle fait quoi dans la vie ?
- Étudiante !
- En quoi ?
Sabrine, eut un petit sourire malin, et se demanda, en rigolant.
- Pourquoi ? elle t’intéresse tant, patron ?
Nader, demeura impassible et répondit froidement.
- Simple curiosité ! puis en sortant une cigarette, ben, demande lui de passer la semaine prochaine pour le solde ! et en lui faisant une œillade tendre pour la première fois, et transmets lui mes meilleures salutations !
Pendant ce temps-là, Akram, faisait le tour des quatre chambres, pour détecter les endroits stratégiques et les plus discrets possible pour placer les minuscules caméra, assez invisible, du loin. Il passa une bonne demi-heure dans la première chambre, debout sur l’escabeau, et Rami, en dessous, le fixant avec ses grands bras, sur le sol, pour maintenir l’équilibre, sans pouvoir se tenir de poser des questions.
- Mais monsieur Akram, je ne comprends pas pourquoi tu places ce grand nombre de caméras dans chaque pièce ! une à mon avis suffit !
Énervé, et le cou tendu, tout en accrochant la caméra prés du lustre.
- Pour la sécurité de mes filles ! je placerai autant d’appareils qu’il ne le faudra !
- Mais, le système d’alarme est largement suffisant pour moi ! c’est du gaspillage, à mon avis !
Il baissa la tête, un bref moment et en hurlant.
- Tu ne peux pas tenir l’escabeau, un quart d’heure sans la fermer ?
Il mordit sa lèvre inférieure d’indignation et murmura.
- C’était juste un avis personnel !
- Et ben ton avis garde le pour les imbéciles comme toi !
Dans le petit salon d’accueil, Sondos, était en train de mener une conversation assez tendue avec l’une des filles, la plus âgée d’ailleurs, qui avait 24ans, et qui ne cessait de parler russe sans que sa interlocutrice, puisse la comprendre et s’écria, furieusement.
- Klavdiya, calme toi ! c’est inutile de crier et de fournir tant d’effort en parlant alors que je ne te comprends pas !
La jeune brune aux cheveux courts, continua, en empruntant quelques mot en anglais.
- No time !
- Ben chérie ! moi aussi j’ai pas assez de temps pour me casser la tête à interpréter ce que tu dis !
Les deux filles parlant chacune sur un satellite à part, se divergèrent dans l’interprétation des paroles de chacune jusqu’à ce que Nader passe dans le hall. Là, Sondos, sourit et cria de joie.
- Le voilà mon sauveur !
En apercevant Klavdiya, il s’efforça de se calmer, puis pour comprendre la raison de sa venue, il se mit à lui parler en russe. Sondos, totalement perdue, suivit du regard, son homme et la fille, la façon étonnante dont leurs lèvres se remuaient en vitesse, et la montée de tension de Nader apparente en haussant la voix et en criant. Puis la fille, prononça trois mots brefs; que Sondos, n’arrivait pas à distinguer s’ils faisaient partie d’un seul mot composé ou de toute une phrase, saisissait son sac à main jeta un regard de travers. Puis quitta la maison en claquant fortement la porte derrière elle.
Soucieuse, et en suivant son homme, collant la paume de sa main sur son front.
- Qu’est ce qui se passe !
Il traça un sourire furieux et en regardant Sondos.
- Elle ne veut plus bosser pour nous !
- Ça alors ? elle a trouvé une meilleure offre ?
Ébahi, il resta le cœur un peu gros et murmura.
- Elle veut s’occuper de sa mère mourante !
- Ah ! elle a raison dans ce cas ! mais elle va revenir j’espère…
Il lui coupa la parole violemment, en hurlant.
- Mais t’es gourde ou quoi ? je t’avais dit qu’elle a démissionné ! et elle s’en va pour Moscou, elle a un vol dans une heure !
- Ah ! c’est pour ça qu’elle me répétait no time !
Il laissa un souffle volumineux glisser de sa bouche puis cria.
- Et merde, il nous manque plus que ça !
Sondos, en effleurant avec ses doigts l’agenda des rendez vous.
- Le pire, qu’elle était choisie comme call girl, pou lundi prochain, par un client !
Ses yeux s’assombrirent puis en s’approchant de Sondos, il reprit d’un ton courroucé :
- Il va falloir que tu l’appelles et que tu lui demande de choisir une autre à sa place !
- Oui, oui, compte sur moi, mon chou !
Il suivit son regard vacillant d’excitation puis murmura doucement en changeant de sujet :
- Ma femme est au courant pour notre liaison !
Elle se tut, le visage envahi d’une pâleur soudaine. Seule sa jambe gauche qu’elle trépidait nerveusement trahissait son tourment intérieur.
- Comment l’as-t-elle su ?
- A toi de me le dire ! disait –il tout en gardant son sang froid, puis en agitant ses clefs de voiture, d’un geste angoissé, on en parlera plus tard !
Puis lui jeta un long regard, et monta précipitamment l’escalier. En poussant la porte de la première chambre, il vit son partenaire, dégringoler l’escabeau puis leurs regards se croisèrent.
- Ah, t’es déjà là ?
Souriant, Nader s’approcha de lui et reprit.
- Je vois que tu as commencé le travail sans moi !
Akram, posa sa lourde main sur l’épaule de Nader et répondit.
- C’est un peu ma spécialité tout ça ! donc je n’ai pas vraiment besoin de ton aide ! puis en perçant de regard Rami, silencieux, et debout sans rien faire. Tu n’as pas faim ?
- Si !
- Alors va manger, et laisse nous seuls un moment !
- Ok, boss ! disait-il en traçant son sourire imbécile.
Une fois en tête à tête, Akram, ferma la porte à clés.
- Alors qu’est ce que t’en dit de quatre caméra dans chaque chambre …
Il lui coupa la parole, curieusement.
- Avant tout, qu’est ce qui t’a fait changer d’avis ?
Il sourit, et répondit en secouant les épaules.
- C’est une belle offre à saisir! puis en ingurgitant sa salive, mais je ferai un certain filtrage, et en s’expliquant, je ne lui enverrai les vidéos, qu’après les avoir visionnées, et surtout pas des vidéos, dans lesquels des hommes puissants sont filmés ! c’est hors de question !
- On négociera cela avec lui plus tard ! puis en se rappelant, j’ai une bonne et mauvaise nouvelle à t’annoncer !
En croisant les bras, Akram murmura.
- Vas-y comme d’habitude les deux à la fois !
- La mauvaise, ce que l’une de nos filles vient de nous larguer et la bonne, ce que Serguei m’a encore appelé ce matin, pour me dire qu’il nous réserve une bonne surprise pour samedi, une personne spéciale, qu’il a hâte de nous présenter !