Armand ne se souvenait plus très bien. Ce paysage lui était familier. Était-il déjà passé par là ou l'avait-il simplement rêvé ?
D'un pas décidé, il arpentait les lieux, à la recherche du moindre indice susceptible de répondre à sa question.
C'est alors qu'il croisa un bien étrange personnage.
Un frêle petit bonhomme à la peau extraordinairement diaphane était assis sur une vieille branche abandonnée. Ses bras étaient recroquevillés sur son propre corps et il se balançait inlassablement, comme s'il s'appliquait à reproduire les mouvements monotones des vagues qui allaient et venaient sur le sable humide.
- Bonjour. Lui dis-je timidement.
Ses yeux restaient fermés et d'un air impassible, il se tourna vers moi.
- Bonjour. Répétai-je avec plus de conviction.
Cette fois-ci, il ouvrit ses yeux. Des yeux couleur opale subtilement teintés d'un fond de mélancolie bleue délavée. Et d'une voix douce et détachée, il me répondit : - Quel jour sommes nous ?
- Vendredi.
- Comme le vent qui redit...
- Comment t'appelles-tu ?
- Je ne m'appelle pas. J'appelle le vent et parfois, le vent m'appelle...
- Comment vas-tu ?
- Très lentement. A pied souvent. parce que j'ai le temps. Sauf quand le vent m'appelle...
- D'où viens-tu ?
- J'y viens... j'y viens... Je viens de... là, de... l'à venir... de là où le vent m'appelle...
- Tu vis ici ?
- Je vis. Ici ou là-bas, c'est du pareil au même. Je vis... c'est tout. Et c'est déjà.
Tu entends ce vent qui me rappelle... ?
- Et si je t'appelais Alban... Entends-tu encore ce vent qui t'interpelle... ?