Rappel : les éditions Zoé qui accomplissent un remarquable
travail autour de Robert Walser, avec notamment des traductions de Marion Graf,
ont fait récemment paraître deux nouveaux livres, Au bureau,
Poèmes de 1909, et Petite Prose.
Voir la présentation de ces livres ici.
A noter tout particulièrement, les eaux-fortes de Karl Walser qui illustrent le
livre Au bureau
SOIR
Noir jaune devant moi dans la neige luit
un chemin qui se perd sous les arbres.
C’est le soir, et lourd
est l’air imbibé de couleurs.
Les arbres sous lesquels je marche
ont des branches comme des mains d’enfants ;
elles implorent sans fin,
si douces quand je suspens mon pas.
Jardins et haies au loin
brûlent dans un obscur fouillis,
et le ciel embrasé voit, figé de peur,
les mains d’enfants qui supplient
Robert Walser, Au Bureau. Poèmes de
1909, traduction de Marion Graf, édition bilingue, Eaux-fortes de Karl Walser,
pp. 10 et 11
* * * * *
ABEND
Schwarzgelb im Schnee vor mir leuchtet
ein Weg und geht unter Bäumen her.
Es ist Abend, und schwer
ist die Luft von Farben durchfeuchtet.
Die Bäume, unter denen ich gehe,
haben Äste wie Kinderhände;
sie flehen ohne Ende
unsäglich lieb, wenn ich stille stehe.
Ferne Gärten und Hecken
brennen in dunklem Wirrwarr,
und der glühende Himmel sieht angststarr,
wie die Kinderhände sich strecken.
* * * * *
NEIGE
Il neige, il neige, la terre se couvre
d’un blanc fardeau, si loin, si loin.
Du ciel tournoie en giboulée,
titube et tombe, la neige, la neige
Ah, la paix t’est donnée, un espace,
ce monde blanc m’exténue.
Si bien que mon désir, petit, puis grand
pénètre en moi jusqu’aux larmes
Robert Walser, Au Bureau. Poèmes de
1909, traduction de Marion Graf, édition bilingue, Eaux-fortes de Karl Walser,
pp. 44 et 45
SCHNEE
Es schneit, es schneit, bedeckt die Erde
Mit weißer Beschwerde, so weit, so weit.
Es taumelt so weh hinunter vom Himmel
Das Flockengewimmel, der Schnee, der Schnee.
Das gibt dir, ach, eine Ruh', eine Weite,
die weißverschneite Welt macht mich schwach.
So daß erst klein, dann groß mein Sehnen
Sich drängt zu Tränen in mich hinein.
* * * * *
PLUS LOIN
Je voulais m’arrêter,
ça m’emporta plus loin,
le long des arbres noirs,
et sous ces arbres noirs
je voulais vite m’arrêter,
ça m’emporta plus loin,
le long de prairies vertes,
au bord des prairies vertes
je voulais juste m’arrêter,
ça m’emporta plus loin,
vers de pauvres masures,
près d’une des masures
je voudrais pourtant m’arrêter,
regarder sa misère
et la lente fumée
qui monte vers le ciel, je voudrais
m’arrêter là, longtemps.
Je le dis, me mis à rire,
le vert des prés se mit à rire,
la fumée qui montait, fumignon, souriait
ça m’emporta plus loin.
Robert Walser, Au Bureau. Poèmes
de 1909, traduction de Marion
Graf, édition bilingue, Eaux-fortes de Karl Walser, pp. 58 et 59
WEITER
Ich wollte stehen bleiben,
es trieb mich wieder weiter,
vorbei an schwarzen Bäumen
doch unter schwarzen Bäumen
wollt’ ich schnell stehen bleiben,
es trieb mich wieder weiter,
vorbei an grünen Wiesen,
doch an den grünen Wiesen
wollt' ich nur stehen bleiben,
es trieb mich wieder weiter,
vorbei an armen Häuschen,
bei einem dieser Häuschen
möcht' ich doch stehen bleiben,
betrachtend seine Armut,
und wie sein Rauch gemächlich
zum Himmel steigt, ich möchte
jetzt lange stehen bleiben.
Dies sagte ich und lachte,
das Grün der Wiesen lachte,
der Rauch stieg räuchlich lächelnd,
es trieb mich wieder weiter.
Ces trois poèmes ont été mis
en musique par Heinz Holliger hautboïste et compositeur contemporain
Sur Heinz Holliger
Robert Walser dans Poezibao :
Poèmes (lecture d’A. Lance), biobibliographie, extraits 1, extrait 2
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