Notes sur l'écriture (15)

Par Deathpoe

Dans sa quête personnelle, le pète-visionnaire doit donc pouvoir atteindre toutes les sensations possibles, et être apte à les supporter, à ne pas se laisser entraîner dans leur flux incessant, torrentiel.


La poésie subjective et le démantèlement des sens, si chers à Rimbaud et plus tard à Morrison (plutôt poète que Lizard King) est à mille lieues de la poésie de paysage, du sentiment de Beau, au sens large du terme. Elle ne peut se réduire à ce Beau, à une révélation fictive du Divin (paysages et amours systématiquement transcendants) mais ressemble plus à la rubrique faits divers d'un journal: ses meurtres, catastrophes et héros d'une seconde, sans aucune prévision possible.
De fait, la poésie pourrait prétendre à la fulgurance, à l'éclair visible quelques dixièmes de seconde seulement. Cette poésie est alors issue, non pas du coeur sain et de belles intentions qu'on lui prête habituellement, mais d'un cerveau embrumé, emmêlé comme un croisement d'autoroutes rapides, le tout mélangé à des tripes en feu.
Cette fouille de sensations, quelle qu'en soit la manière, comporte le risque d'une spirale infernale entraînant la perte de soi, un rapport plus que décalé à la réalité et des effets indésirables, comme l'abus d'antalgiques; car il faut dès lors, et de manière quasi-nécessaire aller jusqu'au fond de soi et être confronté à ses vices personnels, à la cruauté, au dégoût de soi et des autres, à l'ennui, en bref, à ce qu'il y a de plus mauvais en chacun d'entre nous.