BiBi lit ce qu’il a sous la main. Il se saisit de ce qui trace et tresse son quotidien. Trois faisceaux ce jour : 1. l’abonnement à Télérama a été abandonné mais il continue d’y jeter un œil. 2. Au boulot : il y a l’avant-dernier numéro du Lien Social qui traîne sur la table. 3. Chez le buraliste, sur une pulsion d’achat, il se dit «Oui, deux euros pour le numéro de mars de Décroissance, pourquoi pas ? »
Subrepticement, via ce Triangle incongru, trois «idées» improbables et vivifiantes vont s’entrechoquer. Des croisements se font sans qu’on sache vraiment pourquoi. Au fond, ces trois lectures, ces trois faisceaux vont converger, ils convergent vers le bonheur de comprendre le Monde dans sa dimension insensée, dans sa terrifiante intranquillité.
1. A Télérama, quelques mots de Denis Polydadès font bonheur et honneur au Sens :
Question : « être acteur, c’est être un autre ? » DP : « C’est se fantasmer autre. C’est pourquoi je déteste me voir à l’image, notamment à la Télévision : elle me montre l’individu que je suis, à l’âge que j’ai. Alors que sur scène, je me prête volontiers à un autre corps, une autre voix, un autre visage » ou encore « Il faut n’avoir aucun caractère pour pouvoir les jouer tous… Michel Bouquet nous disait d’être terne, qu’il fallait consentir à être quelqu’un de pas très intéressant, n’ayant un avis sur rien, pour être tout entier dans le personnage ».
2. Dans l’hebdo Lien Social, il a cet article-interview d’Anne et Marine Rambach, co-auteurs du livre « Les Nouveaux Intellectuels précaires » chez Stock. Elles parlent des difficultés pour des travailleurs sociaux d’accompagner cette précarité spécifique : «Le travailleur social comprend parfaitement pourquoi il accompagne un ouvrier de l’industrie automobile (…) Difficile en revanche de comprendre un éditeur précaire, par exemple, avec un statut à moitié illégal, payé en droits d’auteurs, bac plus 5, bien habillé, qui habite en centre-ville et qui pourtant vous explique qu’il ne peut plus nourrir ses enfants parce qu’il touche 400 euros par mois » ou encore « Une partie de ces Intellectuels précaires, à force de dégradation progressive, décroche. Elle entre alors dans une profonde détresse. Nous avons rencontré un chercheur, géographe de surcroît, demandé pour des colloques à l’étranger. Il habitait dans un tout petit appartement, dans un état de dégradation extrême avec à peine de quoi s’acheter du café. Il était au RMI, faisait des petits boulots à l’occasion, comme du nettoyage ».
3. Revue « Décroissance » (mars 2010). La réponse d’Alain Accardo, souveraine, sans complaisance, fière et pulsionnelle, à un lecteur qui lui demandait de tenir le « ton neutre et impassible qui sied à tout discours soucieux d’objectivité » :
« Eh bien cher et savant ami, au risque d’aggraver mon cas à vos yeux, je vous répondrai que ce qui me paraît manquer le plus aujourd’hui, en matière de discours social, c’est justement l’indignation ».
Trois liens hasardeux mais au final, une seule Idée-maitresse : l’indignation, la digne Indignation.
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BiBi a continué de lire. Il invite à aller voir l’article de Thierry Crouzet (« Le Blog : forme majeure« ), l’article féroce et juste sur Apathie de NouvelHermès et les rapports de force et de farce dans le couple Chouchou et Chochotte chez… Plume de Presse.