Régulièrement, nous entendons des remarques sur le nom de notre association, "Sauvons l'Europe", qui serait un tantinet pessimiste vu qu'après tout le Traité de Lisbonne est entré en vigueur, la pérennité instituionnelle est sauvegardée, et que donc comme chaque matin le soleil s'est levé sur l'Europe (pour reprendre les termes de notre bien-aimé Président). Quelqu'un de plus pessimiste nous a adressé ce texte, que nous publions pour relancer le débat. Disons ici que si nous partageons une bonne partie de ce point de vue, nous pensons qu'il reste à faire demain ce que nous n'avons pas fait hier.
Et quand bien même des voeux pieux maintes fois prononcés, l'Europe se meurt. A l'heure à laquelle l'Europe recule, Mesdames de Sarnez et Goulard se lamentent, « mais que faire? ». « Il faut la donner à aimer », alors que les peuples la refusent. On a tout essayé, me semble-t-il. Effectivement, les nœuds de résistance sont complexes à dénouer. Déjà, notre créature ne parvient pas à surmonter les égoïsmes nationaux, elle paraît lointaine, elle inquiète, les avancées communautaires sont très faibles. La méconnaissance des symboles (hymne, drapeau etc.) explique cet échec. D'autre part, les institutions sont méconnues. Quelle est la fonction de la Commission européenne, de la Cour de Justice et de la Banque Centrale? Le « Marché » domine tout, la pauvreté explose, la dignité humaine recule. L'année 2005 fut l'année marquant le renversement de la tendance. En France, la non-ratification du Traité donne à cet instant un signal puissant à nos élites, d'un refus catégorique de ce projet d'Europe fédérale, projet de civilisation sans équivalent, dans lequel « le rapprochement des économies garantit un projet politique » ambitieux, ayant le devoir de « contribuer à un monde meilleur ». Sachant que la paix est un « acquis communautaire », le reste est considéré comme secondaire, sauf que, « la grandeur de la France passera par la dimension européenne » et que, l'insuffisance de coordination entre les Etats provoque des réponses faibles, comme ce fut le cas lors du Sommet de Copenhague.
Face à de tels échecs, quand les responsables politiques au sommet de l'Etat vont enfin comprendre que l'approche intergouvernementale est un acte manqué? Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué? Pour négocier avec le Président OBAMA, mieux vaut parler d'une seule voix que de morceler les intérêts d'un continent « allant de l'Atlantique à l'Oural » en 27 petites voix, qui se coupent la parole, qui font un brouhaha insupportable, et surtout qui font le bonheur du Président américain! Certains problèmes ne peuvent se résoudre qu'à l'échelle européenne! Aucun pays n'a le droit d'imposer ses décisions à un autre. Un Etat a le droit d'exprimer son désaccord en utilisant son droit de véto. Non content d'être anti-démocratique, ce droit pénalise lourdement la construction européenne. Tandis qu'un vote à la majorité qualifiée apparaît déjà comme étant une alternative intéressante. Contrairement au troc, la monnaie permet de lutter contre la violence naturelle de l'Homme. Justement cette monnaie existe, c'est l'Euro. La Banque Centrale Européenne permet aux Etats-membres d'emprunter. Les échanges sont réglementés. La stabilité économique permet la paix. Est-ce-que les eurosceptiques peuvent infirmer, que les fonds européens financent des projets régionaux de qualité et assurent la création de nombreux emplois? Depuis un demi-siècle, le Fonds Social Européen investit dans le capital humain, le Fonds Européen de Développement Régional promeut la cohésion économique et sociale et réduit l'écart de développement entre les régions. Le Fonds Européen d'Aménagement et de Développement Régional développe une politique au profit des zones rurales. L’Europe défend une valeur fondamentale: la solidarité. L'année 2010 est l' « Année européenne de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale ». Ce phénomène est muti-causal et il n'est pas l'apanage des pays les moins développés. A Paris, à Milan, à Barcelone, à Berlin, à Londres, les plus fragiles d'entre nous meurent sur les trottoirs dans l'indifférence totale des citoyens. Quant à la pauvreté, il y a toujours un décalage troublant entre les vœux pieux et les résultats des politiques menées.
L'Europe se meurt. Certains jours, les Européistes ont le sentiment d'avoir fait le tour du problème. Sinon, que faire demain, que nous n'ayons pas déjà fait?
Démocratement,
Pierre-Franck HERBINET