D'abord, il y a la curiosité d'assister aux premiers pas sur scène d'une formidable actrice. Sera t-elle à la hauteur ? Il y a également les a priori que l'on peut avoir sur ce texte mainte fois donné, "Maison de Poupée", du norvégien Henrik Ibsen; un théâtre froid, lent, pesant, dans lequel les personnages exposent longuement leurs sentiments mais les contiennent toujours... Bref, un théâtre pas évident à proposer au spectateur que je suis...
Et puis le rideau se lève... Et là, on arrête de se poser des questions.
Le comédien et metteur en scène Michel Fau a choisi d'emprunter un chemin assez casse gueule mais très réussi. Il enferme le personnage de Nora (Audrey Tautou) dans un monde factice, trop joli, presque celui d'une sitcom ou d'un mauvais boulevard, dans lequel les situations deviennent risibles, les comédiens surjouent, parlent faux... Mais bizarement avec une justesse et une sincérité qui convainquent le spectateur et lui montrent à quel point Nora n'existe pas dans cette société qui lui fait jouer l'épouse modèle et dévouée, la mère modèle, qui ne pense et ne vit qu' à travers son mari...
Alors un évènement fait comprendre à Nora qu'elle n'a jamais été qu'un objet, qu'un jouet, une poupée, aux yeux de son mari. Mari qu'elle a cru aimer, dans ce monde qu'elle a cru réel, dans lequel elle a cru vivre. Audrey Tautou cesse alors tout surjeu et devient bouleversante dans ce qu'elle nous propose, lorsqu'elle prend la décision de quitter son foyer, de vivre enfin pour elle, pour de vrai...
Audrey Tautou est remarquablement dirigée par Michel Fau. Elle est techniquement irréprochable. Ce spectacle est intelligent, moderne, vif, précis, rigoureux, et transmet parfaitement le message de l'auteur, plus que jamais d'actualité : Avant qu'il ne soit trop tard, n'oubliez pas de vivre pour vous, d'être vous même, dans cette société qui vous fait jouer un rôle.
C'est réussi.
Allez-y !