Dee Dee Bridgewater à l'Ancienne Belgique à Bruxelles, le 8 mars 2010

Publié le 08 mars 2010 par Concerts-Review
Configuration Flex à l'AB.
Un public Loden, tailleurs Yves Saint-Laurent pour applaudir la plus Parisienne (membre du Haut Conseil de la francophonie!) des grandes voix du jazz: Dee Dee Bridgewater.
Denise Eileen Garrett va sur ses 60 piges, mais granny a toujours le punch d'une teenager.
Une discographie exemplaire, passant du soul/funk au jazz .
Des apparitions remarquées dans des ' Broadway musicals' ( et à Paris 'Lady Day', en 1986) ou dans le jazz opera 'Carmen' .
Miss D D n'en est pas à son coup d'essai dans la rubrique tributes:'Love and Peace: a tribute to Horace Silver' et ' Dear Ella' pour Ella Fitzgerald ou 'J'ai deux amours', pour les classiques du jazz français.
En 2009, elle décide de rendre hommage à Billie Holiday, le cd ' Eleanora Fagan(1915/1959):To Billie with Love from Dee Dee Bridgewater'.
La tournée prévue pour la promotion de cet album passe par l'Ancienne Belgique!

20:00
Lights off, messages classiques: GSM au point mort svp, and no smoking.
Sur écran géant un documentaire vintage consacré à la vie tragique d'Eleanora Fagan aka Billie Holiday.
Excellente idée, nous permettant de tremper notre esprit dans l'univers de celle que Lester Young baptisa 'Lady Day', le sad and dirty thirties blues.
She revolutionized jazz & blues singing with her laconic phrasing, says the commentator.
Damn right, man!

Une brève pause et à 20:35', une voix off: Ladies and Gentlemen...

The Dee Dee Bridgewater Quintet!
Quatre musiciens se radinent:Edsel Gomez au piano et musical director .
Ira Coleman, l'élégant, à la contrebasse.
Greg Hutchinson, à la batterie.
Le farfelu James Carter, aux sax (tenor, soprano) et à la flûte.
Un signe d'Edsel, le Porto-Ricain, et les virtuoses attaquent un swing alerte, pour nous démontrer qu'ils ne sont pas un simple backup band, mais de véritables bêtes de scène, connaissant toutes les ficelles.
Il n'a pas fallu 2' pour que James Carter nous assassine avec un solo crapuleux, Ira le relayant à la upright bass. Bravo mec, lui lance Greg, écoute ça maintenant.
Vous pouvez applaudir, suggère le Carter.
Ok, man...clap, clap, clap...
Et c'est reparti pour un intermède comico-saxo brillant.
On va pas s'endormir ce soir!
(Ira Coleman:photo Sindy Mayot)

Please, welcome Dee Dee Bridgewater!
Robe élégante, talons hauts et tête rasée...
Bonsoir Bruxelles, en français impeccable, elle nous présente le dream band.
On y va, Edsel?
'Lady Sings the Blues'. Pas question de singer Holiday, l'approche de Dee Dee sera tout à fait différente, presque joyful. Billie éclairée sous un autre angle en utilisant un flux lumineux moins pathétique.
D'aucuns crieront à la trahison, ni mes voisins, ni moi ne faisons partie de ces intégristes.
Ainsi Lady Sings the Blues sera théâtral, voire vaudevillesque, avec un méchant duel Dee Dee / James Carter.
Le ton est donné: bonne humeur et clins d'oeil coquins.
'Lover Man' démarre par une voix de velours complainte amoureuse pour virer swing exubérant, avec travail prodigieux du piano.
Miss Bridgewater ayant l'excellente idée de laisser un vaste espace à ses musiciens.Ils en profitent, les petits malins.
'Don't Explain' Une flûte émouvante pour ce blues sombre. Une interprétation si intense que tes viscères abdominaux se contractent.Non, tu vas pas trembler comme une gamine de 15 ans face à Bill Kaulitz, le minet de Tokio Hotel?
Sorry, si!
'Them there eyes', pure jouissance que ce swing juteux pour lequel la diva se transforme en Louis Armstrong sans trompette.
Franche rigolade sur scène et off stage!
Gentlemen, we need to calm down: 'You've Changed' un blues crapuleux aux smoky soulful sax lines, chantant tout le désarroi de la nana voyant son mec la quitter.
Pas la peine de me dire que notre histoire est finie, baby..you've forgotten the words 'I love you'...
Une intro théâtrale et cracking fingersnapping pour 'Fine & Mellow' un second blues femme désespérée.
Elle a beau supplier ...I'll be a good wife to you... rien à cirer! Dee Dee ne l'entend pas de cette oreille, tu te fous de ma gueule(elle vise le sax de Mr Carter) et une scène de ménage orageuse éclate face au public médusé.
De la dynamite ce duo. Toujours sexy Miss Dee Dee.
Sublime!
Bon, vais régler le compte du brave Ira, maintenant...You don't have to have a hanker To be a broker or a banker... le suggestif 'My mother's son-in -law'. Elle se met à draguer,indécemment, le bel Ira qui stoïquement continue son solo.
Un pas-de-deux chargé d'érotisme, finissant par une remarque humoristique du bassiste: I already have a mother-in-law!
Un détour par Londres 'A Foggy Day' , nouvelle romance transformée en Fletcher Henderson groove. La chatte en chaleur, intenable, ayant jeté son dévolu sur le drummer ce coup-ci, tu comprends que le British Museum had lost its charm...
De l'énergie, de la virtuosité, un scat Ella Fitzgerald, de l'humour décapant( when you get older you've got wonderful dreams about sex, only dreams!)... Bruxelles est à genoux.
Les chagrins diront c'est Las Vegas, tu les ignores, ces pisse-vinaigres!
Ils voulaient du vrai Billie Holiday, ils seront servis: 'God bless the child' au soprano souverain.De nouveaux frissons te parcourent, mais avec l'insoutenable cri racial 'Strange Fruit' tout en retenue, Miss Bridgewater et son band nous laissent pour mort.
(photo Sindy Mayot)

La classe!
Pas le temps de sécher nos larmes 'Miss Brown to You' un nouvel uptempo devant permettre à Greg Hutchinson d'étaler tout son talent.

1h35' de bonheur!
Public debout et un bis imparable: 'All of Me'!
(photo Sindy Mayot)
Ton voisin t'embrasse presque, heureux d'avoir assister à un grand moment d'acting et de jazz singing.