On avait sonné l'assaut pendant les élections européennes, par la voix d'Eva Joly qui, enfin, nous donnait clairement accès à des instruments de lutte concrète contre les paradis fiscaux, cet espèce de cancer mondial qui permet les excès de la finance. Quand je parle de concret, je parle de l'inverse du "traité mondial" qu'on ne pourra jamais signer ou les déclarations d'intention "les paradis fiscaux, c'est pas bien !"
Il a fallu que Cécile Duflot, Robert Lion, Stéphane Gatignon, Jean-Luc Touly, Pierre Larrouturou et bien sûr Eva Joly[1] tiennent une conférence de presse devant le siège de BNP Paribas, à Opéra, pour que des dépếches et articles sortent de la confidentialité et provoquent un peu de débat.
Europe Ecologie contre les paradis fiscaux
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Et encore, quand je dis débat... D'une part les médias se foutent du fond des programmes comme d'une guigne et ont donc juste relayé la dépêche Reuters, puis ils ont oublié de demander leurs avis aux autres candidats[2], d'autre part je n'ai entendu personne réagir de toute façon à cette proposition. Que la droite UMP ignore ça, je comprends, que le NPA ni le Front de Gauche ne salue cette décision de la part d'un parti qui va peser entre 15 et 20 % des majorités régionales, je comprends moins. Je sens également le PS gêné aux entournures.
C'est d'autant plus dommage que le principal parti de gauche ne s'empare pas du sujet, et ce pour 2 raison :
- D'après le sondage IFOP qu'on a commandé, 68 % des Français interrogés approuvent cette démarche d'exemplarité des exécutifs régionaux.
- Ségolène Royal avait des propositions audacieuses contre les abus des banques, certes pas sur les paradis fiscaux mais sur les frais bancaires et la lutte contre le surendettement[3].
On comprend mieux, dès lors, pourquoi autant d'anciens socialistes appellent leurs camarades à voter Europe Écologie.
C'est dommage, parce qu'on là une occasion de montrer le pouvoir des collectivités, du pouvoir public. Finalement, qu'une région change de banque pour en choisir une plus vertueuse, c'est un peu la même démarche qu'un consommateur qui décide de ne plus acheter que bio ou équitable. À la différence près que la région a des moyens considérablement plus élevés qu'un quidam moyen.J'adorerais assister aux négociations, le 14 mars au soir, ne serait-ce que pour entendre ce que répondront les socialistes quand arrivera ce point-là du programme. Parce que s'ils refusent, il faudra bien justifier pourquoi ils comptent continuer à cautionner les pires pratiques des banques. Or les arguments de liaison contractuel (il faudra bien rembourser les emprunts en cours) ou d'obligations légales (là, j'avoue que je ne connais pas tout dans ce domaine), le double objectif de soutien aux banques coopératives et/ou mutualistes et la lutte contre les paradis fiscaux me parait prioritaire.
NB : pour les cochons bancaires, je me suis inspiré des spots démocrates que j'avais relayés il y a quelques temps.
Notes
[1] Les visages que j'ai réussi à apercevoir dans la vidéo.
[2] Honnêtement, on atteint des sommets d'imposture médiatique dans cette campagne : 2 mn expédiées dans les JT du soir, privilège aux postures et aux commentaires sur les commentaires des sondages, erreurs factuels sur les noms de listes (Génération écologie au lieu d'Europe Écologie), dossiers web complet servant d'alibi aux télés et radios alors que le sujet est maltraité pour la masse d'auditeurs/téléspectateurs... Quasiment pas un titre pour rattraper l'autre. Des fois je me dis que Peillon a eu raison.
[3] Point 11 du Pacte présidentiel : 1/ Les tarifs bancaires seront réglementés par l’Etat : les agios et les pénalités liées aux incidents de paiement seront plafonnés et feront systématiquement l’objet d’une facture. 2/ L’Etat créera un service universel bancaire de base, favorisant les prêts sociaux et le micro-crédit. 3/ Afin de prévenir le surendettement, la publicité pour les prêts à la consommation sera réglementée et les établissements financiers qui octroieraient un crédit à des personnes non solvables seront sanctionnés. Ils devront participer au règlement des situations de surendettement à parité avec les organismes publics. Programme démoli par Libé qui s'était contentée de relayer les propos de l'Afub et de la FFB...