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Xynthia:La mémoire du risque.

Publié le 07 mars 2010 par Chang
Xynthia:La mémoire du risque.
retrouver ce média sur http://www.ina.fr/economie-et-societe/environnement-et-urbanisme/video/DVC7908001101/tempete-a-noirmoutier.fr.html
http://www.dailymotion.com/video/xcgh8g_tempête-xinthia-sur-le-port-de-noir_news
Il ne s'agit pas ici du pathétique « devoir de mémoire »,de ces coups de mentonnière opportunistes, mais de la mémoire vraie. Celle des hommes et de leurs paysages, celle des anciens, des sages : bref celle de la mémoire collective... Il s'agit surtout d'échapper à cette tyrannie de l'instant qui nous pousse dans une fuite permanente vers des avenirs, improbables, amnésiques.
La tragique tempête de ces derniers jours rappelle l'impératif de raviver la mémoire du risque dans la mémoire collective. « L'exceptionnel », mantra des médias, semble évoquer une absence de précédent ainsi que son impossible répétition, or il n'en est rien.
Faisons œuvre de mémoire. Le long des 276 km de côtes du département de la Vendée, de vastes espaces regagnés sur la mer sont protégés par 103 km de digues à la mer. Plusieurs inondations sont intervenues dans tous les secteurs du littoral. Les plus récentes et tristement célèbres restent la rupture du polder Sébastopol sur l'île de Noirmoutier avec plus de 3000 ha submergés et l'ouragan de 1940 avec la destruction des digues de Bouin. On évoquait déjà « l'exception ». Pourtant, là aussi, combinaisons d'un coefficient moyen, d'un vent violent et d'une forte dépression engendrant une sur cote importante. Depuis l’an mil l'île de Noirmoutier a été périodiquement assaillie par des tempêtes ou des ouragans dont la mémoire a été entretenue par les populations locales et notamment par l'association « 12/12 ».
Quelques évènements extraits du "répertoire des catastrophes" survenues dans l'île de Noimoutier:

1075 Un fort « vimer » envahit les champs au Both et au Fier.
1351 Reprise par la mer de très grands territoires dans toute la plaine de Barbâtre.
1509 Ouragan : la mer rompt la digue de Pulant et envahit la plaine de la Guérinière.
1638 Raz-de-marée : une partie de l’île est inondée.
1762 Nouveau désastre : l’île est menacée d’une inondation générale.
1763 Le 3 février, brèche aux dunes du Devin. Les digues de la Frandière sont rompues en trois endroits ; la mer noie toutes les terres de la Fosse, de la Frandière et des Onchères ; le moulin des Onchères et un certain nombre de maisons, dont une dizaine du bourg, sont engloutis et dévastés. (Pagesd’Histoire noirmoutrine – Fernand Guillet, 1948).
1838 Destruction des digues privées sur la côte de Pulant, inondations catastrophiques à la Guérinière. Il faut des barques pour passer d’une maison à l’autre.
1882 Les travaux d’endiguement au niveau du village de la Guérinière sont insuffisants contre les tempêtes du Sud-Ouest. Déjà la mer y est arrivée avec un courant de foudre et presque toujours en pleine nuit, envahissant l'église, la cure et les maisons voisines.

1926 Le 20 novembre, « lors d’une effroyable tempête, la mer
coupe les dunes de Bressuire (l'Epine) et rentre à flots jusqu’aux abords du
village ».1937 Rupture de la digue à la Tresson : la mer atteint la
route (N 148), 130 ha inondés. Dans la nuit du 13 au 14 mars, les habitants de
l’île de Noirmoutier et des communes du marais de Monts et de Bouin furent
alertés par le tocsin.
1996 Vents violents et mer très forte. Durant les mois
de janvier et de février, (en particulier le 7 février), toutes les côtes de
l’île subissent des dégâts
1999 Le 24 octobre, la conjonction d’une forte
dépression, d’un coefficient de marée élevé (coefficient de 102, hauteur d’eau
de 6,15 m à Saint-Nazaire soit environ 5,75 dans le port de Noirmoutier) et de
vents violents de secteur Ouest-Sud-Ouest provoque une surcote exceptionnelle
d’environ 0,9 m. Les digues sont touchées et des débordements ont lieu au niveau
des berges d’étiers et sur les quais du port de Noirmoutier.
1999 Les 26 et
27 décembre, même scénario : le coefficient supérieur à 100 qui accompagne la
tempête amplifie l’action érosive de la mer.

On le voit : l'histoire fait de l'exceptionnel la règle. Depuis, on a oublié, on a renforcé les ouvrages et on a construit plus d'un millier de maisons dans les prés salés inondables du sud de l'île. Les anciens n'auraient jamais construit là, sous le niveau de la mer. Les plus vieux villages sont tous sur le cordon dunaire, Jamais plus bas que le niveau zéro des cartes marines.
Les communes les plus touchées par la tempête Xynthia, dans la région de l'aiguillon sur mer illustrent cet oubli de la mémoire du risque : Dès 2005, la DDE de Vendée a répertorié les digues pouvant être objet de la protection civile et établit les définitions de la dangerosité du site. La digue Est de la Faute sur mer a été la première du département à être classée comme ayant un intérêt de sécurité publique et faisant l'objet de prescription de diagnostic, de surveillance et d'entretien par arrêté préfectoral du 7 juillet 2005.( http://www.paralia.fr/jngcgc/10_27_raison.pdf).
À Noirmoutier, les anciens n'ont pas oublié et pensent déjà à la future « marée du siècle » de 2013 : « pourvu que cela marche et qu'il n'y ait pas conjugaison de marée d'équinoxe et de tempête… ». « J'y pense et puis j'oublie... » Chantait Jacques Dutronc.

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