École des Hautes Études en Sciences Sociales
Centre d’étude des normes juridiques Yan Thomas
Séminaires de casuistique juridique 2010
« La question prioritaire de constitutionnalité » :
Le procès fait à la loi par le citoyen
Le 1er mars 2010, entre en vigueur une nouvelle procédure d’une portée juridique considérable : désormais, tout citoyen qui est partie à un procès de quelque nature que ce soit (civile, pénale, commerciale, prudhommale, administrative, etc.), pourra intenter un procès à la loi, qui disparaîtra de l’ordre juridique si le Conseil constitutionnel l’estime contraire à la Constitution. Tout citoyen qui considèrera ainsi qu’une loi porte atteinte à ses droits et libertés garantis par la Constitution, pourra prioritairement poser la question de sa constitutionnalité au juge saisi de son litige. Après transmission – et filtrage - par ledit juge de cette question au Conseil constitutionnel, ce dernier apportera sa réponse au citoyen, érigeant ainsi ce dernier en interlocuteur direct, réputé être désormais partenaire de la construction de l’État de droit.
En effet, pour les zélotes de celui-ci, la réforme introduite par la révision de la Constitution du 23 juillet 2008, fait naître en France (qui, de ce point de vue, rejoint sur le tard le club des démocraties) un citoyen actif de l’État de droit, se substituant au citoyen passif jusque là toujours tenu à l’écart de toute contestation contentieuse de la loi, c’est-à-dire de son évaluation au regard des grands principes et des valeurs fondamentales de la République. Mais le citoyen n’est pas le seul à être invité à cette discussion de la loi. Tous les juges de France et de Navarre (sauf les cours d’assises) devront veiller à ce que chaque plaideur soit en mesure d’user effectivement de sa nouvelle prérogative ; tous les avocats auront aussi à intégrer l’opportunité de cette question à leur stratégie de défense des intérêts de leurs clients ; tous les professeurs et étudiants de droit, quelle que soit leur spécialité, devront désormais tenir le droit constitutionnel pour une discipline majeure, située au cœur de la formation du juriste, comme c’est depuis longtemps le cas dans la plupart des autres États de droit... Le Conseil constitutionnel lui-même connaîtra bien entendu une évolution profonde pour assumer pleinement cette fonction présentée comme étant juridictionnelle par excellence.
Le Centre d’études des normes juridiques - Yan Thomas, dans le cadre de son séminaire collectif mensuel de « casuistique juridique », a décidé d’entamer, dès mars 2010, l’observation dans le détail de ce bouleversement des pratiques du droit et d’analyser sa portée juridique, mais aussi sociologique, politique, philosophique, à partir de l’actualité des techniques et des procédures en train d’être inventées.
« La naissance d’une exception d’inconstitutionnalité des lois en France »
Mardi 9 mars 2010, à 18 heures, salle 7
Denys de Béchillon, professeur à l’Université de Pau, ancien membre du Comité Balladur de révision de la Constitution
« Le Conseil constitutionnel et la méthode juridictionnelle »
Mardi 13 avril 2010, à 18 heures, salle 7
Guy Canivet, membre du Conseil constitutionnel, ancien Premier président de la Cour de cassation
« Contrôle de constitutionnalité : généalogie et morphologie »
Mardi 11 mai 2010, à 18 heures, salle 7
Pasquale Pasquino, directeur de recherches au CNRS
« La visioconférence dans le prétoire: des audiences recomposées ? »
Mardi 8 juin 2010, à 18 heures, salle 7
Laurence Dumoulin, directeur de recherches au CNRS
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