Alors qu’une certaine vision du « féminisme » a occupé voici quelques semaines nos médias friands de polémiques vite déballées, vite oubliées (pourvu que le brouhaha médiatique y trouve son compte), voici que la très officielle et contestée journée de la femme me donne l’occasion d’y mettre mon grain de sel.
J’ai la faiblesse de croire que la libération de la femme ne se joue ni dans l’opposition aux hommes ni dans leur imitation et l’adhésion à un fonctionnement social largement modelé à l’image d’une minorité d’entre eux. Je n’ai pas envie de me battre contre les hommes (ou alors tout contre aurait dit Sacha Guitry) ni envie de me battre pour endosser un tailleur et pousser un caddy.
Que celles qui considèrent qu’il est aliénant d’allaiter son enfant et de lui mettre des couches lavables et ressortent pour cela l’incontournable bouclier de la culpabilité, réfléchissent aux ressorts qui poussent de nombreux parents à céder au conformisme ambiant pour ne pas, soi disant, générer de la frustration chez leur progéniture. Au royaume de l’inutile, la publicité est reine et quand l’enfant paraît, il n’y a plus de limite dans la foire à la futilité.
A quoi sert l’engagement « féministe » si ce n’est à inventer une nouvelle voie que celle qui nous conduit aujourd’hui à des impasses écologiques et sociales ?
Si ce n’est à créer une société fondée sur d’autres valeurs que la compétition, la concurrence et la performance et dans laquelle la liberté passerait par le partage ?
Si ce n’est à innover ou retrouver d’autres façon de vivre ensemble qui ne soient basées ni sur la soumission patriarcale, ni sur l’imitation managériale ?
Si ce n’est de s’affranchir d’une société cloisonnée et compartimentée qui oppose le monde du travail à celui de la maternité et enferme les femmes (et les hommes) dans une logique unique d’épanouissement par une carrière professionnelle.
Rencontrer, partager, s’épanouir et apprendre ailleurs que dans des formes d’activité traditionnelles est possible et materner n’est pas synonyme d’appauvrissement intellectuel pour peu qu’on ne soit pas marginalisée parce que mère.
Les luttes pour les droits civiques et contre les discriminations doivent être maintenues. Mais faut-il pour cela ne pas aimer être mère, ne pas se sentir responsable de l’avenir de nos enfants et œuvrer à changer des habitudes de vie dévastatrice ?
L’enjeu serait de le faire ensemble, femmes et hommes, et de sortir définitivement des vestiges d’un monde qui n’avait pas l’habitude d’avancer en se préoccupant de ce qu’il laisserait derrière lui.